Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Histoire d'un paysan - 1794 à 1795 - Le Citoyen Bonaparte

Histoire d'un paysan - 1794 à 1795 - Le Citoyen Bonaparte

Titel: Histoire d'un paysan - 1794 à 1795 - Le Citoyen Bonaparte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Erckmann-Chatrian
Vom Netzwerk:
comme toujours, au moment du
péril.
    Le feld-maréchal autrichien Kray avait
tellement battu le vieux Schérer, à Magnano, que notre armée
d’Italie, réduite à vingt-huit mille hommes, s’était vue forcée de
reculer jusque derrière l’Adda ; c’est là que Moreau, montrant
un vrai patriotisme, en avait accepté le commandement. Alors
Souvaroff, avec ses quarante mille Russes, était arrivé, ayant
aussi sous ses ordres quarante mille Autrichiens. Il avait surpris
le passage de l’Adda à Cassano, et contraint Moreau d’évacuer Milan
et de repasser le Pô, en lui laissant les trois quarts de l’Italie
du Nord. Moreau le savait d’avance ; il savait qu’une armée de
vingt-huit mille hommes, déjà battue et découragée, ne peut
résister à quatre-vingt mille hommes victorieux, pleins de
confiance dans leurs chefs ; mais il savait aussi qu’un bon
général n’éprouve jamais de grandes déroutes, et qu’il sauve tout
ce qu’il est possible de sauver ; cela lui suffisait. Il mit
en ce temps le devoir et le salut de la patrie au-dessus de sa
propre renommée, ce qui n’arriva jamais à Bonaparte.
    Souvaroff avait essayé de le poursuivre, en
passant le Pô derrière lui, mais il avait été repoussé. Tous les
Italiens étaient soulevés contre nous et nos places
assiégées ; la retraite de Macdonald, qui ramenait de Naples
dix-huit mille hommes le long de la côte, était menacée par des
forces doubles et triples des siennes. Moreau se rapprochait de lui
pour l’aider à faire sa jonction ; mais vers la fin de juin,
nous apprîmes que Macdonald avait été défait par Souvaroff sur la
Trébie, après une bataille de trois jours, et que dans le même
moment Moreau, profitant de l’éloignement des Russes, avait battu
Bellegarde à Cassina-Grossa, puis rejoint les débris de l’armée de
Naples, aux environs de Gênes.
    Aussitôt Sieyès, nommé directeur, fit
destituer Macdonald. Il rappela Moreau, et nomma Joubert, un des
lieutenants de Bonaparte, au commandement de l’armée d’Italie.
Joubert commandait la 17 e division militaire ;
c’était l’homme de Sieyès, l’épée qu’il lui fallait pour appliquer
sa constitution et devenir son bras droit. Ce général n’ayant pas
encore assez de réputation, Sieyès l’envoyait en Italie pour
vaincre Souvaroff, qui s’était rendu maître de ce pays en bien
moins de temps que Bonaparte, et qui, dans ses proclamations
barbares, menaçait de nous passer sur le ventre et de venir à Paris
proclamer Louis XVIII. Après cela Sieyès et Joubert auraient été
les deux grands hommes : le législateur et le héros de la
république.
    Nous reçûmes en ce temps deux autres lettres
de Marescot, un peu moins fières que celle de 96 ; Lisbeth
avait perdu presque tout son butin de Rome et de Naples au passage
de la Trébie ; mais le principal pour nous, c’était de savoir
qu’ils vivaient encore.
    On comprend que si ces malheurs d’Italie nous
touchaient, ceux qui s’avançaient sur nous de la Suisse et des
bords du Rhin nous inquiétaient beaucoup plus. Après la défaite de
Jourdan à Stokach et sa retraite en Alsace, Masséna, nommé général
en chef des trois armées, ne pouvait plus se maintenir dans ses
positions avancées de la Suisse ; il avait évacué le
Voralberg ; et comme l’archiduc et Hotze inquiétaient sa
retraite, il leur avait livré bataille et les avait battus à
Frauenfeld, ce qui lui permit alors de se replier tranquillement
sur la Linth et la Limmat.
    L’ennemi le suivait pourtant toujours ;
deux combats eurent lieu devant Zurich mais, quoique vainqueur,
Masséna quitta cette ville et prit une position meilleure, sur le
mont Albis, derrière les lacs de Zurich et de Wallenstadt.
Malheureusement les cantons s’étaient soulevés, ils ne voulaient
plus rien nous fournir, et les réquisitions forcées dans ces pays
ruinés ne donnaient plus grand-chose. Les Allemands adossés au pays
de Bade, tiraient tout de chez eux.
    Lecourbe, attaqué sur le Saint-Gothard par des
forces supérieures, avait fait aussi sa retraite, en descendant le
cours de la Reuss. Il fallait vivre et faire vivre tout ce monde.
Alors les réquisitions de toute sorte, en grains, farine, fourrage,
bétail, recommencèrent chez nous. Les fournisseurs couraient
l’Alsace, la Lorraine et les Vosges, achetant à tout prix, mais ils
ne donnaient que des bons, l’argent manquait ; on cachait
tout ! Le froment, pesant le setier 240 livres,

Weitere Kostenlose Bücher