Histoire du Japon
avec une escorte la porte de Sakurada menant au château d’Edo.
Après la mort d’Ii, Satsuma, approuvé par la cour, continua la lutte contre le bakufu, et les attaques contre les étrangers devinrent plus fréquentes et plus graves. Le secrétaire de la légation américaine fut victime d’une agression à Edo, et, en 1860, la légation britannique fut attaquée par des samurai de Mito.
La faiblesse et la mauvaise foi du bakufu éclatèrent lorsqu’on découvrit, après la mort d’Ii, que, ne sachant sans doute plus comment se tirer d’embarras, il avait accepté de fixer avec la cour une date pour expulser les étrangers. A ce moment-là – juin 1862 –, une mission diplomatique se trouvait à Londres pour demander au gouvernement britannique la remise à plus tard de l’ouverture de nouveaux ports du fait des activités anti étrangères au Japon. Ce même été, sur l’ordre de la cour, le shôgun accepta de se rendre à Kyoto pour discuter avec les nobles du futur gouvernement du Japon et de la manière d’expulser les barbares.
Ce voyage, qui eut lieu en mars 1863, était un nouvel acte de soumission, et totalement sans précédent dans les relations entre le shôgun et le Trône. Jusque-là, aucun shôgun ne s’était rendu à Kyoto depuis la démonstration de force de Iemitsu et de ses 300000 hommes. Le bakufu avait toujours donné des ordres à la cour par l’intermédiaire de ses représentants. Maintenant, peu après l’arrivée du shôgun, la cour fit savoir au bakufu que tous les étrangers devaient être expulsés et tous les ports fermés ; mais le bakufu plaida qu’un tel acte était prématuré et dangereux. A contrecœur, la cour retira son ordre, ce qui irrita évidemment le parti xénophobe. Les agressions se multiplièrent. Les membres des missions diplomatiques étrangères et les résidents étrangers en général vivaient dans un constant danger, et un Anglais qui chevauchait sur la grand-route fut assassiné par un partisan de Satsuma près de Yokohama. Incapable d’obtenir satisfaction du bakufu du fait de l’entêtement de Satsuma, le gouvernement britannique ordonna le bombardement de Kagoshima par ses vaisseaux de guerre en août 1863.
Avant de finir le récit des dernières luttes du bakufu, il convient d’étudier ici les raisons de son déclin rapide.
La première d’entre elles fut l’hostilité croissante de la cour, des grands clans de l’Ouest et des samurai dans le besoin. Mais il y avait peut-être encore plus important : le mécontentement général de la population civile, et en particulier des paysans et des marchands. Les riches marchands d’Edo et d’Osaka, comme Mitsui et Kônoike, surveillaient de près les tendances politiques, et ils ne furent par longs à noter les signes de faiblesses que donnait le bakufu, et à améliorer leurs relations avec Satsuma, Chöshü et autres daimyô prospères. Mais ces changements de politique, pour importants qu’ils fussent, furent lents à s’opérer. La croissance du mécontentement parmi les paysans fut beaucoup plus rapide.
Durant la dernière décennie du bakufu, il y eut de constantes émeutes de paysans contre les propriétaires. Ce n’était pas des attaques organisées contre le bakufu, mais elles renforcèrent l’opposition au gouvernement féodal non seulement parmi les paysans mais également parmi les samurai de rang inférieur. Contrairement à ce qu’on prétend parfois, on ne peut pourtant pas dire que ces soulèvements avaient des objectifs politiques, ni qu’ils eurent des effets politiques directs à part souligner le sentiment antiféodal déjà existant.
L’un des plus significatifs eut lieu en 1853, où les paysans de quatre-vingt-dix villages du domaine de Nambu, soit en tout 15000 hommes, déferlèrent à travers la campagne en proclamant une doctrine d’égalité. En 1859, il y eut une insurrection similaire au Shinshù, où des bandes de paysans de nombreux villages déclarèrent qu’un appel à la force était désormais la loi du pays. Mais il s’agissait toujours d’explosions spontanées, sans organisation ni continuité.
La position du bakufu s’affaiblissait de jour en jour, et il perdit le contrôle des vassaux lorsqu’il assouplit la règle de présence alternée. Les grands daimyô disparurent alors dans leurs fiefs, et les deux plus puissants daimyô tozama, Satsuma et Chöshü, entrèrent en révolte déclarée. En juin 1863, les batteries côtières
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