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Hiéroglyphes

Titel: Hiéroglyphes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: William Dietrich
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l’épaule.
    « Qu’est-ce
que c’est que cet engin ? »
    Je
pointai ma longue-vue dans la direction qu’il indiquait. Une
énorme bûche roulait vers nous, pointée à
l’horizontale, un tronc de cèdre, imposant, porté
par six roues massives. Des soldats marchaient de chaque côté
ainsi qu’à sa suite. L’extrémité de
la bûche était renflée comme un gigantesque
phallus, et protégée par une sorte d’armure.
Curieux engin, effectivement. Rappelant un peu ces béliers du
Moyen Âge qui enfonçaient les portes des châteaux.
Napoléon s’imaginait-il pouvoir fracasser nos murs avec
cet accessoire archaïque ? Ceux qui le poussaient à
vitesse croissante ne paraissaient pas en douter.
    Bonaparte
était-il devenu fou ?
    Ce
jouet hypertrophié aurait peut-être enchanté Ben
Franklin ou mon collègue américain Robert Fulton, qui
promenait dans Paris des idées folles nommées bateau à
vapeur et même sous-marin. Quel autre incorrigible bricoleur
connaissais-je encore ? Nicolas Jacques Conté, bien sûr,
l’homme à qui nous avions volé ce ballon, Astiza
et moi, pour nous évader du Caire. Monge, lui aussi,
n’avait-il pas prétendu construire un chariot
spécialement adapté au transport des charges lourdes
afin d’amener aux portes de cette ville des canons de fort
calibre ? Cette bûche roulante portait la marque de son
esprit fécond. Mais un bélier ? Plutôt
périmé, pour un homme moderne comme M. Conté.
À moins
que…
    « C’est
une bombe ! Visez sa tête, visez sa tête ! »
    La
torpille mobile, si c’en était une, avait atteint le
plan incliné descendant qui menait à la douve, et sa
vitesse augmentait encore.
    « Quoi ?
demanda Phélippeaux.
    —  Il
y a des explosifs au bout de cette bûche ! Il faut les
arrêter ! »
    J’empoignai
un mousquet. Visai brièvement. Fis feu. Même si je
touchais ma cible, son capuchon métallique la protégerait
efficacement. D’autres mousquets tiraient, mais nos hommes
visaient les servants de la bûche plutôt que la bûche
elle-même. Un ou deux tombèrent, et les six roues leur
passèrent dessus sans perdre une fraction de leur vitesse.
    « Il
faudrait la toucher avec un boulet.
    —  Trop
tard, Gage, dit calmement Sir Sidney. Nos pièces n’ont
plus assez de recul. »
    J’attrapai
Miriam, sous les yeux étonnés de son frère, et
l’entraînai vers l’arrière de la tour sans
lui laisser le temps de protester.
    « Reste
là au cas où ce truc marcherait ! »
    Smith
reculait lui aussi, et Djezzar était parti houspiller ses
hommes. Mais Phélippeaux ne bougeait pas. Il tira même
une balle de pistolet vers la tête blindée de la bûche.
C’était de la démence.
    Le
bélier roulant atteignit la lisière de la douve et
continua sur son élan, heurtant la base de la tour. Les
soldats qui l’avaient poussé le suivirent et l’un
d’eux ralentit sa course, le temps de tirer sur un cordon et de
lancer une sorte de fusée.
    Quelques
secondes plus tard, la tête de la bûche explosa, dans un
roulement de tonnerre si violent qu’il m’assourdit une
fois de plus. L’air s’emplit de fumée et de
flammes, et des débris de roche volèrent vers le ciel.
    Déjà
ébranlée par l’attaque précédente,
la tour vacilla comme un homme ivre. Je tombai avec Miriam tandis que
j’essayais de la retenir. Adossé au mur du fond, Sir
Sidney resta debout tandis que la façade de la tour, près
de nous, se désintégrait sous nos yeux, croulant et
coulant dans un abîme d’enfer. Avec elle, Jéricho
et Phélippeaux disparurent.
    « Mon
frère ! »
    Je
n’entendis pas le cri de Miriam. Je le devinai sur ses lèvres.
    Elle
se précipita vers le gouffre, mais je la rattrapai au vol.
    Rampant
sur son corps, qui se débattait furieusement, je plongeai mon
regard dans cette géhenne de feu et de fumée, telle
l’image vue d’en haut d’une éruption
volcanique. La moitié supérieure de la forteresse
réputée indestructible s’était épluchée
comme un fruit, exposant ses étages à demi dévastés.
C’était comme si nos vêtements avaient été
lacérés, nous laissant pitoyablement nus. En bas
s’étendait un magma de pierres et de corps qui achevait
de remplir la douve. Un son nouveau parvenait à mon ouïe
toujours défaillante et, soudain, je me rendis compte qu’il
s’agissait d’un chœur de milliers de voix exprimant
une jubilation intense. Les Français se ruaient, en hurlant,
vers la brèche qu’ils

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