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HHhH

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Titel: HHhH Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Laurent Binet
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Müller »,
est un ancien social-démocrate, ce qui ne l’empêchera pas d’être considéré
comme l’un des plus féroces instruments du régime. Les autres bureaux du RSHA
sont confiés à des intellectuels brillants, des jeunes comme Schellenberg (SD
extérieur) et Ohlendorf (SD intérieur) ou des universitaires chevronnés comme
Six (Documentation et conception du monde), ce qui là encore tranche avec la
cohorte d’illettrés, d’illuminés et de dégénérés mentaux qui peuplent les
sommets du parti.
    Une sous-branche de la Gestapo,
sans rapport avec son importance réelle, mais il vaut toujours mieux rester
discret avec les sujets sensibles, est consacrée aux Affaires juives. Pour la
diriger, Heydrich sait déjà qui il veut : ce petit Hauptsturmführer
autrichien qui fait du si bon travail, Adolf Eichmann, est tout indiqué. Il
travaille en ce moment sur un dossier tout à fait original : le projet
Madagascar. L’idée est de déporter tous les Juifs là-bas. À creuser. Il faut
d’abord vaincre l’Angleterre, sans quoi l’acheminement des Juifs sera
impossible par mer, et ensuite on verra.
98
    Hitler a décidé l’invasion de
l’Angleterre. Mais pour réussir un débarquement sur les côtes britanniques,
l’Allemagne a d’abord besoin de s’assurer la maîtrise des airs. Or, en dépit
des promesses du gros Göring, les Spitfire et les Hurricane de la RAF
continuent à danser au-dessus de la Manche. Jour après jour, nuit après nuit,
les héroïques pilotes anglais repoussent les attaques des bombardiers et des
chasseurs allemands. Prévue pour le 11 septembre 1940, l’opération
« Otarie » (nom de code donné au projet d’invasion dont la tonalité
burlesque provient de la traduction française car en allemand c’est « lion
de mer ») est reportée une première fois au 14, puis au 17. Mais le
17 septembre, un rapport de la Kriegsmarine indique :
« L’aviation ennemie n’est toujours pas battue, en aucune façon. Au
contraire, elle montre une activité croissante. Dans l’ensemble, les conditions
atmosphériques ne nous permettent pas d’espérer une période de calme. » Le
Führer décide donc de retarder « Otarie » sine die.
    Ce même jour, pourtant,
Heydrich, chargé par Göring d’organiser répression et épuration sitôt que
l’invasion sera commencée, donne ses consignes à l’un de ses collaborateurs, le
Standartenführer Franck Six, ancien doyen de la faculté économique de
l’Université de Berlin, reconverti dans le SD. C’est lui qu’il a choisi pour
s’installer à Londres et commander aux Einsatzgruppen qu’il a mis sur pied tout
spécialement : six petites unités qui seront basées à Londres, Bristol,
Birmingham, Liverpool, Manchester et Edimbourg, ou Glasgow si jamais le pont du
Firth of Forth est détruit entre-temps. « Votre tâche, lui dit Heydrich,
est de combattre, avec les moyens requis, toutes les organisations,
institutions et groupes d’opposition. » Concrètement, le travail de ces
Einsatzgruppen sera le même qu’en Pologne, le même que plus tard en
Russie : ce sont toujours des « unités mobiles de tuerie »
chargées d’exterminer à tour de bras.
    Mais ici, la mission se
complique avec la Sonderfahndungliste GB , la liste spéciale de
recherches pour la Grande-Bretagne, qu’Heydrich remet à Six. Il s’agit d’une
liste de quelque 2 300 personnalités qu’il faudra trouver, arrêter et
livrer à la Gestapo le plus vite possible. En tête de liste, on trouve, sans
surprise, Churchill. Avec lui, d’autres hommes politiques, anglais ou
étrangers, et notamment Beneš et Masaryk, les représentants du gouvernement
tchécoslovaque en exil. Jusque-là, c’est logique. Mais apparaissent également
des écrivains tels que H.G. Wells, Virginia Woolf, Aldous Huxley, Rebecca
West… Freud y figure, bien que mort en 1939… Et aussi Baden-Powell, l’inventeur
des scouts. Rétrospectivement, l’exécution des petits scouts en Pologne est
plus qu’un excès de zèle, c’est une faute puisque les scouts sont considérés
comme des sources d’information potentielles de tout premier ordre pour les
services secrets allemands. Au total, tous ces noms forment un ensemble assez
baroque. Il paraît que ce n’est pas Heydrich, mais Schellenberg qui a dressé la
liste. C’est sans doute parce que celui-ci était très occupé à préparer à
Lisbonne l’enlèvement du duc de Windsor que le travail semble avoir été

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