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Hasdrubal, les bûchers de Mégara

Hasdrubal, les bûchers de Mégara

Titel: Hasdrubal, les bûchers de Mégara Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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poignée de soldats et de
matelots car Scipion avait fait envoyer à terre leurs équipages et leurs
rameurs pour édifier sa digue. Nous l’ignorions, aussi nos amiraux se
contentèrent de croiser au large de la flotte adverse sans engager le combat.
Ce dernier eut lieu trois jours plus tard alors que Scipion avait eu le temps
de renvoyer ses hommes à bord de ses vaisseaux. Tout le peuple de Carthage
était monté sur les remparts pour observer la bataille et encourager nos
marins. A bord de leurs trirèmes et de leurs quinquérèmes, ils éperonnèrent et
coulèrent plusieurs dizaines de navires romains avant de regagner, à la nuit
tombée, le port, non sans difficulté. En effet, la brèche que nous avions
ouverte dans notre enceinte était relativement étroite et ne permettait que le
passage d’un seul navire. Les plus légers furent les premiers à s’y engager
cependant que les autres gagnaient la Taenia, cet ancien quai servant jadis au
débarquement des marchandises, pour y jeter l’ancre, la proue dirigée vers la
mer, attendant le moment propice pour regagner le cothôn.
    Je dois l’avouer,
ce succès inespéré nous plongea dans une telle joie que nous négligeâmes de
prendre les précautions les plus élémentaires. Toute la nuit, la foule se
répandit dans les rues pour célébrer notre victoire et les défenseurs de la
muraille se joignirent à elle pour danser et chanter. Ces maudits Fils de la
Louve en profitèrent pour s’installer à l’extrémité de la Taenia et y
acheminer, en silence, leurs machines de guerre et deux énormes béliers, qui,
au petit matin, commencèrent à entamer la muraille que nous avions construite
entre ce débarcadère et notre enceinte. Pour déloger les Romains, nous ne
pouvions faire appel à la flotte. A cet endroit, se trouvaient en effet des
fonds sur lesquels nos navires, alourdis par les catapultes qui y auraient été
embarqués, se seraient échoués. Une attaque terrestre ne pouvait être envisagée
en raison de l’étroitesse du quai. Nos hommes auraient été décimés par les
traits des archers avant d’atteindre leur objectif.
    Magon eut
alors une idée de génie. Il regroupa plusieurs milliers d’hommes, leur ordonna
de se dévêtir et de se jeter à la mer avec leurs seules armes et des torches
non allumées. Nos soldats avaient de l’eau jusqu’à mi-corps et glissèrent dans
l’obscurité le long du port marchand et de la Taenia, les uns marchant
péniblement, les autres nageant. Ainsi, ils s’approchèrent de l’emplacement des
machines de guerre de l’ennemi dont les défenseurs sommeillaient. Soudain, au
signal que donna Magon, des milliers d’hommes escaladèrent le rebord de la
Taenia et, allumant à la hâte les torches, incendièrent les catapultes et les
béliers, semant la panique dans les rangs de l’adversaire. Les légionnaires
refluèrent en désordre vers le camp du consul qui, réveillé, tenta de rétablir
un semblant d’ordre et dut même tuer de sa main certains fuyards pour redonner
aux autres l’envie de combattre. Pendant ce temps, Magon et ses hommes, après
avoir incendié jusqu’à la dernière baliste, regagnèrent notre ville par le même
chemin qu’à l’aller.
    Nous ne le
savions pas mais cette action d’éclat, digne de passer à la postérité, devait
être notre dernière victoire. Furieux du mauvais tour que nous lui avions joué,
Scipion Aemilianus entreprit de se venger en lançant pendant plusieurs jours
des contre-attaques continuelles qui nous contraignirent à évacuer nos
positions avancées et à perdre le contrôle de la Taenia. Il fit alors élever un
mur de brique d’une hauteur égale à celle de notre enceinte au sommet duquel il
plaça plus de quatre mille archers, rendant impossible toute sortie terrestre.
Et ses navires prirent position le long du débarcadère désormais étroitement
surveillé de jour comme de nuit. Nous étions dorénavant pris au piège :
Carthage était une cage aux portes hermétiquement closes même si, à intervalles
réguliers, des convois de navires marchands, chargés de grains, parvenaient à
forcer le blocus romain et à nous apporter l’approvisionnement dont nous avions
besoin.
    Un matin,
l’on me prévint que le camp romain était à moitié vide. Avec deux légions,
Scipion Aemilianus était parti en direction de Nepheris pour s’emparer de cette
base commandée par mon adjoint, Diogène, que je fis aussitôt prévenir du
danger. Toutefois,

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