Grands Zhéros de L'Histoire de France
léger » la responsabilité de la guerre. Enfin, répondant à l’académicien Maxime Du Camp s’inquiétant que cette guerre puisse être le signe de l’effondrement de la France, Ollivier répond : « Vous ne l’aimez pas, votre pays, vous ne savez pas l’aimer ; quand on l’aime, on le croit invincible ; invincible, il l’est, et c’est un crime d’en douter ; si vous l’aimiez comme je l’aime, vous seriez sûr de son triomphe. La Prusse est perdue ; nous n’avons qu’à étendre le bras pour saisir Berlin,… Non, jamais je n’admettrai que nos petits chasseurs, qui ont le pied cambré, que nos grands cuirassiers de Lorraine, que nos chapards d’Algérie et nos vétérans du Mexique soient vaincus par ces lourds Allemands gonflés de choucroute et de bière, lents à se mouvoir, pleurnichards et dont le pied plat est rebelle aux marches prolongées. »
Quelques mois plus tard, les « lourds Allemands gonflés de choucroute » en question camperont à Paris, contraindront la France à signer un armistice humiliant et récupéreront au passage l’Alsace-Lorraine ! Ollivier ne se relèvera pas de ses déclarations intempestives ; sa carrière politique prendra fin avec l’Empire, et son impopularité l’obligera même à quitter la France. Il passera l’essentiel de sa longue retraite (il n’a que quarante-cinq ans à la veille de la guerre et mourra en 1913) à écrire quatorze volumes sur l’Empire libéral, pour justifier son itinéraire politique. Il n’aurait pas dû se donner autant de mal, car nul ne se souvient plus aujourd’hui ni de ses déclarations, ni de son action à la tête du gouvernement, ni moins encore de son nom de famille !
Au moment même où le chef du gouvernement proférait ses âneries, le général Lebœuf, ministre de la Guerre, déclarait : « Nous sommes prêts, archi-prêts, nous avons huit jours d’avance sur la Prusse ; la lutte dût-elle durer deux ans, nous n’aurions pas un bouton de guêtre à acheter. » Il n’avait d’ailleurs pas tout à fait tort, car pendant le siège de la capitale par les Prussiens, les Parisiens affamés allaient acheter davantage de rats que de boutons de guêtre ! À la suite de cette harangue fracassante, il s’illustra encore en déclarant : « L’armée prussienne n’existe pas ! Je la nie ! »
Enfin que dire d’Eugène Chevandier de Valdrome, lui aussi ministre de l’Intérieur qui, à une semaine de la déclaration de guerre, s’exclamait devant la Chambre : « Ne nous précipitons pas tête baissée dans la paix ! » Cette seule phrase ne devrait-elle pas lui valoir de figurer dans le « top 10 » des nuls hexagonaux ? Eh bien, non, oublié, lui aussi !
Au milieu de tant d’arrogance et d’imbécillité, que fit Bazaine pour focaliser sur sa seule personne l’indignation nationale ? En fait, on lui reprocha non seulement de s’être enfermé dans Metz à un moment où il disposait d’un avantage sur les Allemands inférieurs en nombre, mais surtout d’avoir par la suite capitulé dans des conditions honteuses. Napoléon III n’en avait-il pas fait autant à Sedan ? Bien sûr que si, mais à l’annonce de la déchéance de l’Empire et de la proclamation de la République, il avait quitté, la France pour l’Angleterre avec armes et bagages (sans armes serait d’ailleurs plus conforme à la réalité !), de sorte qu’on ne pouvait plus se venger de lui, autrement que par journaux interposés. Restait François Achille Bazaine (1811-1888), commandant en chef de l’armée du Rhin. Celui-là, on l’avait sous la main et on ne le lâcherait pas !
Tout comme Grouchy, Bazaine entre dans la catégorie des zhéros qui commettent une énorme bourde qu’ils n’auront plus l’occasion de rattraper. Mais, avant la « boulette finale », Bazaine est l’un des officiers français les plus titrés et les plus admirés de son pays. Au moment de son procès, son avocat fera état de toutes les décorations et autres gratifications obtenues par son client sur les champs de bataille, un palmarès indéniablement éblouissant ! Au cours de ses quarante-deux années de service dans l’armée française, il a en effet combattu sur tous les terrains où la France se trouvait engagée et participé à près de soixante-dix campagnes entre l’Algérie, le Maroc, l’Espagne, l’Italie, la Crimée, et surtout au Mexique où il a succédé au commandant en chef du corps expéditionnaire français venu
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