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Hiéroglyphes

Titel: Hiéroglyphes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: William Dietrich
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fussent grands ouverts, il était aveugle.
    « Il
doit contempler actuellement, du haut de sa colline, ses meilleures
troupes mortes et vaincues. Votre nom restera dans l’histoire,
mon vieux, parce qu’ils ne prendront pas cette ville. Le tyran
républicain a été stoppé, et les généraux
politiques comme lui ne survivent pas à une telle défaite. »
    Il
releva la tête vers moi, les yeux brillants.
    « Retenez
bien ce que je vous dis, Gage. Le monde n’entendra plus jamais
personne parler glorieusement de Napoléon Bonaparte. »

22
    L e
colonel Phélippeaux eut-il le temps de comprendre, avant de
mourir, l’importance de sa victoire ? Je n’en sais
rien. Mais peut-être emporta-t-il dans l’autre monde la
sensation que tout ça n’avait pas été
vain, et que, dans la folie débridée de cette journée,
quelque chose de fondamental avait été gagné.
    Je
retournai auprès du corps de Najac, repris mon rifle, mon
tomahawk et la bague au rubis. Puis je réintégrai la
tour à moitié détruite. Des hommes du génie
ordonnaient à leurs hommes de réunir pierres et
madriers disponibles. Et de malaxer du mortier. La tour serait
reconstituée.
    Je
me mis en quête de Miriam et de Jéricho. Par bonheur, je
n’avais pas découvert le corps du forgeron parmi les
morts disposés en rangées provisoires, avant leur repos
éternel. Je levai les yeux. Les oiseaux avaient disparu dans
la cacophonie, mais je devinais les femmes de Djezzar toujours aux
aguets derrière leurs fenêtres grillagées. Des
éclats étaient apparus dans les boiseries, mais le
pacha se pavanait encore sur ses remparts en tapant sur l’épaule
de ses hommes épuisés ou lançant des injures aux
Français :
    « Alors,
elle ne vous plaît pas, mon hospitalité ? Revenez
que je vous la fasse encore apprécier ! »
    Je
bus de l’eau à la fontaine de la mosquée et
traînai dans la ville, souillé de sang et de cendre,
parmi des civils pleins de méfiance qui me suivaient des yeux.
Les miens devaient briller dans ma face noire, mais mon regard
portait à des milliers de kilomètres. Je marchai
jusqu’à la jetée avec son phare braqué sur
la Méditerranée, plus propre que le champ de bataille
des jours passés. Le canon tonnait encore, de temps en temps.
La seule façon, pour chacun des adversaires en présence,
de rappeler qu’ils étaient toujours là ?
    Comment
tout cela finirait-il ? Je ressortis la bague qui avait porté
malheur à ses possesseurs successifs. Existait-il vraiment des
malédictions ? Ben Franklin le rationaliste en douterait.
Mais je ne la portais pas au doigt lorsque je pénétrai
dans la mer jusqu’aux genoux puis jusqu’à la
taille. La fraîcheur de l’eau sur mon bas-ventre me fit
frissonner. Enfin, je nageai un peu vers le large et, contenant mon
souffle jusqu’à n’en plus pouvoir, je me laissai
couler, paupières bien ouvertes dans l’immensité
glauque. Une fois remonté à la surface, les cheveux
trempés, je pliai mon bras droit et… lançai vers
le soleil une sorte de météore rougeoyant qui
s’engloutit dans les eaux, profondes à cet endroit de la
Méditerranée. Aussi simple que ça. Plus de bague
maudite.
    J’en
tremblais de soulagement.
    *
* *
    Je
retrouvai Miriam à l’hôpital, bondé de
blessés plus ou moins graves. Les draps étaient rouges
et les cuvettes garnies d’eau rosâtre. D’autres
cuvettes contenaient des lambeaux de chair amputée. Des
mouches volaient et la seule odeur n’était pas celle du
sang, mais aussi de la gangrène et du charbon de bois des
brasiers où chauffaient les scies avant de resservir. Parfois,
jaillissait un cri de souffrance.
    Le
bâtiment vibrait sous l’incessante canonnade. Selon la
prédiction de Smith, Napoléon semblait se concentrer
pour quelque ultime expression de son orgueil offensé. Ou bien
renoncerait-il en fin de compte ? Des instruments chirurgicaux
encombraient les tables. De la poussière filtrait du toit de
tuiles jusque dans les yeux des blessés.
    Miriam
s’occupait, parmi d’autres éclopés, de son
frère toujours en vie, Dieu merci ! Jéricho était
pâle, les cheveux gras, sans chemise, le torse enveloppé
de bandages encore tachés de sang. Mais il était lucide
et me toisa d’un œil sceptique lorsque je me dressai à
son chevet.
    « Personne
ne peut venir à bout de toi ?
    —  J’ai
eu l’homme qui t’a logé une balle dans le corps,
Jéricho. On a tenu la brèche. Toi, moi, Miriam, tous
les

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