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Iacobus

Iacobus

Titel: Iacobus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
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de France. Elle les a
mariées avec deux des trois fils du roi, Philippe et Charles, l’aîné, Louis,
étant déjà engagé. Mahaut veut voir ses descendants assis sur le trône de ce
pays à tout prix et elle s’est déjà attelée à la tâche en empoisonnant Louis X
et son fils Jean I er .
    — Et le roi, dis-je en continuant sa pensée,
vit dans la crainte constante qu’on lui reproche à tout moment de n’être roi
que grâce à sa belle-mère.
    — Exactement. Le pauvre malheureux ne se
trompe que sur un point : Mahaut n’a pas tué son père. C’est l’unique
crime qu’elle n’a pas commis. Mais il est inquiet. Il organise alors une battue
ridicule pour attraper les rares Templiers qui vivent encore à Paris, ceux qui,
pour une raison ou une autre, se sont déclarés coupables des accusations
stupides de son père et de Nogaret, et qui grâce à cela furent condamnés à des
peines légères et remis peu de temps après en liberté. Le prétexte de ces
nouvelles détentions fut de leur imputer la mort de Philippe le Bel, ce qui
délivrait Mahaut de tout soupçon et légitimait son propre couronnement.
    — Quelle barbarie ! laissa échapper
Jonas complètement fasciné par ce récit.
    Les jeunes adorent en général ce genre
d’histoire.
    — Mon ami Evrard, déjà gravement malade, ne
put quitter Paris à temps. Et maintenant, dit-elle avec rage, il est en train
de mourir en prison !
    — Vous avez bien dit Evrard ?
demandai-je d’une voix affaiblie par l’émotion.
    — Vous le connaissez ?
    « Le connaître, me dis-je, non. Je ne
l’avais vu qu’une fois, il y avait de cela de nombreuses années, en compagnie
de Manrique de Mendoza. J’étais à peine plus âgé que Jonas quand Manrique, le
frère d’Isabel, était revenu au château de son père après avoir passé plusieurs
années à Chypre où s’était établi son ordre depuis la perte de la ville
syrienne de Saint-Jean-d’Acre en 1291. Manrique, un Templier, était arrivé
accompagné de son ami Evrard. Pendant les quelques semaines qu’ils passèrent au
château, ils nous racontèrent d’interminables histoires de croisés, de
batailles, de monarques et de guerriers... Ils nous parlèrent du grand chef
maure Salah Al-Dîn, le roi lépreux, de la pierre noire de La Mecque, du
« Vieux de la montagne » et de ses disciples fanatiques, les
Assassins, de l’eau douce du lac de Tibériade, de la perte de la Véritable
Croix à la bataille d’Hattina... Isabel, la mère de Jonas, adorait son frère
aîné, et moi, j’étais fou d’elle. Pendant que Manrique et Evrard racontaient
leurs histoires au coin du feu dans le salon d’armes du château de Mendoza,
moi, plongé dans l’obscurité, je contemplais en silence le beau visage d’Isabel
éclairé par les flammes, ce visage que je retrouvais aujourd’hui dans les
traits de son fils, jour après jour, semaine après semaine, comme s’il était le
sosie de sa mère. Elle savait que je la regardais, et tous ses gestes, ses
sourires, ses paroles m’étaient adressés. Les noms de Manrique et Evrard
étaient liés à jamais dans ma mémoire aux précieux souvenirs des années que
j’avais passées comme page puis écuyer dans le palais des Mendoza qui s’élevait
près de la rivière Zadorra, sur les terres d’Alava.
    — Vous le connaissez ? répéta Sara.
    — Quoi ? Ah ! oui, oui. Je l’ai
connu il y a bien longtemps, si longtemps que je l’avais presque oublié.
Dites-moi, son compagnon ne s’appelle-t-il pas Manrique, Manrique de
Mendoza ?
    Le visage de la jeune femme se figea en une expression
où se mêlaient tristesse et colère.
    — Vous connaissez aussi Manrique ?
dit-elle d’un ton songeur.
    Apparemment, Sara et moi partagions des
sentiments similaires de perte et de regret pour deux membres de la même
famille. N’était-ce pas à mourir de rire ? J’avais passé toute ma vie à
fuir des fantômes pour les retrouver dans une humble maison du ghetto de Paris.
J’aurais eu besoin de temps pour mettre en ordre mes idées, mais il me fallait
poursuivre.
    — Dites-moi Sara, de quoi souffre
Evrard ?
    — Je l’ignore, mais il se meurt. Il a une
fièvre terrible, et depuis quelque temps reprend à peine conscience.
    — On vous permet donc de lui rendre
visite ? m’étonnai-je.
    Sara éclata de rire.
    — Non, bien sûr, mais je n’ai besoin
d’aucune autorisation pour m’occuper d’Evrard. Souvenez-vous qu’il est enfermé
dans

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