Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
Vom Netzwerk:
les bandes
d’infanterie romaine qui en retinrent le nom et les honneurs, n’étaient
composées que de mille à quinze cents hommes [1907] . On pouvait
aisément arrêter les complots de ces détachements séparés, que le sentiment de
leur faiblesse particulière rendait timides et incertains ; et les
successeurs de Constantin pouvaient satisfaire leur goût pour l’ostentation par
le plaisir illusoire de commander à cent trente-deux légions inscrites sur
l’état de leur nombreuse armée. Le reste de leurs troupes était divisé,
l’infanterie en cohortes, et la cavalerie en escadrons : leurs armes, leurs noms
et leurs enseignes, tendaient à inspirer la terreur, et faire distinguer les
différentes nations qui marchaient sous les drapeaux de l’empire. Il ne restait
plus rien de cette simplicité sévère qui dans les siècles brillants de victoire
et de liberté, avait distingué une armée romaine, de ce ramas immense et confus
de soldats dont marchait environné un monarque d’Asie [1908] . Un
dénombrement particulier tiré de la Notitia pourrait occuper l’attention
d’un amateur de l’antiquité. Mais l’histoire se contentera d’observer que les
postes militaires ou les garnisons placées sur les frontières de l’empire
montaient à cinq cent quatre-vingt-trois, et que, sous les successeurs de
Constantin, les forces totales de l’armée étaient composées de six cent
quarante-cinq mille soldats [1909] .
Dans les siècles précédents, cet effort aurait surpassé les besoins de
l’empire ; dans les suivants il surpassa ses facultés. Dans les différents
états de la société, les motifs qui contribuent au recrutement des armées sont
d’un genre très différent. Les Barbares vont à la guerre par goût ; les
citoyens d’un État libre y sont poussés par le devoir et l’amour de la patrie :
les sujets ou du moins la noblesse d’une monarchie ont pour les y exciter le
sentiment de l’honneur ; mais les timides et voluptueux habitants d’un
empire sur le déclin ne sont attirés au service que par l’espoir du gain, et
n’y sont retenus que par la crainte des châtiments. Les ressources du trésor
romain furent épuisées par l’augmentation de la paye, par des gratifications multipliées,
par l’intervention de nouveaux émoluments, et par de nouveaux privilèges qui
pussent compenser, aux yeux de la jeunesse des provinces, les fatigues et les
dangers de la vie militaire. Cependant, quoiqu’on fût devenu moins, exigeant
sur la taille [1910] ,
quoiqu’on fermât les yeux sur l’admission des esclaves, on se trouva dans
l’impossibilité de fournir à l’armée un nombre suffisant et régulier de recrues
volontaires, et les empereurs furent obligés d’avoir recours à des moyens plus
effectifs et même à des mesures coercitives. Les terres qu’on donnait d’abord
aux vétérans, en toute franchise, comme une récompense de leur valeur, ne leur
furent plus accordées que sous une condition où l’on découvre les premières
idées du système féodal. Ceux  de leurs fils qui en héritaient, étaient obligés
de se dévouer au métier des armes dès que leur âge le leur permettrait. Leur
lâche refus était puni par la perte de l’honneur, de la fortune, et même de la
vie [1911]  ;
mais, comme les fils des vétérans étaient loin de suffire aux besoins au
service, on faisait de  fréquentes levées dans les provinces. Chaque
propriétaire était obligé de prendre les armes ou de payer un substitut, ou de
se racheter par le paiement d’une amende considérable. Le rachat qu’on réduisit
à quarante-deux pièces d’or, nous donne une idée du prix exorbitant que se
vendait un soldat, et de la répugnance avec laquelle le gouvernement accorda
une dispense [1912] .
Les Romains abâtardis avaient pris une telle horreur pour la profession de
soldat, que, pour en être dispensés, plusieurs jeunes hommes de l’Italie et des
provinces se coupaient les doigts de la main droite et cet étrange expédient
fut d’un usage assez commun pour nécessiter la sévérité des lois [1913] , et un nom
particulier dans la langue latine [1914] .
    L’admission des Barbares dans les armées devint de jour en
jour plus commune, plu nécessaire et plus funeste. Les plus hardis d’entre les
Scythes, les Goths et les Germains, qui mettaient leur bonheur dans la guerre,
trouvant plus de profit à défendre qu’à ravager les provinces, non seulement
s’enrôlaient parmi les

Weitere Kostenlose Bücher