Grands Zhéros de L'Histoire de France
épauler Maximilien, éphémère empereur du Mexique. Le nom de Bazaine est aujourd’hui encore tellement lié à la défaite de 1870 que l’on a du mal à en croire ses yeux lorsque l’on regarde sa carrière de plus près : non seulement il fut présent sur tous les points chauds du moment, mais il s’y illustra systématiquement : un vrai héros de A à Y !
Dès son entrée dans l’armée, Bazaine se fait remarquer, puisque ayant échoué au concours de Polytechnique, il s’engage comme simple soldat en 1830 et devient en trois ans à peine sergent, puis lieutenant. Décoré de la Légion d’honneur pour avoir été blessé au cours d’un combat en Algérie (1833), il est également cité pour son courage au moment de la reddition de la smalah d’Abd el-Kader en 1847. En quatorze ans seulement, il sera donc passé de simple « troufion » à maréchal de camp (1854). Et ce n’est pas fini : il s’illustre pendant la guerre de Crimée et obtient le cordon de commandeur de la Légion d’honneur. Devant le feu, il manifeste une vaillance et un courage irréprochables et sera blessé plusieurs fois : d’une balle dans le poignet à la Macta, en Algérie, d’une autre dans la jambe en Espagne, et il est aussi blessé en Crimée. Il a un premier cheval tué sous lui en Italie et un second à Solferino. Le nombre de chevaux tués « sous lui » est un bon indicateur du niveau d’héroïsme de l’officier de cavalerie : Napoléon I er estimait lui-même en avoir eu dix-huit ou dix-neuf. Ney en eut trois pour la seule bataille de Waterloo ! Le champion toutes catégories de la discipline est un certain Jacob Marulaz, général de division de l’Empire qui reçut dix-neuf blessures et eut vingt-six chevaux tués sous lui ! Quant à Grouchy, il semble qu’il en ait eu « seulement » trois : deux à la bataille de la Trebbia en Italie et un à la Moskova. Étonnez-vous après cela que ce « petit joueur » soit arrivé en retard à Waterloo !
Poursuivant sa carrière ascendante, Bazaine devient grand-croix de la Légion d’honneur et maréchal de France après la prise de Puebla au Mexique (1863). C’est d’ailleurs sans doute au Mexique qu’il commence à dérailler un peu. Il épouse en secondes noces une jeune Mexicaine de dix-sept ans à qui il va donner quatre enfants et qui n’aura de cesse de pousser son mari à comploter pour prendre la place de Maximilien comme empereur du Mexique. Les relations entre les deux hommes vont se tendre et Bazaine est rapatrié en France. Le rêve mexicain de Napoléon III tombe à l’eau. D’une certaine manière c’est une chance pour Bazaine, car les choses tournèrent très mal pour Maximilien, fusillé après quatre années de « règne », à l’âge de trente-cinq ans, par les troupes du général Juárez.
Cette allusion à l’aventure mexicaine de Napoléon III nous offre l’occasion d’ouvrir ici une parenthèse sur un curieux fait du hasard. En l’espace de vingt-cinq ans seulement, entre 1845 et 1870, vont avoir lieu trois des plus glorieuses défaites de l’armée française : Sidi-Brahim en Algérie, contre les troupes d’Abd el-Kader, Camerone au Mexique contre les troupes de Juárez, et Bazeilles où les troupes françaises livreront un combat héroïque contre les chasseurs bavarois pour protéger la retraite de l’armée vers Sedan.
À chaque fois, Bazaine se trouve dans les parages : il combat à Sidi-Kafir, à l’ouest de l’Algérie, pendant que se déroule, non loin de là, la bataille de Sidi-Brahim (21 septembre 1845), il assiège Puebla pendant la bataille de Camerone (30 avril 1863), et il est retranché dans Metz pendant celle de Bazeilles (31 août et 1 er septembre 1870).
Pourquoi mentionner ces trois batailles ? Pour nuancer ce que nous avons avancé dans la préface de ce livre, en affirmant que les Français supportaient mal l’évocation de leurs défaites. Cette réalité souffre en effet quelques exceptions précises : les défaites héroïques, ce que furent précisément Sidi-Brahim, Camerone et Bazeilles. Avec ces défaites, on n’est plus dans le refoulement mais bien au contraire dans l’exaltation. Prenons l’exemple de Camerone : il concerne Bazaine au premier chef, car celui-ci était en train d’assiéger Puebla lorsque la compagnie du capitaine Danjou, dont le rôle était d’assurer la sécurité d’un convoi de ravitaillement destiné aux troupes de Bazaine, fut contrainte de se
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