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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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nous avons accordé si libéralement, dans le second, à saint
Justin et à saint Irénée [1430] .
Si la vérité de quelques-uns de ces miracles est appréciée par leur utilité
apparente, chaque siècle avait des incrédules à convaincre, des hérétiques à
réfuter et des nations idolâtres à convertir. Il a toujours été possible de
produire des motifs suffisants pour justifier l’intervention du ciel ; et
cependant, puisqu’on ne peut admettre de révélation sans être persuadé de la
réalité des miracles, et que, de l’aveu de tout homme raisonnable, cette
puissance surnaturelle a cessé, il a donc évidemment existé quelque période où
le don des miracles a été enlevé subitement, ou par degrés, à l’Église
chrétienne.  Quelle qu’ait été l’époque choisie pour un pareil dessein, que
cette révolution soit arrivée à la mort des apôtres, à la conversion de
l’empire romain ou à l’extinction de l’hérésie arienne [1431] ,
l’insensibilité des chrétiens qui vécurent alors excitera toujours avec raison
notre surprise. Ils conservèrent toujours leurs prétentions après avoir perdu
leur pouvoir. La crédulité exerça les fonctions de la foi ; il fut permis
au fanatisme de prendre le langage de l’inspiration, et les effets du hasard ou
les prestiges de l’imposture furent attribués à des causes divines. L’exemple
récent des véritables miracles aurait dû faire connaître à l’univers chrétien
les voies de  la Providence, et, si nous pouvons employer une expression très
imparfaite, habituer les yeux des fidèles à la manière d’un grand artiste. Si
de nos jours le peintre le plus habile de l’Italie avait l’audace de décorer
ses faibles copies des noms de Raphaël ou du Corrège, cette fraude insolente
serait bientôt découverte, et elle exciterait la plus vive indignation.
    Quelque opinion que l’on puisse avoir des miracles de la
primitive Église depuis le temps des apôtres, cette docilité de caractère que
l’on remarque parmi les chrétiens du second et du troisième siècle, procura
quelques avantages à la cause de la vérité et de la religion. Aujourd’hui un
scepticisme caché et même involontaire s’attache aux dispositions les plus
religieuses. Le sentiment que l’on éprouve en admettant les vérités
surnaturelles, est bien moins une croyance active qu’un acquiescement froid et
passif. Accoutumés depuis longtemps à observer et à respecter l’ordre
invariable de la nature, notre raison, ou du moins notre imagination, n’est pas
suffisamment préparée à soutenir l’action visible de la Divinité. Mais à la
naissance du christianisme le genre humain se trouvait dans une situation
extrêmement différente. Les plus curieux, ou les plus crédules d’entre les
païens, se déterminaient souvent à entrer dans une société qui se vantait de
jouir du don des miracles. Les premiers chrétiens marchaient perpétuellement
sur un terrain mystique, et leur esprit s’était formé à l’habitude de croire
les événements les plus extraordinaires. Ils sentaient, ou ils se figuraient
qu’assaillis de tous côtés par des démons, ils étaient sans cesse rassurés par
les visions célestes, instruits par les prophéties, et miraculeusement délivrés
des dangers, des maladies, de la mort même, par les supplications de l’Église.
Les prodiges réels ou imaginaires dont ils se croyaient si souvent les objets,
les instruments ou les spectateurs, les disposaient fort heureusement à
recevoir avec la même facilité, mais avec bien plus de raison, les merveilles
authentiques de l’Évangile : ainsi, des miracles qui n’excédaient pas la mesure
de leur expérience, ne leur permettaient pas de douter de la vérité de ces
mystères, qui, de leur propre, aveu, surpassaient les limites de leur
entendement. C’est cette conviction intime des vérités surnaturelles, que l’on
a tant célébrée sous le nom de foi : l’heureux état d’une âme sur laquelle
elles avaient fait une impression profonde, paraissait le gage le plus assuré
de la faveur divine et de la félicité future, et on le recommandait comme le
premier et peut-être comme le seul mérite d’un chrétien. Selon les docteurs les
plus rigides, les vertus morales qui peuvent être également pratiquées par les
infidèles, ne sont d’aucune valeur ni d’aucune efficacité dans l’œuvre de notre
justification.
    IV . Mais dans les premiers siècles de

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