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Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Titel: Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Émile Bréhier
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’ âme. C ’ est l ’ époque du développement du culte de la déesse Tyché, qui remplaçait tout le panthéon par une sorte de force capricieuse et impersonnelle  ; Bion avait pu l ’ apprendre de son maître péripatéticien Théophraste, qui, avant Straton disait en son Callisthène que tout était régi par le hasard. Vitam regit fortuna p.369 non sapientia , traduit Cicéron  [512] ; et les Stoïciens consacraient à la réfutation de cette pensée désenchantée des traités dont celui de Plutarque Sur la Fortune nous a laissé l ’ écho  ; il y montre comment la vertu maîtresse et caractéristique de l ’ homme, la prudence, implique que tout n ’ est pas régi par le hasard et que, si, dans les arts inférieurs, tout le monde admet que la prudence est nécessaire, il faudra l ’ admettre a fortiori dans les questions plus importantes qui se rapportent au bonheur  [513] .
    Avec une pareille doctrine, si doctrine il y a, la seule méthode est non pas d ’ apporter des preuves mais de suggérer une attitude ou un état d ’ esprit  ; pour montrer par exemple qu ’ il ne faut pas se fier au plaisir ni voir en lui une fin, Bion reprendra le thème de Cratès et d ’ Hégésias  : peignant les âges de la vie, il y montrera que les souffrances y dépassent les plaisirs, avec toutes les gênes dans lesquelles vit l ’ enfant, les soucis qui accablent l ’ âge mûr, les regrets qui consument la vieillesse et la moitié de la vie passée dans l ’ inconscience du sommeil  [514] . Voulant montrer comment les choses ne peuvent nous atteindre, il fera prendre la parole à la Pauvreté qui développera l ’ idéal d ’ une vie frugale saine et heureuse, un repas de figues et d ’ eau fraîche, un lit de feuilles  ; la Richesse montrera en revanche tout ce qu ’ elle donne à l ’ homme  :«  La terre elle-même ne produit pas spontanément et sans mon concours  ; je donne l ’ élan à toute chose.  » S ’ agit-il de consoler de la mort d ’ un ami  :«  Ton ami est mort, c ’ est qu ’ il est né aussi. — Oui, mais il ne sera plus. — Il y a dix mille ans il n ’ était pas non plus, ni à l ’ époque de la guerre de Troie, ni au temps de tes grands-parents  [515] .  »
    Cette diatribe, qui concentrait en elle tant de thèmes auparavant dispersés, eut un succès immense  ; elle crée à la philosophie un nouveau style qui la rend attrayante comme un développement de rhéteur  ; par l ’ image de la Tyché, elle se p.370 débarrasse de toute doctrine et devient ainsi populaire. Prête aussi à s ’ unir à toute doctrine, puisqu ’ elle prêche en somme la même impassibilité, le même détachement que Stoïciens et Épicuriens ne croient pouvoir acquérir qu ’ au prix d ’ une physique ou d ’ une théologie, elle donnera naissance à tous ces airs de bravoure de philosophie populaire que l ’ on trouve chez le poète Horace ou Lucien, ou bien insérés dans un tissu doctrinal comme chez Lucrèce ou chez Philon d ’ Alexandrie, chez les Stoïciens de l ’ empire, Musonius, Sénèque et Épictète et jusque chez Plotin  ; cette dernière fleur du socratisme n ’ est-elle pas traditionnellement considérée comme le summum   de la sagesse antique  ?
     
    III. — PYRRHON
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    Chez les hommes dont nous venons de parler, nous voyons une attitude morale assez nette et ferme s ’ accompagnant d ’ une indifférence à peu près complète envers toute espèce de dogmes. Cela peut nous aider à retrouver la pensée de Pyrrhon d ’ Élée (365-275), à peu près contemporain de Zénon et d ’ Épicure  ; pensée difficile à atteindre  : comme Socrate, il n ’ a rien écrit  ; comme lui, il est le point de départ d ’ une longue lignée de philosophes, qui, de génération en génération, lui attribuent leurs propres découvertes  ; comme lui enfin, il est devenu un héros légendaire. Aussi se demande-t-on ce qu ’ il faut lui attribuer dans les arguments des sceptiques contre la valeur de la connaissance, et V e qu ’ il faut croire des anecdotes par trop démonstrative de son indifférence qu’Antigone de Caryste raconte dans son ouvrage Sur Pyrrhon .
    Il semble bien qu ’ il ne faut rien lui attribuer de cette argumentation sceptique technique contre la valeur de la connaissance que nous verrons plus tard se développer avec Énésidème et Sextus. Si l ’ on s ’ en tient aux données de ses disciples immédiats, Nausiphane le

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