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Histoire du Consulat et de l'Empire

Histoire du Consulat et de l'Empire

Titel: Histoire du Consulat et de l'Empire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques-Olivier Boudon
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ainsi aux magistrats une marge d'appréciation. Cependant, la sanction demeure la base du dispositif judiciaire. Le Code pénal est une arme 214
     

    LES FONDEMENTS DU RÉGIME
    de dissuasion, destinée à assurer le maintien de l'ordre social et la défense de la société.
    La publication du Code d'instruction criminelle et du Code pénal conduit enfin à des réformes de la justice pénale introduites en France en 1810-1811 . C'est alors que les tribunaux criminels installés au niveau du département se transforment en cours d'assises. La mutation dépasse le changement de nom. Ces tribunaux ne siègent plus en permanence et fonctionnent désormais avec des magistrats temporaires. La suppression du jury d'accusation oblige aussi à transférer sa mission à une nouvelle section des cours d'appel, la chambre des mises en accusation. Enfin, les jurys de jugement sont désormais recrutés par les préfets parmi les notables, ce qui limite le caractère populaire de cette institution. C'est, après la fin de l'élection des juges, un pas de plus vers la suppression du pouvoir judiciaire conféré au peuple par la Révolution. Plus généralement, la réforme de la justice donne satisfaction aux hommes de loi dont la fonction spécifique est reconnue.
    Napoléon a ainsi donné naissance à un corps de magistrats nommés et non plus élus comme à l'époque de la Révolution. Agés de plus de trente ans, ces magistrats exerçaient déjà des fonctions judiciaires sous l'Ancien Régime et la Révolution. La plupart sont du reste nommés à nouveau dans leur région d'origine. Leur carrière est en principe assurée par l'inamovibilité, puisqu'elle ne dépend plus de l'élection. Les premiers recrutements opérés ne satisfirent pas pleinement le gouvernement qui revint sur la notion d'inamovibilité en faisant voter en 1807 un sénatusconsulte permettant d'épurer le corps des magistrats. Le régime put ainsi se débarrasser de juges dont les sentiments politiques paraissaient trop tièdes, mais aussi de piètres magistrats. L'épuration s'accompagna en effet d'une réforme faisant obligation de posséder une licence en droit pour devenir juge. De plus, en 1810, l'âge minimum pour entrer dans la magistrature est abaissé à vingt et un ans. Il n'empêche, la profession, mal rémunérée, peine à s'imposer, d'autant plus que l'épuration de 1808 fait peser un doute sur la réalité de leur inamovibilité et ôte aux magistrats une fraction de leur indépendance.
    L'Empire organise aussi les professions d'avoué, de notaires, d'huissier et, avec plus de réticences, d'avocat. Le corps des avocats renaît en effet après de longues hésitations, car Napoléon redoute leur puissance. Il voit en eux des adversaires potentiels à son autorité, comme il l'énonce devant le Conseil d'État en 1804 : « On les trouve toujours prêts à empiéter sur le terrain de la politique ; ils attaquent en toute occasion la loi du divorce et celle des biens nationaux ; c'est ainsi qu'on sape toutes les bases du gouvernement tu. »
    Napoléon a pris soin de choisir deux exemples qui montrent son souci de préserver les acquis de la Révolution face à des avocats présentés comme nostalgiques de l'Ancien Régime. L'Empereur se 215
     

    LA NAISSANCE D'UNE MONARCHIE (1804-1809)
    méfie non seulement de l'action individuelle des avocats, mais aussi de l'influence qu'ils pourraient avoir en tant que corps, d'où son extrême réticence à permettre le rétablissement de l'ordre des avocats et l'élection du bâtonnier : « Ce serait blesser les règles d'une bonne police que de souffrir que, par exemple, au milieu d'une ville comme Paris, le chef de trois ou quatre cents avocats, qui ont l'habitude de la parole et qui aiment à s'en servir, pût les constituer en assemblée et même en assemblée permanente et qui irait jusqu'à s'occuper des affaires de l'État 1 1 . » Napoléon craint donc la résurgence des parlements d'Ancien Régime, rendus responsables de la chute de la monarchie. Il mesure le poids que peuvent acquérir ces avocats dans la vie publique. Le barreau n'est rétabli qu'en 1810, la nomination du bâtonnier étant effectuée par le procureur général, sur proposition des avocats les plus anciens ; les réunions du barreau sont extrêmement limitées. Toutefois, la lente réorganisation du corps des avocats montre que Napoléon a compris leur utilité dans le système judiciaire mis en place au même moment et dont ils

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