Helvétie
cliente qui avait la bonne main si généreuse ! Le cocher fit un bref arrêt devant Rive-Reine, pour embarquer Axel Métaz, Martin Chantenoz et leurs bagages.
Après les derniers adieux et souhaits de bon voyage, le coupé, tiré par quatre chevaux, s’engagea au trot dans la rue du Sauveur, traversa la place du Marché et prit la route de Lausanne. L’horloge de la Grenette sonnait neuf heures et le soleil, si avare de ses rayons pendant toute l’année 1816, laquait les monts enneigés d’une blancheur aveuglante. Dans la voiture, les deux hommes, assis à contresens, faisaient face à Eliza et à Janet. Des chaufferettes, placées entre les pieds des voyageurs, et les plaids, étalés sur les genoux des femmes, autorisaient, pour Axel et Eliza, des frôlements et des pressions complices.
– Où avez-vous placé l’urne contenant les viscères de cette chère Margaret Beckford ? risqua Chantenoz, pour rappeler, par courtoisie, la raison primordiale du séjour de lady Moore à Vevey.
– Nulle part, cher monsieur. L’urne n’a pas été retrouvée 13 . Le cœur de Margaret est, semble-t-il, égaré ! C’est triste, pour une morte, de perdre son cœur, n’est-ce pas ?
– Certains êtres le perdent de leur vivant, madame, dit Martin Chantenoz, avec un tendre regard de myope pour la jolie Janet qui souriait aux anges.
1 La haute et petite noblesse.
2 Document extrait des Manuaux du Conseil de La Tour-de-Peilz et cité par L. Seylaz dans la Gazette de Lausanne , 28 août 1932, puis par Silvio Corsini dans le catalogue de l’exposition Un calife à Lausanne , organisée du 10 décembre 1987 au 30 janvier 1988, à l’université de Lausanne.
3 Le futur Napoléon III.
4 Mais avez-vous… une bonne vue ?
5 Je n’ai d’yeux que pour vous !
6 La villa Diodati est toujours restée une demeure privée. Elle a été habitée par le peintre Balthus en 1945-1946. Le 19 juin 1991, l’auteur avait néanmoins pu visiter cette chambre. La propriétaire de l’époque conservait encore, intacts, avec un grand respect pour la mémoire de Byron, le décor de la chambre du poète, sa table de travail et les objets utilisés pendant son séjour de 1816. Les 30 septembre et 1 er octobre 1996, lors de la succession de la propriétaire, les collections de la villa et notamment le mobilier, les tableaux et objets qui se trouvaient dans la chambre de Byron ont été dispersés, lors d’une vente aux enchères, organisée par Christie’s. La villa a été vendue et les acquéreurs ont entièrement refait la décoration de toutes les pièces.
7 Lord Byron écrivit effectivement à Diodati Sonnet to Lake Leman , qui figure dans ses œuvres complètes.
8 La chaussure de Claire Clairmont fut conservée de longues années à la mairie de Cologny.
9 Aujourd’hui hôtel d’Angleterre. Une plaque, apposée sur la façade, rappelle le séjour du poète, du 28 au 30 juin 1816. C’est là que Byron écrivit, en une nuit, dit-on, son fameux poème le Prisonnier de Chillon.
10 Lettre de Byron à John Cam Hobhouse, lord Broughton of Gyfford, 23 juin 1816, Correspondance de lord Byron, publiée par John Murray , librairie Plon, Paris, 1928.
11 Un peu plus tard, après le départ de Byron pour Milan, le propriétaire de la villa Diodati, visitant sa demeure, s’enquit auprès de son majordome de ce qu’étaient devenues les pages de brouillon que Byron abandonnait dans toutes les pièces et qui pouvaient constituer pour les admirateurs du poète de précieux autographes. Il s’entendit répondre par son majordome : « Je mentirais à Monsieur si je ne lui disais pas qu’on a mis au moins deux jours à brûler toutes ces paperasses. » D’après Causeries d’un octogénaire genevois , Vernes-Prescott, Genève, 1883. Cité par Paul Naville, Cologny , ouvrage édité avec l’appui de la commune de Cologny, Genève, 1981.
12 La rumeur de ce mariage courait depuis longtemps. En réalité, Germaine de Staël et John Rocca ne se marièrent, secrètement, à Coppet, que le 10 octobre 1816.
13 L’auteur a vainement tenté de retrouver cette urne dans les cimetières de La Tour-de-Peilz et Vevey. Les archives locales ne conservent aucune trace de l’éventuelle décharge qu’aurait pu signer un mandataire de la famille.
7.
Lady Elizabeth décida d’éviter Paris « où il faut s’arrêter un mois ou pas du tout »,
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