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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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sortit avec précipitation de Nicomédie,
déclarant que s’il différait plus longtemps de quitter un lieu si funeste, il
tomberait bientôt victime de la rage des chrétiens. Les historiens
ecclésiastiques, par qui seuls nous connaissons cette persécution et qui ne
nous en ont laissé que des notions imparfaites et pleines de partialité, ne
savent comment expliquer les craintes et le danger des empereurs. Deux de ces
écrivains, un prince et un rhéteur, avaient été témoins de l’incendie de
Nicomédie : l’un l’attribue à la foudre et à la colère divine [1731]  ; l’autre
assure qu’il fut allumé par la méchanceté de Galère lui-même [1732] .
    L’édit contre les chrétiens devait avoir force de loi dans
tout l’empire. Dioclétien et Galère, quoiqu’ils n’eussent pas besoin du
consentement des princes d’Occident, étaient persuadés qu’ils l’approuveraient.
Il nous semblerait donc, selon nos idées d’administration, que les gouverneurs
de toutes les provinces auraient dû recevoir des instructions secrètes pour
publier le même jour cette déclaration de guerre dans leurs départements
respectifs. On imaginerait du moins que les grands chemins et les postes
établis sur toutes les routes auraient donné aux empereurs la facilité de
transmettre leurs ordres avec la plus grande diligence, depuis le palais de
Nicomédie jusqu’aux extrémités du monde romain. N’est-il pas étonnant que,
cinquante jours se soient passés avant que l’édit eût été publié en
Syrie ; et qu’il n’ait été signifié qu’environ quatre mois après aux
villes de l’Afrique [1733] ? Ce délai venait peut-être du caractère réservé de Dioclétien, qui,
souscrivant avec peine à la persécution, voulait en faire l’épreuve sous ses
yeux, avant de donner entrée aux désordres et au mécontentement qu’un pareil
acte devait nécessairement produire dans les provinces éloignées. A la vérité,
on défendit d’abord aux magistrats de répandre le sang ; mais on leur
permit, on leur recommanda même d’employer toute autre voie de rigueur. Les chrétiens,
quoique prêts à se dépouiller volontairement des ornements de leurs églises, ne
pouvaient se résoudre à interrompre leurs assemblées religieuses, ni à livrer
aux flammes leurs livres sacrés. La pieuse opiniâtreté de saint Félix, évêque
d’Afrique, paraît avoir embarrassé les ministres subordonnés du gouvernement.
L’intendant de sa ville l’envoya chargé de fers au proconsul ; celui-ci
l’adressa au préfet du prétoire de l’Italie ; et saint Félix qui, dans ses
réponses, dédaignait même d’avoir recours à des subterfuges, fut enfin décapité
à Vénuse, en Lucanie, ville célèbre par la naissance d’Horace [1734] . Cet exemple,
et peut-être quelque récrit impérial qui en fut la suite, paraissait autoriser
les gouverneurs des provinces à punir de mort les chrétiens qui refuseraient de
donner leurs livres sacrés. Plusieurs fidèles embrassèrent sans doute une
occasion si favorable d’obtenir la couronne du martyre ; mais il y en eut
aussi beaucoup trop qui achetèrent ignominieusement leur vie en  découvrant les
saintes Écritures, et en les remettant aux mains des idolâtres. Un grand nombre
même d’évêques et de prêtres méritèrent, par cette condescendance criminelle,
l’ignominieuse dénomination de traditores  ; et leur offense fut
alors pour l’Église d’Afrique un sujet de scandale, et dans la suite une source
de discorde [1735] .
    Les exemplaires et les versions de l’Écriture avaient déjà
été si multipliés dans l’empire, que la plus sévère inquisition ne pouvait
avoir aucune suite fatale ; et même la destruction des livres que l’on conservait
dans chaque congrégation pour l’usage public ne pouvait avoir lieu sans la
complicité de quelque indigne et perfide chrétien. Mais l’autorité du
gouvernement et les travaux des gentils parvinrent facilement à détruire les
églises. Dans quelques provinces cependant les magistrats se contentèrent de
fermer les lieux destinés au culte de la religion ; dans d’autres, ils se
conformèrent plus strictement à la teneur de l’édit ; et, après avoir
enlevé les portes, les bancs et la chaire, qu’ils brûlaient comme si c’eût été
un bûcher funéraire, ils démolissaient entièrement le reste de l’édifice [1736] . Ce serait
peut-être ici le lieu de placer une histoire très remarquable, dont

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