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Hiéroglyphes

Titel: Hiéroglyphes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: William Dietrich
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feu ! »
    Au
tonnerre des détonations s’associèrent deux
grands éclairs aveuglants, un grand jaillissement de fumée
blanche et, foudroyés de près, les plus proches
cavaliers tombèrent de leur cheval. Les autres tournèrent
bride dans un désordre indescriptible.
    « Incroyable !
commenta Ned. Ils ont plus de cran que de bon sens ! »
    Le
soleil poursuivait son ascension. D’autres cavaliers affluaient
dans la vallée, au-dessous de nous, agitant des lances et
hurlant comme des fauves. Une seconde fois, puis une troisième
et une quatrième, quelques centaines d’entre eux
revinrent à l’attaque. Et subirent le même sort.
Tous les mousquets, entretemps, avaient été rechargés.
Bientôt, il y eut autour de nous un cercle de cadavres
brillamment vêtus de soies aux couleurs éclatantes.
    « Qu’est-ce
qu’ils font ? murmurait Gros Ned. Alors qu’il leur
suffirait d’y mettre tout le paquet…
    —  Ou
d’attendre qu’on n’ait plus d’eau ni de
munitions, appuya Mohammed.
    —  En
nous les faisant gaspiller jusqu’au bout ? »
    Je
crois qu’ils espéraient, plutôt, que les carrés
se rompent et que les Français cherchent à détaler,
sous l’empire de la panique. Mais les hommes de Kléber
ne bronchaient pas. Et les Ottomans hésitaient.
    Toujours
sur son cheval en dépit des balles ennemies, le général
encourageait ses troupes :
    « Tenez
bon ! Tenez bon ! Des renforts vont arriver. »
    Des
renforts ? Acre était loin. Bonaparte également.
Les Ottomans jouaient-ils avec nos nerfs ? En nous laissant
tranquilles jusqu’à pouvoir enfoncer nos défenses ?
    En
les observant, toutefois, à la longue-vue, je me demandai
s’ils iraient jusque-là. De nombreux Turcs avaient des
velléités d’évacuer le théâtre
de la rencontre. D’autres les haranguaient. D’autres
encore s’étaient assis dans l’herbe et mangeaient.
Quelques-uns dormaient. Au cœur d’une bataille !
    Au
fil des heures, toutefois, notre endurance faiblissait, et leur
confiance revenait. Nos réserves de poudre s’amenuisaient.
On commença à retenir nos salves jusqu’à
la dernière seconde. Ils sentirent notre fléchissement.
Une nouvelle clameur s’éleva, les éperons
mordirent les flancs des chevaux et la même scène se
reproduisit.
    « Attendez…
Attendez… Laissez-les venir… ouvrez le feu !
Deuxième rang, à vous ! »
    Les
chevaux culbutaient en hennissant, les hommes tombaient comme des
mouches, se relevant parfois pour recevoir d’autres balles ou
rencontrer une baïonnette. On avait aussi quelques victimes
touchées par des balles ou entraînées dans cette
étrange mêlée périphérique. Mais le
carnage était infiniment plus terrible de leur côté,
et les cadavres des chevaux rendaient toute charge de plus en plus
difficile. Ned, Mohammed et moi aidions à transporter les
blessés au centre de la formation.
    Midi.
L’eau commençait à manquer. Les blessés en
souffraient, la soif se généralisait. Notre colline
était aussi sèche qu’un tombeau égyptien,
sous le soleil implacable. Près d’une centaine de
Français étaient tombés, et les Turcs ne
bougeaient plus. Kléber donna l’ordre de réunir
les deux carrés et, du haut de son cheval, organisa la
manœuvre. Le monde musulman tout entier semblait ligué
contre nous. Les champs environnants n’étaient plus que
terre écrasée, et la poussière s’élevait
en épais nuages. Les Turcs montèrent jusqu’au
sommet du Djebel-el-Dahy pour tenter de nous submerger sur l’élan
de la descente, mais chasseurs et carabiniers retranchés dans
les ruines du château en éliminèrent quelques-uns
qui, lancés au galop sur la pente, vinrent s’offrir
doublement à nos tirs de barrage.
    « Feu ! »
    Une
nouvelle salve fracassa un air de plus en plus chaud, une fumée
âcre acheva de nous brûler les yeux, la bourre vola une
fois de plus comme neige d’été tandis que les
chevaux sans cavalier fuyaient à corps perdu loin du bruit et
des hommes. À l’intérieur du carré
agrandi, les dents mordaient les cartouches, les mains versaient la
précieuse poudre, le sol était jonché de petits
bouts de papier blanc. Mais, graduellement, ma langue de cuir ne
trouvait plus la moindre trace d’humidité dans ma bouche
cotonneuse. Des essaims de mouches volaient sur les cadavres, des
soldats perdaient connaissance alors que, même en nous bloquant
ainsi, les Ottomans ne savaient plus que tenter.

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