Histoire du Japon
les nomma à de hautes fonctions. Konishi Yukinaga fut un bon général, qui accomplit de grandes choses en Corée et osa même parfois s’opposer à Hideyoshi. Parmi les autres généraux, les chrétiens étaient rares, mais beaucoup avaient des parents convertis ou mettaient leur confiance dans des subordonnés qui étaient des croyants convaincus.
Il est bien naturel que les Occidentaux accordent une attention particulière à l’expansion du christianisme au Japon, mais d’un point de vue strictement historique l’activité des missionnaires ne constitue qu’un épisode dans l’histoire du pays. Qu’il s’agisse d’un épisode important, personne ne le niera, et l’étonnant succès des pères jésuites est d’un indéniable intérêt sur le plan de l’adaptation culturelle. Toutefois, on aurait du mal à prouver que la propagande chrétienne au XVIe siècle exerça une influence importante et durable sur l’évolution sociopolitique du Japon.
Le nombre total des chrétiens japonais à la fin du XVIe siècle – estimé par les dirigeants jésuites à près de 300000 – constitue un chiffre remarquable, témoignant du zèle patient déployé pendant des années par les pères et leurs auxiliaires. Il faut également dire qu’il fait honneur aux chrétiens japonais, qui, malgré leur loyauté traditionnelle, demeurèrent fidèles à la foi lorsque le danger menaçait.
Que ces résultats aient été obtenus sous le règne de deux despotes, Nobunaga et Hideyoshi, parle en faveur du bon sens de ceux-ci. Il convient encore d’ajouter que le succès de l’enseignement chrétien s’expliquait par la dégénérescence des grandes sectes bouddhiques, et il est important de comprendre que la liberté dont bénéficièrent les jésuites était en partie due au désir des dirigeants japonais de maintenir et d’encourager le commerce d’importation qui se trouvait aux mains des capitaines de marine et des négociants portugais.
Les Indes : On a déjà décrit l’accueil que fit Hideyoshi à une ambassade du vice-roi portugais des Indes en 1590, et l’on se rappellera qu’il traita Valignano et ses compagnons de façon simple et amicale, avertissant Valignano de surveiller ses partisans jésuites de sorte qu’il ne soit pas nécessaire de recourir à des mesures de force. Il semble que cette mission, qui était de toute évidence une protestation diplomatique contre la manière dont il traitait les missionnaires, n’eut pas l’heur de lui plaire ; il garda néanmoins sa bonne humeur, et il accepta même avec Maeda que les prêtres venus avec Valignano restent à Nagasaki.
En 1591, il adressa au vice-roi une lettre dans laquelle, après les compliments d’usage, il expose ses vues sur la nature de l’État japonais et sur ses propres fonctions en tant que dirigeant. Le pays, dit-il, consiste en plus de soixante régions ou royaumes distincts, qui, du fait de leur agitation, n’ont guère connu de paix depuis des années. En s’exerçant à acquérir les vertus nécessaires, il est parvenu à les soumettre tous à ses lois et à gouverner le pays dans la paix. Les vertus dont il parle sont la bienveillance, la prudence et la force. Grâce à ces qualités, il a pacifié les guerriers et traité les paysans avec compassion. Ce système de récompenses et de punitions lui a permis d’établir la sécurité et d’unifier le pays. Désormais, on vient de l’étranger lui rendre hommage.
Il a l’intention de soumettre la Chine à brève échéance, et il sera alors plus proche de l’Inde, avec qui les contacts seront plus faciles. A propos de son attitude à l’égard des jésuites, il dit que le Japon est « le pays des dieux », et que tout enseignement contraire à ses anciennes croyances s’oppose à la stabilité de son gouvernement et au bonheur de son peuple. Il termine en affirmant qu’il est favorable au commerce et qu’il garantira la sécurité des navires et marchands portugais apportant au Japon des produits étrangers.
Il n’est pas certain que le texte cité dans les récits contemporains soit identique au message envoyé à Goa 201 . On suppose que le brouillon qui fut montré à Valignanc renfermait des passages que celui-ci conseilla de changer. On prétend que Maeda Geni persuada Hideyoshi d’accepter certaines modifications et d’ajouter une clause qui autorisait dix jésuites à résider à Nagasaki.
Hideyoshi ne prit certainement pas la peine de cacher ses
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