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Gisors et l'énigme des Templiers

Gisors et l'énigme des Templiers

Titel: Gisors et l'énigme des Templiers Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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Graal de cette façon. Mais cette
histoire de tête coupée n’est pas isolée dans la tradition galloise. Dans un
autre récit traditionnel, le héros Bran le Béni, après une expédition
malheureuse en Irlande au cours de laquelle il a été blessé d’un coup de lance
empoisonnée, demande à ses compagnons de lui couper la tête, d’emporter
celle-ci avec eux et de s’installer sur la colline blanche, à Londres. Là, ils
participeront, sous la présidence de cette tête coupée, à un authentique festin
d’immortalité [58] .
Et ils enterreront la Tête dans la colline : ainsi le pays sera-t-il
protégé contre toute invasion tant qu’on ne déterrera pas la Tête. Il est
certain que le thème ici traité s’apparente à celui de Persée et de Méduse. La
Tête sacrée est une protection contre les ennemis. On devrait y penser avant de
se livrer à des commentaires ésotériques sur le soi-disant Baphomet .
    Dans le récit français de Perlesvaux ,
texte de la fin du XII e  siècle fortement imprégné
de l’influence clunisienne mais relatant la primitive légende celtique du
Graal, Lancelot du Lac est obligé de couper la tête d’un géant pour sauver sa
vie, mais à condition que lui-même revienne un an plus tard faire couper sa
propre tête par le géant. Le géant ramasse sa tête et disparaît. La même
histoire se trouve dans un récit irlandais bien antérieur, le
Festin de Bricriu , dont le héros est le célèbre guerrier Cûchulainn [59] .
Ce « jeu du décapité », comme on l’appelle, se termine par un
simulacre de décapitation, et il se réfère à un thème bien connu dans
l’hagiographie chrétienne : les saints céphalophores (porteurs de leur
tête après une agression) du type de saint Denis en France, de saint Trémeur et
de sainte Tryfine en Bretagne, ou de saint Mitre en Provence.
    Ces récits sont dans la tradition qu’on attribue aux anciens
Gaulois. D’après Tite-Live, les Gaulois coupaient les têtes de leurs ennemis
et, après leur avoir fait subir un traitement, ils les suspendaient au poitrail
de leurs chevaux (Tite-Live, X, 26). Diodore de Sicile (V, 29) et Strabon (IV,
4) disent à peu près la même chose, en précisant qu’ils attachent leurs
trophées aux portes de leurs maisons. Tite-live (XXIII, 24) s’étend d’ailleurs
complaisamment sur le sort réservé à la tête du consul Postumius, qui, enrobée
d’or, servit de vase rituel dans des cérémonies druidiques. L’archéologie
confirme ces textes. On peut voir dans les ruines des cités de Glanum
(Saint-Rémy-de-Provence), de Saint-Biaise (près d’Istres et d’Entremont (près
d’Aix-en-Provence), ainsi qu’au musée Borély de Marseille, des piliers qui sont
des « accrochoirs à crânes », avec leurs clous de fixation. On peut
également voir au même musée Borély, ainsi qu’au musée Granet d’Aix-en-Provence
et au musée Calvet d’Avignon, un certain nombre de têtes coupées sculptées dans
la pierre. D’ailleurs, ces figurations se retrouvent souvent sur les chapiteaux
des églises romanes, l’art roman ayant hérité d’une grande part de la statuaire
gauloise.
    La tradition irlandaise se fait le témoin de cette coutume.
En Ulster, dans la forteresse du roi Conchobar, il y avait une salle réservée
aux trophées de guerre, et notamment aux têtes coupées. Dans un étrange récit,
le héros Conall Cernach coupe la tête du roi Mesgegra. Il pose ensuite la tête
sur une pierre, au bord du gué. « Une goutte de sang tomba du cou et alla
sur la pierre qu’elle traversa jusqu’au sol. Alors, il mit la tête sur une
autre pierre et la tête passa à travers la pierre [60] . »
Si l’on comprend bien, la tête est corrosive. Le même détail se retrouve à
propos de la tête du héros Cûchulainn : « La tête avait fait fondre
la pierre et était passée au travers [61] . »
On s’aperçoit ainsi que la Tête mystérieuse des Templiers ne surgit pas tout à
fait par hasard dans l’imagination des Inquisiteurs. Elle appartient à une
tradition occidentale solidement établie. Et faut-il rappeler la légende
concernant la tête de saint Jean-Baptiste, dont on a voulu faire le patron de
l’Ordre du Temple ?
    Mais les accusations contre l’Ordre ne s’arrêtent pas là. On
sait qu’on a, sans aucune preuve, soupçonné les Templiers d’avoir pratiqué
l’Alchimie. Ainsi s’expliquerait l’origine de leur richesse, ce qui, par voie
de conséquence,

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