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Iacobus

Iacobus

Titel: Iacobus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
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des couronnes
couvertes de rubis, de perles et d’émeraudes, des reliquaires d’ébène et de
marbre, des calices, des coffrets, des toiles brodées de précieux fils d’or et
d’argent, des chandeliers de la taille d’un homme et bien d’autres choses tout
aussi merveilleuses. Un trésor impossible à imaginer, me dit-elle. Comment
toutes ces richesses ont-elles pu se volatiliser au nez et à la barbe du roi, du
garde des Sceaux et des Parisiens même ? me demandai-je. Quand avaient-ils
fait sortir ces centaines de coffres des galeries, sans éveiller les soupçons
ni la curiosité ? C’était inexplicable.
    Nous fîmes enfin une halte.
    — Nous sommes arrivés, dit Sara. Maintenant,
silence absolu, les gardes pourraient nous entendre.
    Sara se dirigea vers un mur que rien ne
distinguait des autres à première vue, et commença à l’escalader, se servant
d’encoches taillées dans la pierre. Je la suivis et pénétrai dans ce qui semblait
être la bouche d’un autre tunnel mais était en réalité l’entrée des égouts de
la forteresse. Une pénétrante odeur d’excréments en décomposition nous
assaillit. On entendait au-dessus de nos têtes l’écho étouffé de voix
lointaines et un interminable fracas de pas qui semblaient aller dans toutes
les directions. Notre chemin longeait ces canaux qui empestaient puis
s’arrêtait devant une immense grille de fer qui, malgré sa redoutable
apparence, céda doucement sous la pression de Sara. Quelques instants plus
tard, ma tête heurta le plafond. Sara s’arrêta, me passa la torche, et des deux
mains repoussa vers le haut une énorme pierre qui s’écarta miraculeusement,
légère comme une plume, pour nous laisser le passage.
    — Maintenant, éteignez les torches. Mais
attention, sans les mouiller. Nous en aurons besoin plus tard pour rentrer.
    Après avoir obéi, je grimpai derrière elle et
entrai dans l’obscur cachot d’Evrard.
    — Vous avez eu un problème ? demanda
une voix âgée dans un coin.
    Les ténèbres étaient si épaisses que je n’aurais
pu distinguer ma propre main devant mon nez.
    — Non, aucun. Comment te sens-tu ?
répondit Sara.
    — Mieux, mieux. Mais où est Galcerán ?
Galcerán !
    — Je suis là, chevalier Evrard, si heureux
de vous revoir après tant d’années.
    — Viens ici, mon garçon, me dit-il d’une
voix affaiblie. Approche-toi que je puisse te regarder. Non, ne sois pas
surpris, expliqua-t-il avec un petit rire, mes yeux se sont tellement habitués
à l’obscurité que les ombres n’ont plus de secrets pour moi. Approche... Oh !
mais tu es devenu un homme !
    — Cela fait si longtemps...
    — Manrique a appris un jour par quelqu’un
qui te connaissait que tu vivais à Rhodes. Je crois qu’il m’a dit que tu avais
pris les voeux hospitaliers.
    — C’est exact, frère. Je travaille habituellement
comme médecin dans l’infirmerie de mon ordre.
    — Hospitalier, hein ? répéta-t-il d’un
ton sarcastique. On a toujours dit que nos ordres étaient ennemis, pourtant ni
Manrique ni moi n’avons jamais eu aucun problème avec les hospitaliers que nous
avons connus. Tu ne crois pas que parfois nous sommes pris malgré nous dans des
mythes et légendes sans fondement ?
    — Je suis de votre avis, mais je ne veux
pas que vous vous fatiguiez davantage. Laissez-moi vous examiner. Nous
parlerons plus tard, quand vous aurez repris des forces. J’ai tant de questions
à vous poser.
    J’entendis son petit rire. Je m’habituai peu à
peu à l’obscurité et vis enfin le chevalier Evrard tel qu’il était aujourd’hui.
Lui dont je n’ai jamais réussi à connaître le nom, cet homme qui dans mes rêves
avait, comme Manrique, la taille d’un géant et la force d’un titan n’était plus
à ma grande stupeur qu’un pauvre corps décharné, squelettique. Ses yeux
enfoncés, ses pommettes saillantes, sa barbe grise n’étaient plus ceux de
l’invincible croisé du temps de ma jeunesse que j’avais espéré revoir contre
toute raison. L’odeur de la cellule était, elle, tout à fait reconnaissable
malheureusement. Chaque maladie dégage une émanation particulière. De la même
façon que la vieillesse a une odeur distincte de celle de la jeunesse. De
nombreux éléments influent sur les odeurs corporelles : notre nourriture,
les tissus de nos vêtements, la texture de notre peau même, les matériaux avec
lesquels on travaille, les lieux où l’on vit, et même les gens avec

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