Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814
multitude, et établir son gouvernement. Châlier, fanatique imitateur de Marat, était à la tête des Jacobins, des Sans-culottes, et de la municipalité de Lyon. Son audace s’était accrue après les massacres de septembre et le 21 janvier. Cependant rien n’avait été décidé encore entre la classe inférieure républicaine et la classe moyenne royaliste, dont l’une avait le siège de son pouvoir à la municipalité, l’autre dans les sections. Mais les débats étant devenus plus grands vers la fin de mai, on se battit, et les sections l’emportèrent. La municipalité fut assiégée et prise d’assaut. Châlier, après s’être évadé, fut pris, et au bout de quelque temps exécuté. Les sectionnaires n’osant pas encore secouer le joug de la convention, s’excusèrent auprès d’elle de la nécessité où les Jacobins et les municipaux les avaient mis de les combattre. La convention, qui ne pouvait se sauver qu’à force d’audace, et qui en cédant était perdue, ne voulut rien entendre. Sur ces entrefaites, les événements de juin survinrent, l’insurrection du Calvados fut connue, et les Lyonnais, encouragés, ne craignirent plus de lever l’étendard de la révolte. Ils mirent leur ville en état de défense : ils élevèrent des fortifications, ils formèrent une armée de vingt mille hommes, ils reçurent les émigrés au milieu d’eux, donnèrent le commandement de leurs forces au royaliste Précy et au marquis de Virieux, et concertèrent leurs opérations avec le roi de Sardaigne.
La révolte de Lyon était d’autant plus à craindre pour la convention, que cette ville, placée au centre de la France, s’appuyait sur le midi, qui prenait les armes ; tandis que tout l’ouest s’ébranlait aussi. À Marseille, la nouvelle du 31 mai avait soulevé les partisans des Girondins : Rebecqui s’y était rendu en toute hâte. Les sections avaient été réunies ; on avait mis hors la loi les membres du tribunal révolutionnaire, arrêté les deux représentants Baux et Autiboul, et levé une armée de dix mille hommes pour s’avancer contre Paris. Ces mesures étaient l’œuvre des royalistes, qui là comme ailleurs, n’attendant qu’une occasion pour relever leur parti, s’étaient présentés d’abord avec les apparences républicaines, et avaient fini par agir en leur propre nom. Ils s’étaient emparés des sections, et le mouvement ne s’opérait plus en faveur des Girondins, mais pour les contre-révolutionnaires. Dès qu’on est en révolte, le parti dont l’opinion est la plus extrême et le but le plus précis, l’emporte sur ses associés. En voyant la nouvelle tournure de l’insurrection, Rebecqui s’était jeté de désespoir dans le port de Marseille. Les insurgés prirent la route de Lyon, leur exemple fut rapidement imité par Toulon, Nismes, Montauban, et les principales villes du midi. Dans le Calvados, l’insurrection avait eu le même caractère de royalisme, depuis que le marquis de Puisaye, à la tête de quelques troupes, s’était introduit dans les rangs girondins. Les villes de Bordeaux, de Nantes, de Brest, de Lorient, étaient favorables aux proscrits du 2 juin, et quelques-unes se déclarèrent pour eux ; mais elles ne leur furent pas d’un grand secours, parce qu’elles furent retenues par le parti jacobin, ou par la nécessité de combattre les royalistes de l’ouest.
Ceux-ci, pendant cette levée presque générale des départements, étendaient leurs entreprises. Après leurs premières victoires, les Vendéens s’étaient emparés de Bressuire, d’Argenton, de Thouars. Entièrement maîtres de leur propre pays, ils projetèrent d’en occuper les barrières, de s’ouvrir le chemin de la France révolutionnaire, ainsi que des communications avec l’Angleterre. Le 6 juin, l’armée vendéenne, composée de quarante mille hommes, sous Cathelineau, Lescure, Stofflet, Larochejacquelin, marcha sur Saumur, qu’elle enleva de vive force. Elle se disposa à attaquer et à prendre Nantes, pour assurer la possession de son propre pays, et disposer du cours de la Loire. Cathelineau, à la tête des troupes vendéennes, partit de Saumur après y avoir laissé garnison, prit Angers, passa la Loire, feignit de se diriger sur Tours et le Mans, et se jeta ensuite vivement du côté de Nantes, qu’il attaqua par la rive droite, tandis que Charette devait l’attaquer par la rive gauche. Tout semblait se réunir contre la
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