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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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l’Église, le
chrétien démontrait sa foi par ses vertus ; et l’on avait raison de
supposer que la persuasion divine, dont l’effet est d’éclairer ou de subjuguer
l’intelligence, doit en même temps purifier le cœur du fidèle et diriger ses
actions. Les plus anciens apologistes du christianisme, lorsqu’ils attestent l’innocence
de leurs frères, et les écrivains d’un siècle moins reculé, qui célèbrent la
sainteté de leurs ancêtres, représentent avec des couleurs les plus vives la
réformation des mœurs que la prédication de l’Évangile opéra parmi les hommes.
Comme mon intention est de remarquer seulement les causes humaines qui ont
secondé l’influence de la révélation, j’exposerai légèrement deux motifs qui
ont pu naturellement rendre la vie des premiers chrétiens plus pure et plus
austère que celle de leurs contemporains idolâtres, ou de leurs successeurs
dégénérés. L’un était le repentir de leurs fautes passées ; l’autre, le
désir louable qu’ils avaient de soutenir la réputation de la société dans
laquelle ils avaient été admis.
    Les chrétiens ont été autrefois accusés d’attirer dans leur
parti les plus grands scélérats. S’il faut en croire des imputations suggérées
par l’ignorance ou par la malignité des païens, le coupable, dès qu’il
éprouvait quelques remords, se déterminait aisément à laver dans les eaux du
baptême, des crimes pour lesquels les temples des dieux refusaient d’accorder
aucune expiation. Mais ce reproche, exposé dans son véritable jour, honore
autant l’Église, qu’il a contribué à augmenter le nombre des fidèles [1432] . Les
apologistes du christianisme peuvent avouer, sans rougir, que la plupart des
saints les plus éminents ont été avant leur baptême, les plais scandaleux des
pécheurs. Ceux qui dans le monde avaient suivi, quoique d’une manière très
imparfaite, les lois de la bienveillance et de l’honnêteté, se contentaient de
l’opinion de leur propre droiture ; et la satisfaction calme qu’ils
éprouvaient les rendait bien moins susceptibles de ces émotions soudaines de
honte, de douleur et d’effroi, qui ont enfanté tant de conversions
merveilleuses. Guidés par l’exemple de leur divin maître, les missionnaires de
l’Évangile ne dédaignaient pas la société des hommes, et surtout des femmes,
qui, accablés du poids de leurs vices, en ressentaient souvent les effets.
Comme ces prosélytes passaient tout à coup du péché et de la superstition à
l’espérance glorieuse de l’immortalité, ils prenaient le parti de se consacrer
non seulement à l’exercice des vertus, mais encore à une vie de pénitence. Le
désir de la perfection devenait la passion dominante de leur âme ; et si la
raison s’arrête dans une froide modération, on sait avec quelle rapidité, avec
quelle violence, nos passions nous font franchir l’espace qui se trouve entre
les extrémités les plus opposées.
    Lorsque les nouveaux convertis avaient été enrôlés parmi les
fidèles, et admis aux sacrements de l’Église, une autre considération d’une
espèce moins relevée, mais pure cependant et respectable, les empêchait de
retomber dans leurs désordres passés. Toute société particulière qui s’est
séparée du grand corps de la nation ou de la religion à laquelle elle
appartenait, excite aussitôt une attention et une méfiance universelles. C’est
surtout quand elle est composée d’un très petit nombre de personnes, que leurs
vertus ou leurs vices peuvent influer sur la réputation générale de la société.
Chaque membre est obligé de veiller avec la plus exacte vigilance sur sa propre
conduite et sur  celle de ses frères, puisque, devant s’attendre à partager un
déshonneur que quelques-uns répandraient sur tous, il espère participer à la
réputation commune. Lorsque les chrétiens de Bithynie furent traduits devant le
tribunal de Pline le Jeune, ils assurèrent le proconsul que, loin d’entrer dans
aucune conspiration contraire aux lois de l’État, ils s’engageaient tous, par
une obligation solennelle, à ne commettre aucun de ces crimes qui troublent la
paix publique et particulière de la société, tels que le vol, le brigandage,
l’adultère, le parjure et la fraude [1433] .
Cent ans après environ, Tertullien pouvait se vanter, avec un noble orgueil,
qu’excepté pour la cause de la religion, on avait vu périr très peu de
chrétiens [1434] par la

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