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Hiéroglyphes

Titel: Hiéroglyphes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: William Dietrich
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jadis.
Je l’imitai, ainsi que Mohammed. D’autres balles
ricochaient sur notre couvert précaire.
    « Restez
pliés en deux, et tout droit jusqu’à ce qu’on
soit sous la protection des canons anglais. Astiza, passe devant.
Montre bien ton écharpe. »
    Elle
avait eu la présence d’esprit de ne pas la lâcher
quand nos chevaux s’étaient cassé les pattes.
Mais elle me la tendit.
    « C’est
toi qu’ils connaissent. Vas-y. Je te suis aussi vite que je
peux.
    —  Je
resterai avec elle », promit Mohammed.
    Au-dessous
de nous, tout le camp français était en effervescence.
Silano avait dû se montrer fort éloquent car il était
là, braquant un mousquet. Et, sauf erreur de ma part, Najac
rechargeait mon long rifle.
    Pas
le temps de tergiverser. Je courus dans la conduite désaffectée
dont les parois hautes de moins d’un mètre n’arrêtaient
qu’une partie des balles. Astiza et Mohammed me suivaient,
pliés en deux. Heureusement que ces mousquets, neuf fois sur
dix, n’auraient pas touché une vache dans un couloir !
Mais, dans les tranchées avancées, combien d’autres
étaient prêts à tirer ?
    Puis
un canon anglais se fit entendre, le boulet souleva une gerbe de
terre et les Français replongèrent dans leurs trous.
Autre boulet, suivi d’un troisième. Les défenseurs
d’Acre ne devaient pas trop savoir à quel saint se
vouer, mais semblaient avoir décidé que tout ennemi des
Français ne pouvait être qu’un ami.
    Nouveau
tir, nouveau choc d’un boulet. Mais tiré, cette fois, du
côté français. Sur les piliers de l’aqueduc !
Toute la structure frémit d’un bout à l’autre.
    « Dépêchez-vous ! »
    J’agitais
mon drapeau blanc comme un vrai parlementaire confiant dans le
respect des règlements internationaux. L’artillerie
tonnait à présent des deux côtés, les
boulets se croisant au-dessus de nos têtes. Puis un autre
toucha l’aqueduc, et encore un autre, ébranlant tout
l’édifice. Un coup au but m’aspergea de débris
de bois et de pierre. Je me retournai une fois de plus. Astiza
progressait obstinément, avec Mohammed juste derrière
elle. Plus que quelques dizaines de mètres et on y serait. Le
duel d’artillerie faisait rage autour de notre malheureux petit
trio !
    Astiza
cria. Je me retournai. Mohammed s’était redressé,
mais s’écroulait comme une masse, la poitrine
ensanglantée. Je baissai les yeux. Najac abaissait mon rifle !
    Et
ne pas pouvoir revenir sur mes pas pour tuer cette ordure…
    « Laisse-le,
Astiza ! Vite ! »
    C’est
alors qu’un nouveau coup au but toucha l’aqueduc. Les
Français devaient avoir reçu d’autres canons
lourds, en remplacement de ceux qu’ils avaient perdus en mer.
Il y avait un trou béant dans l’ancienne rigole :
un abîme qui me séparait d’Astiza.
    « Saute !
Je vais t’attraper !
    —  Non,
va jusqu’au bout ! Il ne me tuera pas. Je te ferai gagner
du temps ! »
    Elle
déchira un pan de sa robe et repartit dans la direction
opposée, en l’agitant au-dessus de sa tête. Les
Français cessèrent de tirer.
    Je
lâchai un juron, mais comment la retenir ? Malade de
chagrin, je fonçai vers Acre, debout de toute ma hauteur,
espérant que ma course ferait de moi une cible difficile. Si
le rechargement du long rifle avait été plus rapide, je
me serais peut-être fait descendre, mais l’opération
prenait une bonne minute et les mousquets tiraient toujours aussi
mal. J’avais dépassé, maintenant, le bout de la
dernière tranchée, et courais sur la partie encore
praticable de l’aqueduc. Les boulets suivaient ma progression.
Je me laissai choir sur le sol inégal, soulevant un nuage de
poussière.
    Des
sabots se firent entendre. Les Arabes de Najac approchaient au galop,
penchés sur l’encolure de leurs bêtes, sans souci
du feu anglais.
    Je
courus vers la douve. Moins de vingt mètres à franchir,
avec en point de mire l’énorme tour monolithique. Depuis
les remparts d’Acre, des soldats braquaient leurs fusils dans
ma direction. J’essayai de courir encore plus vite, l’écharpe
d’Astiza bien en évidence. Ce serait trop stupide de me
faire descendre par un Anglais qui n’aurait rien compris !
La garnison d’Acre tirait maintenant, et, le ciel en soit loué,
pas sur moi. J’entendis, sans me retourner, deux ou trois
cavaliers mordre la poussière.
    Du
bord de la douve, je glissai comme une loutre du Maine jusqu’aux
décombres qui la comblaient à moitié.

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