Histoire Romaine
de ses études. Nous avons fait voir que la
littérature monarchique, rejetant bien loin ces pratiques, s’appliqua au
développement des vrais principes. Et chose au plus haut point remarquable, celui
qu’on vit à la tête des nouveaux grammairiens, n’était ni plus ni moins que
César lui-même, qui, dans son traité de l’Analogie [1599] (édité entre 696 et 764 [ 58-50 av. J.-C.] ), entreprit le premier de ramener la langue jusque là sans frein, sous la
puissance de la loi.
Au mouvement très considérable qui se produit dans la
philologie ne répond point une activité productive égale dans le domaine des
autres sciences. Quelques travaux philosophiques non sans importance, l’exposition
de l’épicuréisme par Lucrèce, revêtue du costume primitif des vers selon la
formule anté-socratique, et les écrits académiques , les mieux réussies
des œuvres de Cicéron [1600] ,
ne portent coup et ne conquièrent leur public qu’en dépit du sujet, et que
grâce à la forme esthétique qu’ils affectent : quant aux innombrables
traductions des livres épicuriens, quant aux traités pythagoriciens, comme le
gros livre de Varron sur les principes des nombres [1601] , quant à celui
plus volumineux encore de Figulus sur les Dieux [ De Deis ], ils n’eurent, à n’en point douter, ni la valeur
scientifique ni le mérite de la forme. – Les sciences professionnelles sont de
même faiblement cultivées. Le dialogue de Varron sur l’agriculture [1602] , montre plus de
méthode que les œuvres de ses devanciers, Caton et Saserna, sur qui aussi, soit
dit en passant, mainte critique et maint blâme pourraient justement tomber. Mais
il sent davantage le travail de cabinet, quand ceux-ci, au contraire, sont
dictés uniquement par l’expérience des champs. Varron encore [1603] , et un
consulaire de l’an 703 [ 51 av. J.-C.] , Sulpicius Rufus [1604] ,
ont publié des études juridiques. Nous n’en dirons qu’une chose ; elles
sont un tribut payé à l’enjolivement dialectique et philologique de la
jurisprudence romaine. Après cela, irons-nous mentionner les 3 livres de Gaius
Matius sur la cuisine , les salaisons et la confiserie [1605] , le premier
livre en ce genre, édité à Rome, autant que l’on sache, et production digne d’être
notée, si l’on songe que l’auteur est homme du grand monde [1606] ? – Les mathématiques,
la physique furent encouragées, grâce aux tendances de plus en plus
hellénistiques et utilitaires de la monarchie. On constate leur progrès par la
place qu’elles prennent dans le programme de l’éducation, et dans les
applications pratiques. Parmi ces dernières il faut énumérer la réforme du
Calendrier , l’établissement des premières cartes murales [1607] , l’amélioration
technique du génie naval, de la facture des instruments de musique, des plantations
et des constructions, comme la volière décrite par Varron, nous en offre un
exemple [1608] ;
le pont de pilotis jeté sur le Rhin par les ingénieurs de César ; enfin
ces deux échafaudages demi-circulaires en charpente, disposés pour glisser l’un
vers l’autre, et formant, séparés, deux théâtres, ou, réunis, un amphithéâtre [1609] . Il n’était
point rare de voir, dans les jeux populaires, exposer devant la foule les
curiosités naturelles exotiques ; et les animaux merveilleux crayonnés par
César dans ses Commentaires, témoignent assez, qu’Aristote revenant, il eût
aussitôt retrouvé son prince et protecteur. Quoi qu’il en soit, tout ce qui
tient à la littérature de l’histoire naturelle demeure dans le sillon du
néo-pythagoréisme. Ainsi en est-il des Observations célestes grecques et
barbares , c’est-à-dire, égyptiennes, rassemblées par Figulus, et de ses
écrits sur les animaux , les vents , les organes sexuels [1610] . Chez les Grecs,
les études physiques, s’écartant de la méthode aristotélique qui demandait sa
loi à chaque chose, avaient dégénéré en empirisme sans critique, en recherche
insensée de l’extraordinaire et du merveilleux : aujourd’hui cette même
science, transformée en une sorte de philosophie mystique de la nature, au lieu
de faire la lumière et la vie, n’était bonne au plus qu’à les étouffer et les
obscurcir. En face de telles tendances, mieux valait assurément s’en tenir à ce
niais précepte, que Cicéron nous donne quelque part comme le fin mot de la
sagesse socratique : « l’étude de la nature
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