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Haute-Ville, Basse-Ville

Titel: Haute-Ville, Basse-Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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témoignait seulement de la sûreté de son instinct de femme passionnée. À ce moment précis, il décida de l'épouser pour toutes sortes de raisons, des bonnes et des mauvaises. Blanche resterait entre eux. Il s'agirait d'un fantôme assez sympathique, la plupart du temps. Elle serait la preuve qu'il pouvait avoir une confiance absolue en elle, la preuve qu'elle ne le condamnerait jamais, quoi qu'il fasse.

Chapitre 17
    Daigle demeurait fort troublé. Ce développement lui semblait ridicule. Henri ne violait pas les jeunes filles au physique ingrat. Cet héritier de la Haute-Ville voyait de très jolies personnes tomber dans ses bras: elles venaient toutes seules à lui. D'un autre côté, Gauthier n'avait pas menti sur cette histoire de carnet bancaire au moment de mourir. Très lucide dans cet instant pénible, ses paroles ne tenaient pas du délire d'un agonisant. L'avocat inclinait à croire l'explication du chef Ryan donnée à l'enquête on discovery. Ce bellâtre avait perdu ce document, soit à cause d'un vol ou autrement. Il s'était retrouvé sur les lieux de la découverte du cadavre par un hasard mystérieux.
    Cette conviction se trouva renforcée par l'allure satisfaite d'Henri le second mercredi de janvier. Helen était arrivée à ses fins, le professeur n'en doutait pas. L'étudiant présentait la mine d'un homme à qui la vie venait d'apporter une heureuse surprise. Son amabilité avec tout le monde, y compris les étudiants conservateurs, sans une pointe d'ironie dans la voix, tranchait avec son attitude des derniers mois. Renaud pouvait bien lui en vouloir justement à ce sujet, cependant ses succès avec la belle Irlandaise n'en faisaient pas un violeur.
    En fait, la seule histoire du carnet de banque ne l'aurait pas troublé autant, tellement sa culpabilité lui semblait improbable. Sa conversation avec l'abbé Pelletier le hantait aussi. A la fin de son cours, Jean-Jacques Marceau était resté patiemment à l'écart en attendant que la salle se vide, puis il s'était approché pour lui dire :
    —    Merci pour avoir parlé au vicaire.
    —    Il vous l'a dit?
    —    Vous étiez à peine sorti du presbytère que notre gentil curé sautait sur le téléphone. Il m'a menacé de l'enfer, puis m'a supplié de me taire, successivement. Comme vous le disiez dans votre missive, ce ne serait pas un bon témoin pour ma cause.
    —    Qu'allez-vous faire maintenant? demanda Renaud.
    Cet étudiant pouvait ameuter l'opinion publique. Les retombées affecteraient de multiples personnes, y compris le professeur imprudemment engagé dans cette histoire.
    —    Rien du tout. Cela ne donnerait rien, vous m'en avez convaincu, finalement. Surtout, je ferais un tort considérable à ma mère, sans rien obtenir en retour.
    —    Vous avez continué de voir l'abbé Pelletier jusqu'à tout récemment, d'après ce que j'ai compris.
    Marceau saisit cette allusion à la chorale. Il demeura songeur un moment.
    —    Oui, finit-il par dire d'un ton assez léger, je pourrais vous dire que nous avons des intérêts artistiques communs. Cependant, dans les faits, nous avons maintenu des rapports plus intimes pendant des années. Quand le jeune abbé Pierre Pelletier fait des sermons sur la chasteté du haut de la chaire, j'espère qu'il rougit un peu.
    L'étudiant s'en alla là-dessus. Renaud demeura un moment seul dans le grand amphithéâtre. En convenir l'embêtait, mais Raoul Richard avait eu raison sur deux points. D'abord, il y avait bien une pièce à conviction reliant une personne en vue de la Haute-Ville à Blanche Girard, même s'il ne s'agissait pas du fils du premier citoyen de Québec. La police n'avait guère traité Henri en suspect; elle aurait dû. Ensuite, l'imprimeur avait mis le doigt sur «Julie». Le lien entre Blanche et des suspects de la Haute-Ville, c'était Jean-Jacques Marceau. Si une personne avait été capable de la convaincre de le suivre jusqu'au Club des vampires, c'était bien lui : elle le voyait toutes les semaines à la chorale. Cependant, quel était l'intérêt de Marceau dans l'affaire? Sûrement pas un désir sexuel pressant.
    Finalement, Renaud ramassa ses papiers en secouant la tête. Tout cela n'avait pas de sens. Si Lavigerie avait connu ces faits, il serait parti en croisade, puisque l'avocat conservateur avait la réputation d'être un dangereux agitateur peu soucieux de briser des réputations injustement, si cela pouvait servir ses intérêts

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