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Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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Blanchod.
     
    Le huguenot, venant au secours de M lle  Baldini, ne laissait pas pour autant passer l’occasion d’égratigner le clergé catholique et les papistes.
     
    – S’il est devenu garde-magasin en 1793, ce fut uniquement pour sauver sa peau, et il n’est pas commissaire des Guerres comme certains veulent le faire croire. C’est un homme pieux. Un jour, il sera évêque, vous verrez, rectifia Blaise.
     
    – Pourquoi pas cardinal ! s’écria Flora.
     
    – Oh ! il y en eut de pires, demandez un peu, pour voir, à Julien Mandoz, le beau-frère de Flora. Les gardes pontificaux sont sans illusions. Il s’en passe de belles, au Vatican ! renchérit Blanchod en adressant un clin d’œil à la jeune femme.
     
    La discussion aurait pu durer une partie de la nuit et Blaise de Fontsalte choisit de conclure en faisant observer qu’il devait se mettre en selle tôt le lendemain. Il salua la compagnie et s’apprêtait à prendre congé de l’hôtesse quand celle-ci, jetant un châle sur ses épaules, manifesta l’intention de l’accompagner.
     
    – Jusqu’au bout de la terrasse, précisa-t-elle.
     
    La lanterne que Blaise avait déposée sur le seuil avant d’entrer dans le salon s’était éteinte, mais la lune, suspendue dans un ciel nettoyé de nuages et parsemé d’étoiles, répandait assez de clarté pour que l’on pût distinguer les obstacles. Il offrit son bras à M me  Métaz, qui le prit sans façon. Il sentit l’index de la jeune femme suivre le contour d’un galon.
     
    – Est-ce vraiment de l’or ? demanda-t-elle d’un ton enjoué.
     
    – Certes ! De l’or pris dans les coffres des aristocrates guillotinés ! C’est ce que penserait votre amie Flora, dit Blaise en riant.
     
    L’officier eut la sensation que la jeune femme pesait sur son avant-bras, bien qu’elle se fût immobilisée près de la fontaine comme si elle tenait, par bienséance, à rester en vue de ses amis qui se trouvaient encore dans le salon.
     
    – Il ne faut pas tenir rigueur à Flora de sa véhémence. Elle est malheureuse et a ses raisons de détester vos révolutionnaires. Vous ne pouviez pas savoir, bien sûr, que son fiancé, Pierre Mandoz, du régiment des Gardes-Suisses de Louis XVI, a été massacré, comme six cents autres Suisses, le 10 août 1792, en défendant le palais des Tuileries 5 . Le frère de Pierre, Julien Mandoz, qui échappa à la tuerie et épousa plus tard la sœur de Flora avant d’entrer dans la Garde pontificale, a rapporté d’horribles scènes. Il a vu quatre de ses camarades coupés en morceaux dans la chambre de la reine par des sans-culottes ivres de haine. Ces déments égorgeaient, éventraient, saignaient, défenestraient tous ceux dont ils se saisissaient. Julien nous a même raconté en pleurant, et cependant c’est un homme dur à la peine, qu’il a vu des marmitons innocents jetés vivants dans des chaudrons d’eau bouillante !
     
    – Je sais cela, et bien d’autres choses, dont nous devons avoir honte, mais le général Bonaparte a clairement désapprouvé les excès de la vile canaille, dit doucement Blaise en posant la main sur celle de Charlotte.
     
    – Peut-être a-t-il désapprouvé plus tard, capitaine, mais Julien nous a assuré que Bonaparte se trouvait dans le jardin du palais pendant le massacre des Suisses. Au lieu de s’interposer, le général a quitté Paris pour Saint-Cyr, où se trouvait sa sœur Élisa qu’il conduisit en Corse !
     
    – C’est exact. Il craignait pour elle, reconnut Fontsalte.
     
    – Pourquoi, mais pourquoi, alors, avoir laissé tuer tant de gens !
     
    – La plèbe déchaînée est incontrôlable, madame. Me croirez-vous si je vous dis que mon père et tous les siens auraient été assassinés par les révolutionnaires de Montbrison si de braves gens ne nous avaient cachés ? Et, cependant, mon père était un héros de la liberté ! Nous n’avions qu’un seul tort, celui d’appartenir à une pauvre noblesse de campagne et d’habiter un château à demi ruiné !
     
    – Et vous êtes officier au service d’un régime entaché du sang des justes, monsieur !
     
    – Un jour, peut-être aurons-nous le temps, madame, de parler de ces choses. Pour l’instant, il est tard, vos amis peuvent s’impatienter… et, sous ce clair de lune romantique, je serais plus enclin à parler d’amour que de haine.
     
    – Alors adieu, monsieur, dit-elle en quittant son bras et en

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