Hiéroglyphes
sermonna
Phélippeaux.
Djezzar
cracha par terre : « Voilà ce que j’en
pense, de leur adresse au tir ! »
Trop
large, sa cotte de mailles flottait autour de lui tandis qu’il
se pavanait de long en large, au sommet de la tour. Sans oublier de
s’assurer que ses hommes étaient toujours solides au
poste.
« Vous
savez que j’ai l’œil sur vous ! »
Quand le paysage vira au gris, je constatai que Bonaparte s’était
un peu trop pressé. Ses tranchées manquaient de
profondeur. Une vingtaine de ses hommes gisaient déjà
sur le carreau. Plusieurs canons de sa batterie centrale avaient été
renversés, réduits au silence, car les talus de
protection étaient insuffisants pour les abriter, et nos
propres boulets avaient partiellement détruit l’aqueduc,
arrosant les troupes embusquées de nombreux quartiers de
maçonnerie. Leurs échelles paraissaient ridiculement
courtes.
Puis
une grande clameur s’éleva et, drapeau tricolore bien en
évidence, les Français montèrent à
l’assaut. Ils avaient toujours autant de cœur au ventre.
C’était la première fois que j’assistais,
du côté opposé, à cette démonstration
de courage. Un spectacle assez effrayant que cette charge impétueuse
qui dévorait la distance, entre tranchées et douve, à
une vitesse ahurissante.
Turcs
et marins britanniques s’efforçaient de les stopper par
un feu nourri, mais les tirs de couverture des Français nous
obligeaient tous à baisser la tête. On n’en
élimina qu’un petit nombre. Les autres, sur leur élan,
atteignirent la douve et roulèrent jusqu’au fond.
Leur
reconnaissance du site avait été trop approximative. Il
manquait près d’un mètre aux échelles,
mais les plus braves rebondirent et les dressèrent, invitant
leurs camarades à les suivre. D’autres criblaient de
balles la brèche ouverte par leurs canons, touchant
quelques-uns de nos hommes. Déjà, les troupes ottomanes
commençaient à gémir.
« Silence !
rugit Djezzar. On dirait mes femmes ! Vous voulez voir ce que je
vous ferai si vous reculez ? »
Ils
parvinrent à mettre en place plusieurs de ces échelles.
Trop courtes, beaucoup trop courtes. Erreur fatale. Quand ils
lèveraient les bras pour tenter de se hisser jusqu’à
l’ouverture, personne n’hésiterait à saisir
une chaîne tendue en travers de la tour. Telle quelle, elle
leur permettrait d’envahir la ville et Acre connaîtrait
alors le destin de Jaffa. Mais quand la chaîne serait
électrisée…
Les
Turcs les plus valeureux se penchèrent pour tirer ou lancer
des pierres. Mais furent rapidement décimés par les
Français postés de l’autre côté de
la douve. Un homme tomba en hurlant, du haut de la brèche. Je
tirai moi-même au mousquet, une seule fois, en maudissant son
inexactitude.
Quelques
Ottomans battirent en retraite, abandonnant leurs armes. Les marins
britanniques essayèrent de les arrêter, mais ils étaient
en pleine panique. Djezzar descendit alors de son perchoir pour les
empêcher de fuir, le vieux sabre prussien brandi au-dessus de
sa tête.
« Vous
avez peur de quoi ? Regardez-les ! Leurs échelles
sont bien trop courtes ! Ils ne pourront pas entrer ! »
Penché
au-dehors, il déchargea ses deux pistolets, puis les tendit à
un Turc.
« Fais
au moins quelque chose, femmelette ! Recharge-les ! »
Ses
hommes, honteux, se remirent à tirer. Bien que terrorisés
par ces formidables soldats français, ils avaient encore plus
peur de leur maître.
Du
haut de la tour, tomba enfin une sorte de météore
enflammé qui rebondit sur le sol avant d’exploser. Une
déflagration cataclysmique, dans un jaillissement meurtrier,
en tous sens, de mille éclats de bois et de métal. Le
tonneau de poudre dont j’avais suggéré l’emploi.
L’explosion
projeta au sol les plus proches grenadiers mis en pièces, en
blessa de nombreux autres. Les hommes de Djezzar s’étaient
remis à canarder, de plus belle, les assaillants encore
valides. L’assaut se terminait avant d’avoir vraiment
commencé. Avec leurs canons rendus inefficaces par la
proximité même de leurs objectifs, leurs échelles
trop courtes, la brèche trop haute et trop étroite,
notre opposition énergique était venue à bout de
ces magnifiques soldats français. Elle avait brisé leur
élan et les rares survivants battaient en retraite.
« Voyez
comme ils cavalent ! »
En
réponse à l’enthousiasme de Djezzar, les Turcs
l’acclamèrent. Ils avaient bel et
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