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Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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Seule Flora le sait… depuis toujours. J’aime Guillaume de toute ma raison, mais…
     
    – Bien sûr, bien sûr, interrompit Martin, qui ne supportait pas de voir et d’entendre Charlotte s’humilier et peut-être mentir encore.
     
    Un lourd silence succéda à cette scène. Comme elle se levait pour aller prendre un mouchoir dans la commode, Martin admira ce corps superbe, révélé par les transparences du déshabillé. Un corps rassasié d’amour sans doute, pensa-t-il, amer. Elle revint s’asseoir sur le lit, l’œil sec et le ton mieux assuré.
     
    – Donc, tu ne diras rien… à qui que ce soit, de ce que tu as vu ?
     
    – Rien. La seule chose qui pourrait me conduire à une extrémité que je ne veux pas envisager serait que tu m’enlèves Axel. Maintenant que je sais qu’il n’est pas de Guillaume, il est un peu plus à moi. J’en ferai un être exceptionnel, dont les Métaz pourront être fiers !
     
    Charlotte se tut, baissant les yeux et triturant son mouchoir. Martin l’observa un moment en silence puis reprit :
     
    – Cependant, un jour, Axel découvrira la vérité sur sa naissance, malgré toutes les précautions que tu pourras prendre, surtout si tu aimes cet homme et si tu le revois périodiquement. Un hasard a voulu que j’évente ton secret, un nouveau hasard peut le révéler à d’autres. C’est pourquoi je pense que tu devras un jour la vérité à Axel. Lui aussi saura garder le secret, si tu le lui demandes, car il aime Guillaume comme on aime un père… naturel.
     
    – Jamais, jamais, jamais ! Une telle révélation ne sortira jamais de ma bouche… J’aimerais mieux me jeter dans le lac avec une pierre au cou… Il faut aussi penser à Guillaume… justement !
     
    – Il te faudra d’abord penser à Axel, car, s’il tient la vérité par quelqu’un d’autre que toi, il te détestera, en voudra à tous ceux qui savaient, de l’avoir trompé.
     
    – Pourquoi me reprocherait-il cette attitude ? Qui est le vrai père d’un enfant ? Celui qui, dans un emballement des sens, féconde une femme, ou celui qui, patiemment, l’élève, le fait instruire, s’inquiète quand il est malade, l’aime chaque jour, en un mot ?
     
    – Il te le reprochera parce que tu auras passé ta vie à lui cacher sa véritable origine. N’est-ce pas plus flatteur pour un garçon de notre temps d’avoir pour géniteur un général glorieux qu’un négociant vaudois âpre au gain, fût-il riche, honnête et… intelligent ! Enfin, je me demande si je ne devrais pas remplacer intelligent par matois !
     
    – Je t’en prie, Martin…, ne te moque pas de Guillaume. Tu oublies qu’il est, lui, le père de ma fille…
     
    – On ne peut en effet l’oublier. Blandine lui ressemble beaucoup. Quand elle voit de l’or, elle gazouille comme un moineau à qui l’on jette du grain… et puis elle n’a pas les yeux vairons…, elle !
     
    Charlotte quitta le bord du lit et fit quelques pas dans la chambre, maintenant inondée de soleil.
     
    – C’est en voyant les yeux de Blai… du général Fontsalte que tu as compris, bien sûr, qu’il est le père d’Axel, n’est-ce pas ?
     
    – À la réflexion, cette découverte m’a si peu étonné que je crois plutôt qu’elle fut la confirmation d’une pensée inconsciente, non formulée. Considère la stature, la démarche, l’aisance, l’assurance, la distinction d’Axel. A-t-il quelque chose de Guillaume ? A-t-il l’air d’un rustre du pays d’En-Haut, descendu en ville et enrichi dans le négoce ? Non, Charlotte. Axel sent l’aristocrate à vingt pas, non seulement par son physique, mais dans sa façon de voir les choses, de les sentir, de les exprimer et de s’enthousiasmer. Et ses cheveux frisés, hein, sont-ils des Métaz ou des Rudmeyer ? C’est la toison de l’Arverne ou du Ségusiave, celle d’un descendant des soudards fiers et rieurs, rudes aventuriers, guerriers impitoyables… qui furent d’ailleurs les meilleurs alliés des Helvètes et firent de beaux enfants à leurs femmes. En somme, tu n’as fait que continuer une tradition historique qui remonte à Orgétorix !
     
    – Tais-toi, Martin. Tu me rends malade. Tu as longtemps dit que tu m’aimais…
     
    – C’est vrai, je t’ai aimée… et depuis l’enfance, Charlotte. Je rêvais de toi avant même de savoir ce qu’est un rêve et, en grandissant, quand nous nous voyions tous les jours, je me disais que nous

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