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Hiéroglyphes

Titel: Hiéroglyphes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: William Dietrich
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grands lys de
Pâques et petites fleurs de lin rivalisent de couleurs et
d’abondance. Etait-ce le jardin de Dieu ? Loin de la mer,
le ciel était du bleu de l’écharpe de la Vierge
et la lumière allumait des étincelles dans les micas et
les quartz pareils à de minuscules joyaux.
    « Regardez !
Un bruant jaune ! s’extasiait Mohammed. Il nous dit que
l’été n’est pas loin. »
    Notre
division était un long serpent bleu parcourant l’Eden,
le drapeau français tricolore précédant notre
improbable pénétration dans l’Empire ottoman. Les
troupeaux de moutons se séparaient en deux files pour nous
livrer passage. Le soleil rebondissait sur les petits canons de
campagne, et les chariots bâchés de toile blanche se
balançaient sur les bosses de routes parfois escarpées.
    Quelque
part au nord-est, il y avait Damas. Au sud, Jérusalem. Les
soldats étaient de bonne humeur, heureux d’échapper
à l’ennui de quelque siège fastidieux, et la
division était assez riche, grâce à l’argent
saisi à Jaffa, pour bien manger sans avoir à voler. Au
soir du deuxième jour, on escalada un versant abrupt et je pus
enfin découvrir, très loin en contrebas, la mer de
Galilée, soupe bleue dans son bol vert et brun, tel un énorme
lac enfoui, scintillant et brumeux, au-dessous du niveau de la
Méditerranée. Au lieu de descendre jusque-là, on
obliqua vers le sud, en suivant les crêtes dans la direction de
Nazareth.
    Le
village natal du Sauveur était un endroit gris, dispersé,
dont la rue principale fourmillait de chèvres dérangées,
de temps à autre, par d’occasionnels chars à
bœufs. Une mosquée et un monastère franciscain se
dressaient presque face à face, comme pour se surveiller
mutuellement. On tira de l’eau au puits de Marie et on visita
l’église de l’Annonciation, grotte orthodoxe
pourvue de toutes ces fanfreluches qui excitent la verve et coupent
la digestion des protestants. Puis on gagna la plaine de Jezréel,
le grenier à pain du vieil Israël, artère où
se sont croisées, en trente siècles, toutes les armées
du continent. Le bétail paissait sur des pentes herbeuses,
lieux bucoliques d’importantes forteresses disparues. Des
charrettes grinçaient sur des chemins que les légions
romaines avaient foulés jadis.
    Tous
ces méandres agaçaient les soldats dont ils
ralentissaient l’avance, mais je savais que c’étaient
là des instants que peu d’Américains auraient
l’occasion de vivre. La Terre sainte ! Ici, selon toutes
les chroniques, l’homme se rapprochait de Dieu. Certains des
soldats se signaient ou, malgré l’athéisme
officiel, murmuraient des prières aux endroits les plus
sacrés. Ce qui ne les empêchait pas, le soir, d’affûter
leurs baïonnettes tandis qu’on s’endormait, bercé
par le va-et-vient des lames sur les pierres.
    Si
impatient que je sois de revoir Astiza, je me sentais toujours mal à
l’aise. Que faisait-elle, encore une fois, auprès de
l’enquêteur occulte Alessandro Silano ? Mes
alliances politiques étaient plus confuses que jamais, et
Miriam m’attendait à Acre.
    Mohammed,
lui, craignait que les trois mille soldats de Kléber ne
fussent insuffisants.
    « Dans
chaque village, règne le bruit que les Turcs s’amassent
en nombre sur notre route. Ils reçoivent des troupes de Damas
et de Constantinople et le renfort des mamelouks survivants d’Ibrahim
Bey, et des francs-tireurs venus des collines de Samarie. Chiites et
sunnites les rejoignent. Leurs mercenaires vont du Maroc à
l’Arménie. C’est une folie de rester avec les
Français. Ils sont foutus d’avance. »
    Je
lui montrai discrètement, du pouce, la clique de Najac.
    « On
n’a pas le choix. »
    Le
général Kléber, évidemment, ne partageait
pas ces inquiétudes. Il essayait de trouver les Turcs au lieu
de les éviter, espérant les surprendre en redescendant
des hauteurs nazaréennes. « La passion est
souveraine, disait ce vieux Ben, et règne bien rarement pour
le meilleur. » Quoique aussi compétent que l’élite
des généraux, Kléber, depuis un an, regimbait
sous la férule de Napoléon. Il était plus vieux,
plus grand, plus fort, plus expérimenté, et toute la
gloire de la campagne d’Égypte était revenue au
Corse. C’était Napoléon qui apparaissait dans les
bulletins sur cette campagne envoyés au pays. Lui qui
s’enrichissait des prises de guerre et faisait
vraisemblablement des découvertes archéologiques qui
légueraient

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