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Histoire De France 1618-1661 Volume 14

Histoire De France 1618-1661 Volume 14

Titel: Histoire De France 1618-1661 Volume 14 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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grande fumée dont les enfermés étouffaient. D'autre part, un curé parvint jusqu'à Beaufort, et lui fit honte de ce mélange horrible où il confondait ses amis. Il avança alors, sauva quelques personnes. Mais ce qui fut plus efficace, c'est que, les soldats furieux de Condé ayant été tués ou blessés en grand nombre, il ne restait guère sur la Grève que de la canaille. Ces meurt-de-faim, fort peu passionnés, imaginèrent qu'il y avait là une grosse affaire pour eux à dépouiller les richardsqui seraient trop heureux de n'être que volés. Ils montèrent, trente d'abord d'un même flot. Et ils trouvèrent l'affaire encore meilleure. Ces gens, qui n'attendaient que la mort, non-seulement se laissèrent voler très-volontiers, mais leur proposèrent des traités, deux cents francs, trois cents francs, pour être ramenés chez eux. Ce commerce honteux, misérable, des vies humaines, qui s'était fait à la Saint-Barthélemy, se revit dans Paris. Les défenseurs payés se croyaient si autorisés d'en haut, qu'ils ne faisaient difficulté de dire leurs noms, leurs métiers, leur adresse, et venaient froidement toucher le lendemain le prix convenu de la veille.
    Mademoiselle, qui, dans tout cela, montre un cœur de princesse, et point du tout de femme, donne la belle excuse qu'elle fit chercher un trompette pour l'envoyer devant et obtenir passage, mais qu'il ne s'en trouva pas dans tout Paris. Elle était revenue au Luxembourg. Son père, après avoir eu peur d'agir, commençait à avoir peur de n'agir pas. Il l'obligea de retourner. Il était minuit, et tout fini. Elle ne rencontra guère de vivants, mais des morts empilés dans une charrette, et si négligemment jetés, que les jambes et les bras roidis passaient d'ici et de là. «Je ne fis que changer de portière, dit-elle, de crainte que les pieds ou les mains ne me donnassent par le nez.» La nuit était très-belle, fort chaude. Cette fille sensible rit fort en rencontrant des marchandes en chemise qui causaient sur la porte avec leurs bons amis en costume plus simple encore. La Grève était moins gaie. «Je ne vis jamais, dit-elle, un lieu plus solitaire.»Beaufort la fit passer sur les poutres fumantes. Elle trouva dans un cabinet le prévôt, et le sauva d'un danger qui n'existait plus.
    Il était presque jour. Paris se reconnaissait. On commençait partout à raconter la chose. Et tout retombait sur Condé. «Il y eut un mouvement d'horreur,» dit Joly.—Et Mademoiselle elle-même: «Ce fut le coup de massue pour le parti.» Et le prudent Omer Talon ne fait pas difficulté de dire: «Le coup le plus barbare, le plus sauvage qui se soit fait depuis l'origine de la monarchie [27] .»
    Condé fit l'expérience du changement terrible qui s'était fait pour lui. Son partisan, le conseiller Leboult, vint trouver les deux princes à la tête de plusieurs des victimes échappées, et, quand ils le pressèrent d'articuler qui l'on croyait coupable, il dit fermement:«Vous.» À quoi Condé ne dit rien autre chose, sinon «que personne ne dirait cela qu'il ne le fît périr.»
    Un autre de ses partisans, le conseiller Croissy, se déclara hardiment contre lui quand il voulut faire recevoir son ami Rohan duc et pair. Condé en vint à bout par la menace, et, comme il raillait Croissy en sortant et disait qu'après tout il n'agissait que pour chasser les Mazarins, Croissy, en levant les épaules, lui dit: «Je voudrais que personne n'eût pas plus d'intelligence que moi avec lui.» Mot sanglant qui notait cette duplicité exécrable: un massacre opéré pour traiter plus facilement, et la Fronde égorgée pour pouvoir mieux trahir la Fronde.
    L'indignation, l'horreur de son propre parti, l'obligèrent de donner quelque satisfaction à l'opinion. Il fit dire aux églises qu'on révélât ce qu'on saurait des auteurs du massacre. Ils n'étaient pas difficiles à trouver.
    On prit tout d'abord le petit laquais et le cuisinier de Condé. On les avait vus frapper Miron à terre. Le rapporteur de l'affaire trouve un matin écrit sur sa porte: «Si vous les faites mourir, vous êtes mort!»
    Mais, en les défendant, Condé se fut séparé de la Fronde. L'assemblée, chargée de nommer un nouveau prévôt, nomma Broussel à l'unanimité, et l'une des victimes échappées du 4, Charton, brouillé avec les princes et désormais leur ennemi, eut presque autant de voix que Broussel. Celui-ci, octogénaire, maladif et de plus en plus, était incapable d'agir. Sa

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