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Haute-Ville, Basse-Ville

Titel: Haute-Ville, Basse-Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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Elise.
    —    Ils ont dû gouverner en faisant très attention aux attentes du Parti progressiste qui a remporté l'Ouest au dernier scrutin. En fait, les libéraux n'avaient pas une majorité absolue en 1921, il leur manquait un siège. Ils ont promis des mesures sociales, sans les adopter. En les promettant, ils ont effrayé les conservateurs ; en ne les adoptant pas, ils ont frustré les progressistes.
    Le premier ministre s'arrêta sur ce constat un peu pessimiste. Son hôte, Trudel, enchaîna :
    —    Cette fois encore, les libéraux devraient remporter au Québec. On ne peut jurer de rien pour les autres provinces.
    L'homme préféra éviter soigneusement le sujet des scandales politiques.
    —    Quant aux indélicatesses auxquelles vous faites allusion, intervint encore Descôteaux, il est difficile d'évaluer leur effet. Elles peuvent sûrement faire perdre des votes.
    —    Il y a sans doute eu spéculation sur les terrains de la centrale électrique de Beauharnois, remarqua encore Renaud. L'Evénement n'est pas très clair à ce sujet.
    Ces questions irritaient ses hôtes. L'invité fit mine de ne pas le saisir.
    —    Oui, puis les contrats n'ont pas été accordés dans le respect de certaines règles, les travaux ont été payés trop cher, expliqua encore le premier ministre.
    Le politicien ne voyait pas de raison de nier les scandales collant aux libéraux fédéraux. Cela permettait de rappeler discrètement la prudence à ceux qui, autour de la table, pâlissaient depuis un moment.
    —    L'autre reproche concerne la contrebande d'alcool, intervint à son tour Armand Bégin. C'est plutôt trivial, mais cela risque de faire perdre plus de votes que cette histoire de Beauharnois.
    —    Trivial peut-être, mais spectaculaire, précisa Élise. Un ministre possède une ferme qui chevauche la frontière américaine. Des camions arrivent à cette ferme chargés de caisses d'alcool et repartent vides. Cela donne à la population l'impression d'un certain mépris de la loi chez les personnes haut placées.
    —    Monsieur King, avec sa moralité toute protestante, va faire en sorte que des choses comme cela ne se répètent pas. Il termine son premier mandat, il a encore à apprendre pour tenir en main toutes les ficelles, commenta le premier ministre.
    Au début de son second mandat, ce dernier apprenait de la plus mauvaise façon à couvrir les scandales.
    —    De toute façon, cette question de la prohibition devient ridicule, pesta Armand Bégin. Par exemple, en Ontario, la loi permet de prescrire de l'alcool comme médicament. Là-bas, on a poursuivi des médecins qui faisaient des centaines de prescriptions d'alcool tous les jours et en vendaient. Ils seraient mieux de permettre aux gens d'acheter de l'alcool dans une Commission comme la nôtre, au lieu de les obliger à faire la queue dans des pharmacies.
    Cette pièce de philosophie politique de la part de l'ami de la famille Trudel constituait un hommage à la sagesse de Descôteaux. Le politicien avait décidé en 1921 que si ses concitoyens ne pouvaient se passer de la bouteille, au moins leur vice remplirait les caisses de l'État. Le premier ministre répondit d'un sourire au marchand, puis s'adressa au nouveau venu dans ce petit cénacle :
    —    Monsieur Daigle, j'espère que Lapointe pourra compter sur votre support actif, pendant cette campagne. Même si sa réélection n'est pas compromise, il convient tout de même que le Parti présente un front uni de tous ses membres.
    Comment refuser une invitation de ce genre venue de l'homme qui lui versait de généreux honoraires depuis peu ?
    —    Ce sera avec le plus grand plaisir. Comme je ne suis pas très familier avec les affaires politiques canadiennes, je crains cependant d'être d'une piètre utilité, fit-il en rougissant.
    —    Vous avez près de vous une personne capable de compléter vos connaissances. Elle pourra même vous confier quelques tâches à la mesure de vos compétences, précisa Descôteaux. Je vous confie à ses bons soins.
    Cette personne à côté de lui, c'était bien sûr Elise. La conversation avec elle prit une tournure moins personnelle. Un peu intrigué, Renaud lui dit :
    —    Je me vois mal sur les hustings en train de parler de Constitution.
    —    Ce ne serait peut-être pas sans intérêt. King est en train de donner discrètement au Canada une indépendance totale face à la Grande-Bretagne.
    Elle

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