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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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chasse devint le privilège sacré des nobles et de leurs
domestiques. La loi les autorisait à punir d’un certain nombre de coups de
bâton ou à emprisonner les plébéiens assez hardis pour partager leurs plaisirs [4368]  ; et, dans
un siècle qui admettait une faible rétribution pécuniaire comme une
compensation pour le meurtre d’un citoyen ; c’était un crime capital de tuer un
cerf ou un taureau sauvage dans l’enceinte des forêts royales [4369] .
    Selon les anciennes lois de la guerre, le vainqueur devenait
le maître légitime et absolu de l’ennemi qu’il avait vaincu et auquel il avait
accordé la vie [4370] .
Les hostilités perpétuelles des Barbares indépendants renouvelèrent et
multiplièrent les sources lucratives de l’esclavage, qu’avait presque
totalement détruites le paisible gouvernement de Rome. Au retour d’une
expédition heureuse, le Goth, le Bourguignon ou le Franc, traînait après lui
une longue suite de bœufs, de moutons, de femmes et d’hommes, qu’il traita tous
avec le même mépris ou la même brutalité. Il réservait pour son service
personnel les jeunes gens des deux sexes qui se faisaient remarquer par leurs
agréments, et qui, dans cette situation douteuse, se trouvaient alternativement
exposés au malheur de plaire ou de déplaire à des maîtres impétueux et
despotiques. Les ouvriers de toute espèce (forgerons, charpentiers, tailleurs,
cordonniers, cuisiniers, jardiniers, teinturiers, ouvriers en or et argent)
travaillaient de leur métier pour l’usage ou au profit de leur maître ; et
il condamnait, sans égard pour leur rang, les captifs romains qui n’avaient
point d’industrie, à soigner ses troupeaux ou à travailler dans ses terres. De
nouvelles recrues augmentaient perpétuellement le nombre des serfs attachés de
père en fils à chaque terre, et ces malheureux, selon le caractère ou la
situation de leur maître, se trouvaient quelquefois momentanément, élevés à une
condition meilleure, et le plus souvent accablés sous le poids d’un despotisme
capricieux. Les possesseurs de terres avaient sur leurs serfs le droit absolu
de vie et de mort [4371] ; et lorsqu’un seigneur mariait sa fille, il lui donnait pour présent de noces
un certain nombre d’esclaves utiles qui la suivaient dans un pays éloigné,
enchaînés sur ses chariots de peur qu’ils ne s’échappassent [4372] . La majesté des
lois romaines protégeait la liberté du citoyen contre les effets du malheur et
de son propre désespoir ; mais les sujets des rois mérovingiens pouvaient
vendre leur liberté personnelle ; les exemples de cette aliénation étaient
communs et habituels, et l’acte par lequel se consommait ce suicide légal, est
énoncé dans les termes les plus affligeants et les plus honteux pour la dignité
de la nature humaine [4373] .
L’exemple des pauvres qui, pour obtenir le soutien de leur vie, sacrifiaient ce
que la vie offre de plus précieux, fut insensiblement imité par les faibles et
par les dévots. Dans les temps de troubles, ils couraient lâchement s’enfermer
dans la forteresse d’un chef puissant, ou autour de la châsse de quelque saint
révéré. Les patrons spirituels ou temporel recevaient leur soumission, et une
transaction précipitée fixait irrévocablement leur condition et celle de leur
dernière postérité, depuis le règne de Clovis, les lois et les mœurs de la
Gaule tendirent, durant cinq siècles consécutifs, à étendre la servitude
personnelle et à en assurer la durée. Le temps et la violence effacèrent
presque entièrement tous les rangs intermédiaires de la société, et ne
laissèrent entre le noble et l’esclave qu’un espace rempli par un petit nombre
d’hommes obscurs. L’orgueil et les préjugés ont converti cette division
arbitraire et peu ancienne en une distinction nationale établie universellement
par les armes et par les lois des Mérovingiens. Les nobles, qui prétendaient, à
tort ou à raison, tirer leur origine des Francs indépendants et victorieux
usèrent et abusèrent de l’incontestable droit de la conquête sur une foule
d’esclaves et de plébéiens auxquels ils imputaient l’ignominie imaginaire d’une
extraction romaine ou gauloise.
    L’exemple particulier d’une province, d’un diocèse ou d’une
famille sénatoriale, pourra donner une idée de l’état général et des
révolutions de la France, qu’on appela ainsi du nom de ses conquérants.
L’Auvergne avait

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