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Histoire du Japon

Titel: Histoire du Japon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Georges Sansom
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teintures – notamment le « beni » écarlate, une couleur végétale très coûteuse – fut promptement publié ; mais personne ne prit garde à cette restriction.
    L’intérêt de ces documents ne réside pas tellement dans les renseignements qu’ils donnent sur la situation économique – des registres plus neutres nous informent de façon précise sur les contributions, les prix, les revenus fonciers, l’argent, etc. – mais dans le conflit qu’ils traduisent entre deux visions de la vie : la vision aimable de la société courtisane, adepte du plaisir, et la vision sévère des graves docteurs confucéens, tournés vers le savoir et la frugalité.
    En outre, il est intéressant de noter que, à mesure que le gouvernement central est moins capable de maintenir l’ordre, le titulaire du trône, tout en demeurant la source de l’honneur, est de moins en moins le champion de la loi et la source de l’autorité armée. Il est considéré comme le protecteur du savoir, le gardien d’une tradition rituelle qui va s’amenuisant. Au cours du xe siècle, les souverains s’occupèrent avant tout de patronner de grandes entreprises littéraires, dont des compilations de lois et précédents (telles que les kyaku et shiki déjà mentionnés), des compilations historiques (notamment le Sandai jitsuroku, dernière des six chroniques nationales) et des anthologies, dont la plus célèbre est le Kokin wakashü, ou Recueil de poésies anciennes et nouvelles, deuxième des grands trésors du genre. Monument littéraire parmi les plus importants du Japon, il fut compilé à la demande du Trône par une commission comprenant Ki Tsurayuki, lui-même écrivain distingué, qui contribua à la traduction japonaise d’une préface (de Yakamochi) en chinois sur la nature de la poésie et le style de différents poètes. La version japonaise est aujourd’hui encore tenue pour un chef-d’œuvre.
    C’est en fait une période où la ville impériale connaît une intense vie culturelle ainsi qu’en témoigne une série de requêtes adressées au Trône par un lettré nommé Oe Masahira (952-1012). Issu d’une famille d’érudits distingués, ce fut le confucianiste le plus savant de son époque, et un poète d’un rare bonheur. Enfant prodige, après de brillantes études à l’université il passa les plus hauts examens et obtint un modeste emploi dans l’administration. Il donna à l’empereur des cours sur les classiques chinois et devint précepteur de l’héritier présomptif. Il fut tour à tour nommé chambellan (1010) et vice-gouverneur de plusieurs provinces. A sa mort, il avait atteint le grade le plus élevé du quatrième rang inférieur, honneur remarquable pour un homme de sa classe. En fait, il connut une carrière exceptionnelle pour un lettré qui n’était pas Fujiwara. Mais il n’était pas satisfait, comme en témoigne un des poèmes qu’il a laissés :
    Kawafune ni Dans le bateau sur la rivière
    Norite kokoro no Je me promène
    Yuku toki wa L’esprit tranquille.
    Shizumeru mi to mo Qui penserait de moi
    Omœnu ka na  ? Que mes espérances ont sombré ?
    Ses fréquentes requêtes éclairent les déceptions et les ambitions contrariées auxquelles ces vers font allusion. Il y cite des exemples d’érudits japonais et chinois promus à de hautes fonctions officielles et dépeint son obscurité comme une insulte au savoir chinois et aux principes confucéens. « Notre actuel gouvernement se conforme à tous les égards aux anciens usages de la période Engi, écrit-il. Les lettres fleurissent, les récompenses et les sanctions sont judicieuses, et ses sujets admirent joyeusement le souverain. Mais Masahira, qui a fait de la littérature sa vocation, est pauvre et vieux, alors que les fonctions qu’il a remplies lui vaudraient d’être nommé gouverneur », et ainsi de suite, comme le veut l’habitude des fonctionnaires blessés.
    Son impuissance à accéder à une charge plus élevée fut peut-être due au manque d’appui des ministres Fujiwara. Cependant, il semble avoir eu un curieux caractère, grincheux et solitaire. Une lueur est jetée sur son comportement par un incident relaté dans un journal intime contemporain en date de janvier 985, où l’on nous dit qu’il eut un doigt coupé par un ennemi qui l’attaqua avec une épée. On découvrit que l’agresseur était un officier de la garde du palais, un Fujiwara nommé Nariaki. On ne sait rien de l’affaire, sauf qu’on

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