Hitler m'a dit
de pain et de l’inflation, il lui est désormais impossible de l’oublier. La masse ne possède qu’un appareil intellectuel et sensoriel très simple. Tout ce qu’elle ne parvient pas à cataloguer la trouble. Ce n’est qu’en tenant compte des lois naturelles, que je suis capable de la dominer. On m’a reproché de fanatiser la masse, de l’amener à un état extatique. Le conseil des psychologues subtils est qu’il faut apaiser les masses, qu’il faut les maintenir dans un état d’apathie léthargique. Non, Messieurs, c’est exactement le contraire qu’il faut. Je ne puis diriger la masse que lorsque je l’arrache à son apathie. La masse n’est maniable que lorsqu’elle est fanatisée. Une masse qui reste apathique et amorphe est le plus grand danger pour une communauté politique quelle qu’elle soit. L’apathie est, pour la masse, une des formes de la défense. Elle est un repli provisoire, un sommeil de forces qui éclateront subitement en action et en réactions inattendues. L’homme d’État qui n’intervient pas immédiatement, lorsqu’il voit les masses devenir apathiques, mérite de passer en Haute Cour.
» J’ai fanatisé la masse pour en faire l’instrument de ma politique. J’ai réveillé la masse. Je l’ai forcée à s’élever au-dessus d’elle-même, je lui ai donné un sens et une fonction. On m’a reproché de réveiller dans la masse les instincts les plus bas. Ce n’est pas cela que je fais. Si je me présenté devant la masse avec des arguments raisonnables, elle ne me comprend pas ; mais quand j’éveille en elle des sentiments qui lui conviennent, elle suit immédiatement les mots d’ordre que je lui donne. Dans une assemblée de masse, il n’y a plus de place pour la pensée. Et, comme j’ai précisément besoin de créer une telle ambiance, parce qu’elle me donne seule la certitude que mes discours produiront leur effet maximum, je fais rassembler dans mes réunions le plus grand nombre possible d’auditeurs de toutes sortes et les contrains à se fondre dans la masse, qu’ils le veuillent ou non : des intellectuels, des bourgeois aussi bien que des ouvriers. Je brasse le peuple et je ne lui parle que lorsqu'il est pétri en une seule masse. » Hitler réfléchit quelques instants, puis il reprit : « J’ai la conviction intime que, dans l’art d’influencer les masses, personne ne peut rivaliser avec moi, même pas Goebbels. Ce qu’on peut obtenir par le calcul et la ruse, c’est le domaine de Goebbels. Mais la vraie domination des masses n’est pas une chose qui s’apprenne. Et, notez bien que plus la masse est nombreuse, plus il est facile de la diriger. Plus riche est le mélange des ingrédients humains, paysans, ouvriers, fonctionnaires, plus l’amalgame prend le caractère typique d’une masse désindividualisée. Rien à faire avec des réunions limitées de gens cultivés, de Représentants d’intérêts professionnels ou autres : ce qu’aujourd’hui vous obtiendrez d’eux par une démonstration logique, sera détruit demain par une argumentation diamétralement opposée. Mais ce que vous dites au peuple, lorsqu’il forme une masse, alors qu’il se trouve dans un état réceptif de dévouement fanatique, cela s’imprime et demeure comme une suggestion hypnotique ; c’est une imprégnation indestructible qui résiste à n’importe quelle argumentation raisonnable. Mais prenez garde : de même qu’il existe des névroses individuelles auxquelles le médecin n’ose pas toucher, de même on trouve dans la masse des complexes qu’on n’a jamais le droit de réveiller. Au nombre de ces tabous, il faut compter tout ce qui peut évoquer les mots dangereux d’inflation et de cartes de pain. Je peux exiger tranquillement de la masse des privations bien plus pénibles, mais il faut que je lui procure en même temps les suggestions émotives qui lui permettront de les supporter. Comment pourrais-je jamais songer à conduire plus tard une guerre si je plonge dès maintenant les masses dans cet état d’apathie où elles étaient en 1917 et 1918 ? »
Il y eut un silence que je rompis en demandant si le parti n’avait pas pour fonction de tout expliquer à la masse, ou, plus exactement, aux individus pris en dehors de la masse.
— « Non ! » répondit Hitler. « Sans doute, on peut essayer pour un certain temps la propagande individuelle. Mais, aux heures critiques la masse se crée partout, dans la rue, à
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