Grands Zhéros de L'Histoire de France

emprisonnés à la maison de sûreté de Saint-Denis, avant de recevoir leur nouvelle affectation.
     
    Un cousin de Malet sera également inquiété à cause de lui. Musicien, compositeur d’un Chant de guerre pour l’armée du Rhin , le cousin en question sera interrogé puis relâché. Fort heureusement d’ailleurs, car il se nommait Rouget de Lisle et son chant de guerre faisait déjà un tabac sous le titre mieux connu de Marseillaise . Imaginez un instant le compositeur de notre hymne national aligné devant un peloton d’exécution dans la plaine de Grenelle pour complicité avec un déséquilibré mégalomane…
     
    Quant à Napoléon, il se trouve sur la route de Smolensk lorsqu’il est informé, la semaine suivante, du complot et de l’exécution de Malet et de ses complices. Il est fou de rage. D’abord parce que cet événement a montré la fragilité du régime impérial, ensuite parce que Cambacérès avait selon lui expédié bien trop vite et bien trop impitoyablement tous les accusés ad patres, le privant ainsi de la possibilité de se montrer magnanime en graciant certains d’entre eux. Enfin, parce qu’il réalisait amèrement que, le croyant mort, personne ne semblait avoir pensé que c’était vers son fils, l’Aiglon, qu’il aurait alors fallu se tourner. C’était à vous dégoûter de vous être donné tant de mal pour créer votre propre dynastie ! Aussi piteuse qu’elle se soit finalement avérée, l’équipée de Malet et de ses infortunés complices avait tout de même de quoi donner des sueurs froides à Napoléon : il avait bien compris que « si le complot s’était un peu prolongé, il se serait trouvé des sages pour conduire ces fous-là » !
Paul Deschanel
    Notre ultime « faux nul », disqualifié comme zhéro pour cause de fragilité mentale, est le politicien Paul Deschanel, président de la République durant sept mois, de février à septembre 1920. Certes, son cas nous fait franchir le cap du XX e siècle, mais nous croyons cependant pouvoir l’évoquer ici, car il vécut de 1855 à 1922, c’est-à-dire à la charnière des deux siècles. Deschanel fut ce président de la République si souvent brocardé pour être tombé d’un train en pleine nuit et avoir été retrouvé en pyjama, hébété, ensanglanté, errant en pleine campagne quelque part du côté de Montargis. Il aurait évidemment été tentant d’inscrire sa mésaventure dans la lignée de celle d’un Junot, venu entièrement nu au bal de Raguse, et d’en tirer des conclusions hâtives quant à sa qualité de zhéro. Il est vrai que lorsque l’accidenté leur déclara être le président de la République, les gardes-barrière le prirent pour un fou jusqu’à ce que la femme de l’un d’entre eux constate avec un rude bon sens paysan qu’un « monsieur » ayant les pieds aussi propres ne pouvait être que quelqu’un d’important ! La presse d’opposition, faisant aussitôt ses choux gras de sa mésaventure, décrivit Deschanel comme un irresponsable qui, publiait-elle, signait ses lettres officielles « Napoléon » ou « Vercingétorix » ! Mais la vérité était beaucoup moins amusante. Dans cette histoire, Deschanel avait tout simplement été victime d’une crise de somnambulisme ou d’un abus de médicaments, car, depuis qu’il était président de la République, il était surmené, épuisé et, pour tout dire, en pleine dépression.
    Après avoir démissionné de ses fonctions, il entra de son plein gré dans une maison de repos et recouvra rapidement la santé. Quelques mois après cet épisode tragi-comique, Deschanel fut élu sénateur, faisant mentir Clemenceau, qui avait déclaré à son propos : « Deschanel ? Il a un bel avenir derrière lui ! »
     
    Vercingétorix, les rois fainéants, le roi Dagobert, Charles VI, VII, IX, Louis XVI, le comte de Chambord, les généraux Junot et Malet, Deschanel… tous ces personnages historiques ont été évoqués dans ce chapitre pour avoir été traités de zhéros par le panel d’historiens consulté. Il me fallait donc me pencher sur leurs candidatures. Mais, ainsi que nous avons pu en juger et en exposer les différentes raisons, les protagonistes de ce « pot-pourri » ne sont pas de vrais zhéros au sens où nous l’entendons.
    L’ivraie, qui seule nous intéresse, ayant été triée du bon grain, nous pouvons désormais nous consacrer aux authentiques et incontestables « grands zhéros de l’histoire de France »,