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Histoire du Japon

Titel: Histoire du Japon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Georges Sansom
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dans le vin. »
    Quand les invités s’en allèrent enfin, les dames, épuisées, s’effondrèrent au premier endroit qui leur parut se prêter au sommeil.
    Le lendemain, Michigana convoqua Yorimichi et le questionna en détail sur les festivités. Lorsqu’il apprit que Yoshiko avait enfreint son règlement selon lequel les dames du palais ne devaient pas porter plus de six jupes à la fois, il reprocha vivement à Yorimichi de ne pas l’avoir réprimandée.
    On comprendra à ce genre de récits combien la vie de ces personnes royales et nobles était faite de parade, et quelle importance elles pouvaient attacher aux détails du maintien et de l’habillement. Précisons encore que la plupart de leurs divertissements comprenaient un élément religieux qui, du fait de la beauté des vêtements de cérémonies comme de la solennité du rite célébré, y ajoutait une touche impressionnante. Les sources historiques de l’époque s’entendent toutes à montrer que les exercices religieux avaient généralement un double but, la dévotion pieuse combinée au plaisir esthétique. Il y avait des moines à succès, connus pour leur belle mine aussi bien que pour leurs sermons, et il y avait des hommes d’Église en vogue bien reçus à la cour.
    Si, dans les palais et sanctuaires royaux, le cérémonial était plutôt simple, les grandes propriétés des nobles Fujiwara – leurs palais, résidences, villas, sanctuaires et chapelles tutélaires – étaient très belles et très coûteuses, et des festivités comme celles qui viennent d’être décrites, les nombreuses célébrations religieuses et contributions à l’Église, devaient représenter des frais énormes. Mais ces dépenses étaient nécessaires au maintien de leur pouvoir, grâce auquel ils étaient à même de tirer des ressources importantes un peu partout dans le pays en acquérant des droits seigneuriaux sur les terres « confiées » à leur protection. Seuls les fonctionnaires provinciaux particulièrement courageux osaient mettre en question l’immunité fiscale à laquelle prétendaient les tenanciers d’un propriétaire foncier noble aussi puissant que pouvait l’être un Fujiwara soutenu par l’ensemble de son clan.
    Il y avait donc un étroit rapport entre les dépenses des régents Fujiwara et la faillite des lois foncières. Ce n’était pas un rapport de cause à effet, car les deux phénomènes traduisaient l’échec du système fiscal adopté des siècles plut tôt. Les régents, ou du moins les plus capables d’entre eux, et Michinaga en particulier, s’efforcèrent d’assurer à la capitale ordre et sécurité, et, dans ce domaine, obtinrent quelque succès. Mais dans les provinces, ils étaient voués à l’échec, car leurs intérêts personnels étaient incompatibles avec une juste administration des affaires campagnardes. Ainsi, la noblesse provinciale ayant une conscience toujours plus aiguë de sa propre force, la puissance des Fujiwara se mit à décliner dans une sorte de splendeur automnale. Cependant, la métropole voyait fleurir une société vouée à l’élégance, heureusement isolée des heurts de la vie ordinaire.
    Malgré tous ses défauts, c’était une société vouée à la poursuite de la beauté, et, du fait qu’elle est sans équivalent véritable dans les autres civilisations, elle mérite qu’on lui consacre un chapitre à part.

CHAPITRE IX
    La règle du goût
    Le trait le plus frappant de la société aristocratique de Heian est sa qualité esthétique. Il est vrai qu’elle se composait d’un petit nombre de gens particulièrement favorisés, mais il est d’autant plus remarquable que, même dans ses folies les plus vaines, elle ait suivi des considérations de raffinement et obéi à une règle du goût. C’est à la période des régents Fujiwara que se formèrent parmi les hommes et les femmes de la classe supérieure jouissant d’une situation privilégiée certaines normes de comportement personnel et certains canons de jugement esthétique qui sont la source, ou peut-être vaut-il mieux dire le fondement, de la vie sociale japonaise telle qu’elle évolua durant les siècles suivants. On peut sans exagération suggérer qu’on retrouve certaines traces des manières de l’époque de Heian bien après l’effondrement de ses institutions politiques, et jusque dans divers domaines de la vie actuelle. Si l’on veut découvrir les origines de ce comportement, ce qu’étaient les

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