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Iacobus

Iacobus

Titel: Iacobus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
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le roi durant
ses derniers jours, il fut nécessaire de couvrir les yeux de Philippe IV avec
une bande avant de l’enterrer.
    Ce drame soulevait de nombreuses
interrogations : pourquoi le roi n’avait-il pas fait sonner sa trompe
quand le cerf l’avait chargé ? Où était sa meute de chiens ? Qui
avait vu cette bête extraordinaire ? Quelqu’un avait-il traqué l’animal
depuis l’accident ? Comment le roi avait-il pu se perdre dans ces bois
qu’il semblait si bien connaître ? Les symptômes de son agonie : soif
inextinguible, incapacité de s’exprimer, folie, paupières rebelles, s’accordaient
par contre très bien avec le coup reçu sur la tête. J’avais déjà lu la
description de cas semblables où les malades qui ne mouraient pas après avoir
reçu un tel choc se réveillaient transformés, perdaient la raison, répétaient
mécaniquement des mots, des gestes sans aucun sens, avaient des visions ou
souffraient d’une faim ou d’une soif insatiable dont ils finissaient par
mourir. Cela ne faisait aucun doute, le coup reçu sur la tête était la cause de
tout, mais ces mots : « La croix, la croix » m’intriguaient. À quelle
croix le roi faisait-il allusion ?
    Jonas revint deux heures plus tard les joues
rouges, tout dépenaillé, la chemise sortie du pourpoint, les chausses couvertes
de boue.
    — Quelles nouvelles m’apportes-tu ?
lui deman-dai-je en souriant.
    — Paris est la plus belle ville du
monde ! s’exclama-t-il en se laissant tomber de tout son long sur son lit.
    — Aurais-tu rencontré une jolie jeune
fille ?
    Il souleva la tête et me regarda avec un air de
reproche.
    — Je suis encore un novice.
    — J’ai l’impression que ce ne sera pas pour
très longtemps, dis-je en posant ma plume et mon scaepellum. Tu as pu remettre la lettre à Béatrice
d’Hirson ?
    — Oui, mais quelle histoire ! Voyez
plutôt : j’arrive à la conciergerie du palais, en vérité la plus belle
construction de France. Les gardiens à la grille veulent m’empêcher de passer,
bien sûr, et je leur demande qu’ils aillent prévenir Mme d’Hirson parce que
j’ai un message très important pour elle. D’abord, ils se moquent de moi, mais,
devant mon insistance, finissent par envoyer un garçon à l’intérieur du palais.
Il tarde à revenir, et quand déjà je n’espère plus, il revient me dire que
cette dame ne me recevra pas parce qu’elle ne sait pas qui je suis ni qui
m’envoie. Vraiment, ajouta-t-il de mauvaise humeur, je ne comprends pas comment
vous avez pu me charger d’une mission aussi compliquée. Vous ne saviez donc pas
que l’on n’accède pas ainsi à la noblesse ?
    — La noblesse, mon cher Jonas,
l’authentique noblesse, n’a pas grand-chose à voir avec les courtisans.
    — Peut-être, mais on ne peut faire parvenir
comme ça des messages aux courtisans.
    — Et comment as-tu résolu le
problème ? repris-je avec intérêt.
    — Qui vous dit que je l’ai résolu ?
    — Tu aurais une attitude bien différente si
tu n’avais pu remplir ta mission. D’abord, tu ne serais pas arrivé avec cet air
réjoui, et puis tu ne me raconterais pas ton odyssée avec ce ton de reproche si
tu n’avais pas remporté un succès. Cela te permet de donner plus d’emphase à ta
victoire.
    — Que signifie le mot « odyssée »
?
    — Pardieu, Jonas, tu es vraiment un
ignorant ! Est-ce que tu n’as pas lu au monastère la belle oeuvre De
bello Troiano de Josephus Iscanus ou la populaire Ilias
Latina de Silio Italico que connaissent même les cancres des
universités ?
    — Vous voulez connaître la fin de mon histoire
oui ou non ? continua-t-il, fâché.
    — Oui, mais il va falloir que nous parlions
sérieusement de ton éducation.
    — Je me promène donc autour du palais
pendant un moment en regardant les oeuvres de la nouvelle cathédrale Notre-Dame.
Je visite les chapelles de Saint-Denis-du-Pas et Saint-Jean-Le-Rond. Vous
saviez qu’on déposait la nuit sur le seuil de ces chapelles des enfants
abandonnés comme moi ?
    — Comment aurais-je pu le savoir ?
    — Bien... Au bout d’un moment, je retourne
à la conciergerie prêt à n’en plus bouger jusqu’à ce que je trouve une occasion
propice. Comme je m’ennuie un peu, je m’assois à côté d’une vieille qui vend
des galettes près de la grille, et elle commence à me raconter des tas de
choses intéressantes sur les coutumes des habitants du palais. Elle me dit que
la

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