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Histoire de la Bretagne ancienne et moderne

Histoire de la Bretagne ancienne et moderne

Titel: Histoire de la Bretagne ancienne et moderne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Barthélémy (de Paris)
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son côté,
M. de Thiard, commandant pour le roi, faisait entrer à
Rennes toutes les garnisons voisines, dont la tenue menaçante
exaspérait les habitants. Tout à coup les magistrats apprennent que
leurs collègues de Paris ont été enlevés de leurs sièges à main
armée. Au moment où ils rédigent une protestation,
M. de Thiard leur envoie l’ordre de s’assembler le
lendemain, 10 mai, pour recevoir les ordonnances de Sa Majesté.
    Dès cinq heures du matin, la cour entière
était au palais. Bientôt le président apprend que les grenadiers de
Rohan-Montbazon couvrent la Motte, et que d’autres soldats
remplissent les Cordeliers ; il ordonne alors aux huissiers de
fermer les portes de la salle. À sept heures, arrive de Thiard avec
ses gardes : aux cris du peuple :
Vive le
parlement ! Haro sur les traîtres !
il entre au
palais, arrive devant la salle, aux portes de laquelle ses hommes
frappent en vain. Las d’attendre, les soldats, sur l’ordre de leur
chef, forcent l’entrée, et lecture est donnée des ordonnances
royales au parlement, qui refuse de les enregistrer et se retire en
bon ordre, au milieu des cris du peuple :
Vive le
parlement !
M. de Thiard et ses grenadiers
veulent sortir à leur tour ; pris entre deux foules, ils
essaient de s’ouvrir un passage avec leurs sabres et leurs
baïonnettes : le peuple et les étudiants, furieux, leur
lancent mille projectiles. « Aux armes ! » crient
les gardes exaspérés, et les fusils s’apprêtent, quand un officier
apaise le courroux populaire par une parole d’à-propos. Le peuple
veut embrasser le bon citoyen et se presse autour de lui ;
croyant qu’on en veut à la personne d’un de leurs chefs, les
soldats se précipitent sur la foule, qui les reçoit à coups de
pierres. Cette méprise amène un vrai combat, dans lequel le
pacificateur est blessé à la joue. L’ordre se rétablit enfin, mais
pour ne durer qu’un moment.
    Moreau de Morlaix, qui devait être un
capitaine accompli, étudiait alors à Rennes : aimé de ses
condisciples, du peuple et de la bourgeoisie, il devint
l’instrument actif de toutes les insurrections dans cette grande
ville. Rennes semblait pris d’assaut, tant ses points principaux
étaient garnis de soldats étrangers à la province, munis de
cartouches. Forcés de fuir dans la nuit, traqués par les
patrouilles, les membres du parlement, les uns travestis, les
autres à demi nus, se forment en assemblée dans une maison
particulière, et jurent de défendre jusqu’au bout les antiques
franchises du pays.
    Nouvelles émeutes ; les soldats sont
insultés, et ne semblent se défendre qu’à la dernière extrémité. Le
peuple triomphe, et conduit le parlement à l’hôtel de Cuillé, en
criant :
Vivent le parlement et les lois !
Pendant ce temps-là, le feu de l’insurrection gagnait toute la
province. À Nantes, la cour des comptes suivait l’exemple du
parlement de Rennes et était soumise aux mêmes vicissitudes. Ce
dernier, rejoignant ses membres et s’unissant à
M. de Botherel et à la commission des états, en qui se
résumaient les pouvoirs de la Bretagne, envoie ses dernières
remontrances à Louis XVI, en sa cour de Versailles, par douze
de ses représentants. Le roi blâme cette démonstration par une
lettre sévère, et fait mettre les députés à la Bastille. La
noblesse bretonne adresse à son tour douze envoyés au
monarque ; ils arrivent à Paris, et font un appel à tout ce
qui porte un cœur breton. Le ministère s’effraie des sympathies
qu’ils rencontrent, et les fait jeter à la Bastille.
    Cette nouvelle apportée en Bretagne est comme
l’étincelle qui détermine un violent incendie : vingt récits,
plus étranges les uns que les autres, en augmentent encore la
gravité. Cette fois, ce ne sont plus douze députés qui s’élancent
vers Paris : ce sont cinquante-trois gentilshommes et
bourgeois ; c’est toute une représentation nationale, décidée
à parvenir au roi morte ou vive, et chargée par la solennelle
réunion des trois états : de maintenir toutes les
protestations antérieures, – de demander la restitution des
franchises bretonnes, – de provoquer l’élargissement des
prisonniers de la Bastille. Ceci se passait le 15 août 1788.
    Louis XVI et ses ministres comprennent
enfin ce que c’est que les volontés bretonnes. Mais Brienne
consigne impitoyablement les députés, les écarte des marches du
trône, jusqu’au jour qui vient

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