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Haute-savane

Haute-savane

Titel: Haute-savane Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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cependant, il n’avait pas eu un regard d’affection, pas un mot d’amitié, se fût introduit au plus sensible de son cœur ? Le chagrin qu’il éprouvait n’avait rien de comparable aux peines d’amour. C’était quelque chose de plus fort et de plus grave : une douleur d’homme qui, pour Gilles, tournait la dernière page du temps de l’insouciante jeunesse. Il savait que jamais il ne pourrait oublier le petit sauvage aux yeux bleus qui n’avait pas accepté qu’il le gardât dans ses bras.
    Ce soir-là, quand les deux compagnons eurent rejoint leur campement de la nuit précédente et rallumé le feu dont les cendres étaient encore chaudes, ce fut sans rien se dire qu’ils mangèrent et se roulèrent dans leurs couvertures pour dormir. Il n’y avait, en effet, plus rien à dire…
    1 .  Beau Lac.
    2 .  Son père était un Blanc.
    3 .  Étoile calme.

CHAPITRE IV
    LES COLLINES DE HARLEM
    Quelques jours plus tard, le Gerfaut achevait, entre les mains de Gilles, sa descente de l’Hudson et approchait de New York. Sous son beaupré, esturgeons et marsouins bondissaient joyeusement tandis qu’au-dessus des mâts d’immenses vols de pigeons emplissaient le ciel d’un nuage gris et blanc.
    De nombreux petits bateaux à voiles larges et courtes que leurs panses rebondies apparentaient à des poules affairées descendaient le courant presque bord à bord avec le fin voilier, transportant les légumes, le lait et les œufs qui, le lendemain, rempliraient les estomacs new-yorkais. Ici et là, quelques sloops d’Albany louvoyaient chargés de bois de charpente ou de balles de fourrures. La plupart d’entre eux laissaient claquer, sous la douce brise de mai, un pavillon hollandais à la corne de son mât car, sur les quatre mille habitants dont se composait la petite ville en amont de New York, la grande majorité était faite de négociants hollandais retranchés là depuis plus d’un siècle, depuis que New Amsterdam était devenue New York et qu’un gouverneur anglais avait remplacé le fameux Peter Stuyvesant, l’homme à la jambe de bois.
    La guerre récente n’ayant laissé que des traces vite effacées, le paysage était ravissant. Sauf aux endroits où se dressaient la muraille de grès rouge des Palisades et les pentes rocheuses des Highlands, les rives du grand fleuve étaient couvertes de fermes pimpantes entourées de champs de blé vert et de vastes vergers encore bien fleuris dont le parfum embaumait cette belle fin de journée ensoleillée.
    — Par la barbe du Prophète, monsieur le chevalier, vous voilà devenu un excellent pilote ! apprécia le capitaine Malavoine tandis que le joli bateau, après avoir doublé la pointe de Manhattan et remonté quelque peu l’East River, venait de se ranger devant la Old Slip avec une parfaite aisance. Bientôt vous n’aurez plus besoin de moi, ajouta-t-il avec une pointe de mélancolie.
    — Un bon timonier est une chose, un bon capitaine en est une autre. Même si l’on a vu le jour les pieds dedans, on n’apprend pas la mer en quelques semaines, mon cher ami. Ce navire est votre navire autant que le mien et, lorsque je serai devenu planteur, vous aurez de nombreux voyages à faire pour moi. À moins que vous ne soyez las de guider le Gerfaut…
    — C’est le meilleur bateau que j’aie jamais eu entre les mains. Marchez, monsieur le chevalier, s’il ne tient qu’à moi, je mourrai sur la dunette.
    — J’espère pour ma part qu’avant d’en venir à cette extrémité, vous y aurez fait fortune à mon service. À présent, je vais à terre. Faites donner double ration de rhum à l’équipage et envoyez-en une partie se dégourdir les jambes.
    Laissant Tim veiller au déchargement de quelques ballots de fourrures qu’il avait récupérés, à Albany, chez son ami le négociant écossais John Askin, Gilles descendit en trois pas la planche de coupée et se retrouva sur le port. Le temps était si doux qu’il eut envie de marcher un peu avant de héler une voiture pour se faire conduire à Mount Morris.
    L’activité du port de New York semblait se développer de jour en jour. Les bateaux y étaient nombreux : certains à l’ancre dans le port, d’autres amarrés à quai comme le Gerfaut lui-même. Leurs mâts, les drisses tendues de leur gréement, les vergues portant leurs voiles serrées se détachaient sur le bleu du ciel. Des mouettes tournoyaient par-dessus, guettant la nourriture qui pouvait tomber des navires. Des

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