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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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[1721] .
Cette importante question fut agitée en leur présence, et ces courtisans
ambitieux s’aperçurent aisément qu’il fallait seconder, par leur éloquence, la
violence importune du César. On peut présumer qu’ils insistèrent sur tous les
points capables d’intéresser l’orgueil, la piété ou les craintes de leur
maître ; et de le déterminer à la destruction du christianisme. Ils lui
remontrèrent peut-être qu’après avoir délivré l’empire de tous ses ennemis, il
ne pouvait se vanter d’avoir terminé ce glorieux ouvrage, tant qu’il laisserait
un peuple indépendant subsister et se multiplier dans le cœur des provinces.
Les chrétiens (tel était l’argument spécieux dont ils pouvaient se servir) ont
renoncé aux divinités et aux institutions de Rome. Ils ont formé une république
distincte, qu’il est encore possible de détruire avant qu’elle ait acquis une
force militaire ; mais elle se gouverne déjà par ses propres lois et par
ses magistrats ; déjà elle possède un trésor public ; et toutes ses parties
sont intimement liées entre elles par ces assemblées fréquentes d’évêques, dont
de nombreuses et opulentes congrégations reçoivent les décrets avec une
obéissance implicite. On pourrait croire que de pareils arguments furent
employés pour faire impression sur l’esprit de Dioclétien et l’engager, malgré
sa répugnance, à suivre un nouveau système de persécution. Mais quelles que
soient nos conjectures, il n’est pas en notre pouvoir de rapporter les 
intrigues secrètes du palais, les vues et les haines particulières,  la
jalousie des femmes et des eunuques, et tous ces motifs frivoles, mais
décisifs, qui influent si souvent sur le destin des empires et dans les
conseils des plus sages monarques [1722] .
    Les empereurs signifièrent enfin leur volonté aux chrétiens,
qui, pendant tout le cours de ce fatal hiver, avaient attendu avec la plus
cruelle inquiétude le résultat de tant de délibérations secrètes ! Le 23
de février [ 303 ], jour où l’on célébrait la fête des Terminales [1723] , fut désigné,
soit à dessein, soit par un effet du hasard, pour mettre des bornes aux progrès
du christianisme. Le préfet du prétoire [1724] ,
suivi de plusieurs généraux, tribuns et officiers du fisc, se rendit de très
grand matin à la principale église de Nicomédie, située sur une hauteur, dans
le quartier le plus populeux et le plus magnifique de la ville. A l’instant les
portes furent enfoncées en leur présence, ils se précipitèrent dans le
sanctuaire, mais ils cherchèrent en vain quelque objet visible de culte, et ils
ne purent que livrer aux flammes les livres des saintes Écritures. Les
ministres de la sévérité de Dioclétien étaient suivis d’une troupe nombreuse de
gardes et de pionniers, qui marchaient en ordre de bataille, et qui étaient
pourvus de tous les instruments dont on se servait pour détruire les villes
fortifiées. Après un travail de quelques heures, un édifice sacré, dont le
faîte s’élevait au-dessus du palais impérial, et qui avait excité si longtemps
l’envie et l’indignation des gentils, fut détruit de fond en comble [1725] .
    On publia le lendemain, l’édit général de persécution [1726] . Galère voulait
que tous ceux qui refuseraient de sacrifier aux dieux fussent brûlés vifs sur
le champ. Quoique Dioclétien, toujours éloigné de répandre le sang, eût modéré
la fureur de son collègue, les châtiments infligés aux chrétiens paraîtront
assez réels, et assez rigoureux. Il fut ordonné que leurs églises seraient
entièrement démolies dans toutes les provinces de l’empire ; et l’on
décerna la peine de mort contre ceux qui oseraient tenir des assemblées secrètes
pour exercer leur culte religieux. Les philosophes, qui ne rougirent point
alors de diriger le zèle aveugle de la  superstition avaient étudié
soigneusement la nature et le génie de la religion chrétienne : ils savaient
que les dogmes spéculatifs de la foi étaient censés contenus dans les écrits
des prophètes, des évangélistes et des apôtres ; ce fut probablement à leur
instigation que l’on voulût obliger les évêques et les prêtres à remettre leurs
livres sacrés entre les mains des magistrats, qui avaient ordre, sous les
peines les plus sévères, de les brûler solennellement en public. Par le même
édit, toutes les propriétés de l’Église furent à la fois confisquées, et

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