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Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle

Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle

Titel: Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Ferro
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étaient cinquante, nous deux mille et on n’avait pas peur de leurs canons. Dans la brousse nous étions invincibles, ils étaient des chasseurs incapables et avaient la fièvre dès qu’il faisait humide… Mais comme l’un de ces hommes avait pris une femme, puis une autre, les aborigènes les plus âgés s’organisèrent pour le tuer, on lui coupa la gorge avec une hache… Les hommes blancs mirent sur pied une immense battue, trouvèrent les aborigènes et les tuèrent tous »…
    Ce témoignage d’enfant (1975) contient bien sûr sa part de mythe, mais aussi sa part de vérité. Et notamment sur cette « paix » qui fut bien conclue au large de Botany Bay, en ce temps où les soldats surveillaient les convicts en train de construire routes et villages. Une illustration, sorte de bande dessinée à épisodes, datée de 1828, et qui figure au musée de Hobart, expose ce que fut la politique du gouverneur Arthur : 1. Une nourrice blanche allaite un enfant noir ; une nourrice noire, un enfant blanc ; 2. En grand uniforme rouge, blanc, bleu, le général reçoit une délégation d’aborigènes ; on se serre la main ; 3. Un aborigène tue un civil ; 4. Les soldats le pendent ; 5. Un civil tire sur un aborigène ; 6. Des soldats le pendent… Scènes en partie illusoires, certes, mais qui évoquent le moment, assez bref, où l’extermination pure et simple avait été écartée.
    A l’arrivée du gouverneur Philips, en 1797, les aborigènes pouvaient être de 300 000 à 400 000 ; ils étaient dix fois moins un siècle plus tard, refoulés vers les territoires du Nord et de l’Ouest. L’extermination avait bien eu lieu, et deux données particulières en rendent compte — indépendamment de la cruauté et du racisme : les premiers gouverneurs ne cherchèrent pas à « civiliser » les aborigènes aux fins de les faire travailler — car ils devaient faire travailler les convicts ; en outre, l’apport d’esclaves noirsvenus d’ailleurs était lui-même interdit en Australie… De ce fait, les aborigènes étaient virtuellement « inutiles », et il était « inutile » d’essayer de les assimiler… « L’apprivoisement » ne se fit que bien plus tard…
    Il faut attendre les années 1980 pour que vienne le temps du remords — avec sa cohorte de réhabilitations : musées, enquêtes orales, Centre d’études aborigènes à Canberra, etc. La mode aidant — et l’imitation de l’Amérique —, comme aux États-Unis durant les années soixante-dix où il était de bon ton de se découvrir du sang indien, aujourd’hui, à Sydney, on se découvre du sang « abo ». De fait, il y a environ 50 000 métis d’aborigènes en Australie.
    Terre de convicts à ses débuts, l’Australie ne l’est pas demeurée, puisque la colonisation pénale fut très rapidement contestée, grâce aux écrits, entre autres, d’Edward Gibbon Wakefield. Dans A Letter from Sydney (1830), il proposait la substitution d’une colonisation systématique à l’anarchie de la situation présente, avec vente de concessions, émigration subventionnée et dirigée, etc. C’est sous son influence que se fondent les settlements organisés d’abord par la New-Zealand Company , puis par le South Australian Committee : Wakefield est un disciple d’Adam Smith qui part de l’idée que la terre, le capital et le travail constituent les trois facteurs fondamentaux de la production et qu’il faut maintenir entre eux un équilibre raisonnable. Or, en Australie, il y avait trop de terres, pas de capitaux, la main-d’œuvre était difficile, qui disparaissait à peine arrivée, a fortiori dans le cas de convicts dès qu’ils étaient sans surveillance. Toute l’Angleterre se gaussait du cas de Robert Peel qui avait obtenu une concession de 300 000 acres en Australie occidentale, avait amené avec lui 300 personnes, mais qui, six mois après son arrivée, en était réduit à chercher son eau, à faire son lit, car tout son monde s’était évaporé… D’autres avaient connu le même sort, chacun ayant voulu acquérir trop de terres, pour lui et les siens, et étant incapable d’en tirer profit. L’idée de Wakefield fut donc de faire vendre la terre à des colons de la métropole, mais à un juste prix, et de subventionner le transport des volontaires, ainsi que l’établissement de ceuxqui, sur place, eussent été trop pauvres pour acquérir ces terres, les fils de convicts notamment (A.

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