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Iacobus

Iacobus

Titel: Iacobus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
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nous
retournâmes en souriant dans le moulin. Je me glissai à ses côtés dans un des
deux lits. Nos corps trouvèrent rapidement la posture pour dormir unis,
s’adaptant l’un à l’autre d’une manière naturelle comme s’ils l’avaient toujours
fait, comme si chacune de leurs parties s’emboîtait parfaitement. Je dormis
ainsi jusqu’au lendemain. Si Jonas entendit, vit ou devina quelque chose de
cette première nuit, il le cacha très bien, mais peu de temps après son
rétablissement, il décida qu’il préférait dormir seul à l’étage inférieur.
     
    Je savais que mon amour pour Sara était infini,
mais je ne voulais pas penser à ce qu’il adviendrait de nous quand la dure
réalité viendrait nous tirer de notre petit paradis. Mon corps et mon esprit
chassaient l’idée que chaque seconde que je passais auprès d’elle était une
seconde volée, menacée, et que nous allions le payer chèrement. L’amour de
jeunesse que j’avais éprouvé pour la mère de Jonas était comme un rêve plein de
pureté, comme un après-midi paisible près d’une fontaine. L’amour que je
ressentais envers Sara n’avait rien à voir avec tout cela, car la passion la
plus ardente débordait de ce fleuve de folie. Je savais que je ne pouvais
conjuguer mon état de moine chevalier avec cette femme merveilleuse qui m’avait
rendu à la vie et à la joie, mais je ne voulais pas y penser, je ne voulais pas
perdre une seule goutte de ce breuvage euphorisant.
    Mais le destin, ce mystérieux et suprême destin
dont parle la Kabbale, celui qui tisse les fils de nos vies malgré nous, décida
une fois de plus, bien que nous nous acheminions vers l’inexorable, que je
devais affronter la réalité de la manière la plus violente pour arriver ainsi
plus vite à la vérité. Deux mois exactement après le début de notre
pérégrination, le neuvième jour d’octobre, le malheur se présenta à
l’improviste dans le moulin.
    Sara et moi avions passé une bonne partie de la
nuit à nous aimer. Nous nous étions ensuite profondément endormis dans les bras
l’un de l’autre, les jambes entrelacées sous les couvertures. Sa tête reposait
sur ma poitrine tandis que mes bras l’entouraient d’un geste avare et
protecteur. Mon nez s’appuyait sur ses cheveux argentés car je m’étais habitué
aux chatouilles qu’ils me procuraient à seule fin de respirer son parfum durant
toute la nuit. Sara prenait grand soin de sa chevelure. Elle la lavait et la
peignait avec soin, disant qu’elle ne supportait pas de la sentir grasse et
sale. Elle aimait en entretenir le brillant argenté, héritage semblait-il de sa
famille maternelle où tous, hommes et femmes, arboraient de magnifiques et
abondants cheveux blancs depuis la jeunesse.
    Des bruits de pas suivis de coups violents
frappés à la porte, puis un talonnement sec sur l’escalier de bois qui menait à
l’étage me tirèrent à grand-peine de mon sommeil, et j’étais encore à moitié
endormi quand les pas s’arrêtèrent devant mon chevet.
    — Je suis le frère Valerio de Villares,
commandeur de Léon, annonça une voix ferme et grave, et voici mon lieutenant,
le frère Ferrando de Cohinos. Levez-vous, frère de Born !
    J’ouvris les yeux, effrayé, et sautai du lit
complètement nu, obéissant automatiquement à de nombreuses années de discipline
militaire.
    — Habillez-vous, frère, m’ordonna le
commandeur. Par respect pour la femme, nous vous attendrons en bas.
    Sara me regarda, terrorisée. Un vague sentiment
de culpabilité m’effleura un bref instant, mais je le chassai rapidement.
    — Ne t’inquiète pas, mon amour, lui dis-je
avec un sourire, me penchant pour l’embrasser, tu n’as rien à craindre.
    — Ils vont te séparer de moi,
balbutia-t-elle.
    Je pris ses mains entre les miennes et la
regardai longuement.
    — Rien dans ce monde ne pourra me séparer
de toi, tu m’entends. Ne l’oublie jamais, Sara, parce que c’est important. Quoi
qu’il arrive, aie confiance dans la promesse que je te fais maintenant :
nous ne nous séparerons jamais. Tu me crois ?
    Ses yeux se remplirent de larmes.
    — Oui.
    Jonas apparut à cet instant.
    — Qui sont ces hommes, père ?
    — Ce sont de grands dignitaires de mon
ordre, lui dis-je tout en m’habillant. Écoute, Jonas, je veux que tu restes ici
avec Sara pendant que je les accompagne. Et je veux qu’aucun de vous ne
s’inquiète.
    — Ils vont vous obliger à retourner

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