Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle

Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle

Titel: Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Ferro
Vom Netzwerk:
se retrouve ainsi dans une situation pré- et non postcoloniale, les Russes jouant à nouveau les arbitres dans les conflits qui éclatent à leurs frontières.
    Cinquième proposition . Les observations faites à propos des Républiques musulmanes, ou caucasiennes, prennent une signification particulière si on observe qu’en Sibérie russe on rencontre des phénomènes de même nature. Au Congrès sibérien qui s’est tenu à Krasnoïarsk au printemps 1992, un délégué déclara « que ce n’est pas de la Russie qu’on se séparera, mais de son gouvernement » ; un autre fit valoir que le congrès était considéré comme un moyen de pression sur Moscou. Ces deux traits sont caractéristiques : d’une part, les chefs de l’administration, représentants de Moscou, étaient absents du Congrès — signe d’un conflit grandissant entre le pouvoir central et les institutions représentatives, — surtout, c’est par crainte d’être associées aux « séparatistes » que les Républiques nationales de Sibérie (Républiques de Touva, Iakoutie-Sakha, Bouriatie, etc.) ont expliqué et justifié leur absence. Les Evenkes ont fait valoir qu’ils visaient à passer de l’autonomie territoriale à l’autonomie nationale, mais dans un cadre russe, pas sibérien.
    Confrontées à la deuxième proposition, ces données font clairement apparaître que, dans l’esprit des revendications émises, le problème national n’a pas nécessairement une composante ethnique et ne se résout pas par une arrière-pensée toujours séparatiste. Chez les Baltes, la volonté séparatiste a été le moteur essentiel des Lituaniens, par exemple ; même si, aux débuts de la perestroïka, les Estoniens, pourtant violemment antirusses, n’osaient pas la formuler, très rapidement et globalement, cette volonté séparatiste l’a emporté chez tous les Baltes, les Géorgiens, les Ukrainiens, voire les Arméniens, etc. — bref, chez les chrétiens —, alors qu’ailleurs le trait est moins net. D’autre part, au sein de la Russie, la République des Tatars se veut souveraine, c’est-à-dire que ses dirigeants, Tatars ou Russes, veulent pouvoir disposer de leurs ressources à leur guise ; et en Sibérie la même revendication émane à la fois des Russes et des Iakoutes ou des Bouriates.
    Ainsi, au sein de la CEI, c’est bien le problème de l’hostilité à la concentration des pouvoirs et le problème du centralisme au niveau des décisions qui constituent le paramètre commun à toutes les situations dites nationales ou coloniales ; aujourd’hui, d’une certaine façon, on redécouvre le vieil antagonisme qui a toujours existé entre, d’une part, le pouvoir central, avec son administration, confondus aux temps du Parti communiste, et, d’autre part, les organes représentatifs, qu’il s’agisse des zemstvos avant 1917, ou des soviets, après. Or, ni les zemstvos, ni les soviets n’ont jamais pu dépasser les capacités d’une administration locale réduite, quelle que soit la compétence des élus (zemstvos), ou leur réelle représentativité (soviets). Comme on le sait, l’histoire de l’URSS peut s’expliquer, depuis 1917, par une absorption des pouvoirs d’en bas, expression de la démocratie directe, par le pouvoir d’en haut, chantre et adepte du centralisme démocratique. En 1988, Gorbatchev a voulu régénérer les soviets, c’est-à-dire restituer au représentatif ses droits et capacités. En 1993-1994, Eltsine les a supprimés. Que signifie cette contradiction ?
    Le vrai problème est qu’en haut, comme en bas, on ignore le partage des pouvoirs. Ainsi Eltsine a entrepris de désigner des représentants du président dans les territoires et régions — ou namestnik , l’émissaire —, et le gouverneur, nommé lui aussi, émane de Moscou. De sorte qu’il n’existe pas encore vraiment d’administration locale autonome. Sobtchak, maire de Saint-Pétersbourg, n’hésite pas à dire que ces soviets sont inutiles parce que impuissants. « De fait, leur seule capacité est de torpiller les décisions. » Pour schématiser, on peut dire qu’en 1917 les soviets locaux étaient composés d’illettrés ou incultes, mais que les élus avaient tout le pouvoir ; aujourd’hui, ils sont composés de gens instruits et compétents, mais sans capacité juridique ou autre, sinon de CONTRER le pouvoir.
    Ainsi, la base élue rêve de pouvoir légiférer, exécuter, juger — ignorant, elle

Weitere Kostenlose Bücher