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Haute-Ville, Basse-Ville

Titel: Haute-Ville, Basse-Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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arriver rarement.
    Sa nouvelle piste devenait une idée fixe, au point de l'aveugler. Les trois frères Germain occupaient complètement son esprit. Ils violaient leur propre sœur, fut-elle une sœur adoptive ! Le détective en oubliait tout le reste, investi d'une nouvelle mission, celle de rendre justice à cette pauvre fille. Cette obsession avait effacé ses premiers soupçons.
    Le lieutenant tourna les talons et regagna le poste de police, songeur. Le truand possédait bien un alibi. Bien sûr, l'enlèvement de la jeune fille pouvait avoir été perpétré par les deux autres frères : comme le meurtre n'avait pas eu lieu ce jour-là, cela n'innocentait en rien Ovide de ce crime.
    Malgré ce constat, ce fut complètement déprimé qu'il regagna son bureau du poste de police.
    En rentrant chez lui, Daigle se reprocha ses dernières paroles à la jeune femme. Elle allait s'attendre à ce qu'il la relance. S'il n'en avait pas l'intention, c'était indélicat de sa part de le laisser entendre. Mais le souhaitait-il ?
    On était encore à une époque où l'on ne croyait pas nécessaire de pouvoir compter les côtes d'une femme sous sa paume pour la trouver belle. Cette Germaine avait les courbes généreuses, sans doute fermes, susceptibles de faire rêver la majorité des hommes de la ville. Elle n'était pas sans esprit non plus. La pente abrupte entre eux était-elle si déterminante ?
    Il n'eut pas le temps de répondre à sa propre question. Quand il entra dans son appartement, le téléphone sonnait. Il courut décrocher le combiné.
    —    Renaud, fit une voix forte. Toujours libre pour cette fin de semaine, j'espère? Tu es invité chez Antoine Trudel, le ministre de la Voirie. C'est la voie la plus directe vers l'oreille du premier ministre. Cela va sûrement t'aider.
    Renaud devait éloigner le récepteur de son oreille pour protéger son tympan. Comme tous les vieux lents à s'habituer aux nouvelles technologies, Armand Bégin parlait à tue-tête à l'autre bout du fil, comme si sa voix elle-même devait se rendre à lui, et non l'impulsion électrique. Le jeune homme ne sut pas trop quoi répondre d'abord, puis l'image de sa coûteuse voiture et de sa faible rémunération à l'université le décida à considérer l'invitation comme une bonne nouvelle: il avait besoin de ces contacts.
    —    Quand, en fin de semaine ?
    —    Ils t'attendent samedi dans l'après-midi pour savoir un peu qui tu es, et ensuite pour le souper. Ils sont à leur maison de La Malbaie. Madame Trudel m'a bien affirmé que tu seras tout à fait bienvenu si tu veux coucher là. Ils avaient une haute opinion de ton père, et ils veulent te connaître.
    Le gros mensonge passa inaperçu. Bégin préféra ne pas admettre leur avoir un peu forcé la main.
    —    Non, je ne veux pas m'imposer. Je passerai me présenter en après-midi, puis j'irai souper. Mais j'entends réserver une chambre au Manoir Richelieu.
    —    Tu ne dérangerais pas, j'en suis certain, car ils ont une grande maison... Fais à ta guise. Il y aura aussi d'autres personnes intéressantes. Nous nous reverrons samedi, j'ai aussi une maison là-bas.
    —    A bientôt donc, et merci, fit Renaud en mettant le plus d'enthousiasme possible dans sa voix.
    Il ne savait trop s'il devait se réjouir: se préparer une nouvelle carrière lui donnait un peu le trac.

Chapitre 7
    Le climat demeurait au beau fixe. Les pessimistes avaient commencé à prédire qu'il faudrait payer cette générosité du ciel avec un hiver épouvantable. Trois longues semaines de-beau temps, cela semblait presque incroyable.
    Le samedi 17 juillet, Daigle se préparait à sa première rencontre avec les grands du monde canadien-français. Il connaissait bien le chemin: pendant toute sa jeunesse, il avait fait le trajet vers les villages de Charlevoix avec ses parents. Après avoir gagné la Basse-Ville, le jeune homme passa la rivière Saint-Charles, pour rejoindre le chemin de la Canardière. De là, il n'avait plus qu'à se diriger vers l'est: il allait passer à Beauport, Montmorency, Château-Richer. Tout lui semblait neuf, sauf quelques repères dont le souvenir était resté vivace: l'énorme hôpital psychiatrique de Beauport, presque un village en lui-même, l'usine de textile de Montmorency, la chute du même nom, l'île d'Orléans sur sa droite, Sainte-Anne-de-Beaupré, un lieu de pèlerinage achalandé.
    Ensuite, c'était la vraie campagne. La route se fit un peu

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