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Iacobus

Iacobus

Titel: Iacobus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
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votre vin avant que
nous repartions vers Paris.
    — Eh bien ! Descendez de vos chevaux
et servez-vous.
    J’attachai les rênes de ma monture à un arbre,
imité par Jonas, et me dirigeai vers la femme.
    — Sûr que vous lui avez donné dix écus d’or ?
    — Je vous l’assure, madame, mais comme je
vois que vous n’avez pas confiance, voici un écu de plus pour vous. Nous nous
sommes perdus dans les bois et sans l’aide de votre mari nous y serions encore.
    — Asseyez-vous et buvez, dit-elle en
indiquant un banc de bois. Le vin est bon.
    En réalité le vin était infect, mais quel autre
prétexte trouver pour débuter une conversation ?
    — Et que venez-vous faire par ici ?
Cela fait bien longtemps que je n’ai pas vu de monsieurs de la ville.
    — Mon jeune ami et moi sommes coutillers [4] du roi Philippe le Long
que Dieu garde longtemps en vie.
    La femme ne me crut pas.
    — Comment pouvez-vous être à la solde du
roi si vous n’êtes même pas français ? Vous avez un accent bizarre.
    — Vous avez raison, madame ! quelle perspicacité !
Ma mère était la fille du comte Brongeniart, vous avez certainement entendu
parler de lui, c’était le conseiller de Philippe III le Hardi. Mon père, en revanche, était de Navarre, sujet de la reine
Blanche d’Artois qu’il accompagna lors de sa fuite pour échapper aux ambitions
aragonaises et castillanes sur la Navarre. C’est ainsi qu’il s’établit à Paris
en compagnie de sa petite-fille Juana. Cette vieille histoire est connue de
tous. Quand ma mère mourut, mon père retourna sur ses terres et m’emmena avec
lui. Cela fait peu de temps que je suis revenu, mais le roi a bien voulu me
nommer coutiller parce que je suis un Brongeniart.
    Je terminai mon discours en buvant une gorgée de
son vin aigre et pris l’air candide et distrait de celui qui a raconté une
histoire si évidente qu’il n’y a rien de plus à ajouter. La vieille était tout
étourdie d’une telle profusion de noms de grands nobles.
    — Et dites-moi, qu’est-ce qui vous amène à
Pont-Sainte-Maxence ?
    — C’est bien simple : le pape a
demandé au roi un rapport complet sur la mort de son père, Philippe le Bel, que
l’on retrouva, comme vous le savez peut-être, dans ces bois après sa chute de
cheval. Comme il ne savait plus dire qu’un mot : « La croix »,
le pape aurait aimé le canoniser, de la même façon que Boniface VIII canonisa
en 1297 Louis IX, arrière-grand-père de notre roi. Mais je vais vous confier un
secret, madame, dis-je en baissant la voix comme si nous étions dans une foire
aux bestiaux ou au beau milieu d’une place publique : le roi ne veut pas
que son père soit élevé à cet honneur. Vous imaginez, se retrouver pour
toujours devant le tribunal de l’Histoire avec un arrière-grand-père et un père
canonisés... Comment survivre à la comparaison ?
    — Bien sûr, bien sûr, approuva la harpie.
    — Et donc, au lieu d’envoyer la garde
royale ou les évêques ou ses conseillers, le roi a préféré nous charger nous,
ses coutillers, d’enquêter sur les faits qui entourèrent la mort de son père en
nous demandant franchement de trouver quelque chose qui puisse anéantir les
désirs du pape Jean. Nous devons trouver quelqu’un qui sache exactement ce qui
s’est passé ce jour-là, qui possède tous les détails et qui, en échange d’un
peu d’argent, soit disposé à parler. Vous ne connaîtriez pas par hasard une
telle personne ?
    — Je suis celle qu’il vous faut !
    — Vous, madame ? dis-je, surpris.
    — Mon mari et moi, on sait tout. Vous
comprenez, on n’est qu’une dizaine à vivre dans cette forêt, alors on sait
forcément tout ce qui s’y passe !
    — Ah ! voilà qui est vraiment intéressant.
Tu entends, Jonas, madame est la personne que nous cherchons. Comment vous
appelez-vous, madame ?
    — Marie, monsieur, Marie Michelet, et mon
mari Pascal Michelet.
    — Voici cinq écus pour vous. Avec ce que je
vous ai donné tout à l’heure, et les dix que j’ai remis à votre mari, vous
voilà en possession d’une petite fortune.
    — Comment ! s’écria-t-elle, fâchée.
Vous avez remercié mon mari pour le vin et ses indications, et ce que vous
m’avez donné à moi en arrivant c’est parce que vous le vouliez bien. Pour cinq
écus, je ne sais pas si je pourrai me souvenir de tout.
    — Mais, voyons, Marie, je n’ai rien de
plus, et ce que vous avez déjà va changer votre

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