Histoire du Japon
laïcs et religieux – notamment des représentants de la secte Tendai –, se rendirent au Japon. En 848, par exemple, un bateau y emmena un voyageur dénommé Zhang Yuxin et trente autres Chinois. Dans l’ensemble, les allées et venues étaient désormais plus nombreuses, car les conditions dans lesquelles s’effectuait la traversée s’étaient beaucoup améliorées depuis le milieu du ixe siècle, et des navires marchands en provenance de Chine faisaient maintenant de fréquents voyages au Japon 12 . Les bateaux construits en Chine étaient de meilleure qualité. La navigation était devenue plus sûre, en partie parce qu’on avait appris à connaître les vents saisonniers, mais aussi parce que les rapports avec le Silla permettaient à présent aux Japonais de bénéficier des navires coréens, qui étaient mieux construits et mieux gouvernés que les leurs et se rendaient régulièrement en Chine au profit des marchands du Silla installés là-bas. Les Japonais reconnaissaient la supériorité de la construction navale coréenne, ainsi que nous l’apprennent le choix de Tsunetsugu et les ordres, envoyés par la cour au Kyüshü en 839, de construire un « bateau de Silla » qui pût résister aux tempêtes.
Il est clair que les Japonais accusaient un certain retard dans le domaine de la science maritime. Les navigateurs expérimentés s’accordent à reconnaître qu’il n’y a pas de régularité dans la direction des vents qui soufflent au large du Japon, et cela pourrait expliquer que, incapables de compter sur des vents « dominants » connus, les bateaux qui traversaient directement du Kyùshû vers la Chine centrale touchaient terre dans des endroits très différents, entre l’estuaire du Yangzi et la côte du Fujian ou même les environs de Canton. Mais outre ces difficultés, il y avait un manque évident de technique dans la construction, le gréement et le pilotage des voiliers, ce qu’explique peut-être l’éloignement du gouvernement central par rapport à la mer. Enfin, le commerce extérieur n’avait qu’un intérêt secondaire dans une société agricole qui se préoccupait d’abord de mettre en valeur son propre sol, et les débuts de la construction navale au Japon semblent avoir répondu aux besoins d’un trafic côtier dans des eaux relativement abritées et des incursions de pirates plutôt que d’un commerce régulier.
Il est peut-être significatif que notre connaissance des conditions dans lesquelles se déroulaient au ixe siècle les voyages en Chine dépende en grande partie de l’œuvre d’un célèbre moine bouddhiste, Ennin (connu plus tard sous le nom de Jikaku Daishi), dont le Nittö gubö junreiki (Récit d’un pèlerinage en Chine à la recherche de la Sainte Loi ) fourmille de détails passionnants sur ses aventures, à partir de 838, année où il quitta le Japon avec l’ambassade de Tsunetsugu, jusqu’en 847, où il rentra chez lui après maintes pérégrinations et difficultés sur mer et sur terre.
CHAPITRE VIII
Les régents Fujiwara
Rivalités politiques – le trône et les clans , 794-967
Le développement d’une forme de gouvernement où le pouvoir souverain est exercé sur une base quasi héréditaire par les membres d’une grande famille agissant à titre de régent est caractéristique de l’évolution politique du Japon au cours des trois siècles en question. Il mérite donc de retenir notre attention en tant qu’aspect de l’histoire générale des institutions, et présente aussi beaucoup d’intérêt à cause de la nature de la société qui prit corps sous la domination des chefs successifs du clan Fujiwara.
Leur ascension fut progressive. Quoique les membres de la famille Fujiwara aient joui d’une influence certaine dès la construction de la nouvelle capitale, en 794, ils n’atteignirent une position vraiment prédominante au sein de l’État qu’une fois réglés les différends qui divisaient leur propre clan (qui comptait plusieurs branches), et après s’être débarrassés des rivaux en puissance que représentaient les chefs d’autres familles importantes, notamment les Kiyowara, les Tachibana, les Ki et les Miyoshi, qui pouvaient elles aussi se réclamer d’ancêtres éminents, et parfois même de liens avec l’empereur.
Le clan Fujiwara se divisait en quatre branches, fondées par les quatre fils de Fubito (659-720), issu du grand ministre Kamatari qui avait reçu le nom de Fujiwara en 669, l’année
Weitere Kostenlose Bücher