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Iacobus

Iacobus

Titel: Iacobus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
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vous le vouliez ou non !
    — Ma décision est prise, Jonas, tu ne me
feras pas changer d’avis. Retourne à l’auberge si tu préfères, en attendant mon
retour.
    — Très bien ! cria-t-il en colère,
vous l’aurez voulu ! Et puis finalement c’est mieux comme ça, parce que
j’en ai vraiment assez ! Je retourne au couvent.
    — Vraiment ? dis-je en sortant de la
pièce derrière Sara qui m’attendait sur le seuil de la porte. Et comment
comptes-tu arriver jusque-là ?
    — Je ne sais pas, mais je pense que les
moines parisiens du couvent de Saint-Maurice seront ravis de m’accueillir et de
m’aider à rentrer à Ponç de Riba. J’irai les trouver demain à la première
heure. J’en ai assez de voyager avec vous.
    Ses paroles m’arrêtèrent un instant mais, le
coeur serré, je me résolus à avancer sans me retourner. S’il voulait partir, je
ne le retiendrais pas. Mais je refusais de le mettre en danger en le laissant
venir avec nous. Non seulement sa présence n’était pas nécessaire, mais elle
pouvait même devenir une charge si les gardes nous surprenaient. Il risquait,
malgré son jeune âge, une condamnation à perpétuité ou le bûcher même, les
Français en étaient si friands ! Je dois avouer que je craignais aussi
qu’Evrard puisse le reconnaître étant donné sa grande ressemblance avec sa
mère. Je pensai précisément à cela quand Sara me murmura dans
l’obscurité :
    — Je voulais vous dire que votre fils
ressemble de façon étonnante à Manrique de Mendoza. La seule différence est sa
grande taille. Il la tient de vous.
    Trop fatigué, je fus incapable de continuer à
nier ce qui était évident :
    — Écoutez, Sara, il ne connaît pas encore
la vérité. Je vous en prie, ne lui dites rien.
    — Ne vous inquiétez pas, me répondit-elle,
mais dites-moi si mes soupçons sont fondés.
    Je sentis dans l’âme une fatigue infinie :
    — Sa mère est en effet Isabel de Mendoza,
la soeur unique de votre ami.
    — Mais si je me souviens bien, elle est
entrée au couvent après la mort de son père.
    — Laissons là le sujet si vous le voulez
bien.
    — Vous savez quel est votre problème ?
dit-elle soudain. C’est que vous ne savez pas exprimer vos sentiments.
    Nous marchions en silence par les rues étroites
du ghetto quand Sara s’arrêta devant une petite maison abandonnée dont les murs
semblaient sur le point de s’écrouler. La porte branlante s’ouvrait à moitié
sur un intérieur obscur et lugubre. En dépit de cet aspect peu engageant, Sara
entra du pas assuré de celle qui parcourt un chemin familier, et je la suivis
sans crainte. Tout au fond, au centre d’une cour envahie de mauvaises herbes,
un puits à sec se révéla être l’entrée des vieilles carrières. Je descendis
lentement dans les ténèbres les marches d’un escalier. Sara n’alluma ses
torches qu’après avoir avancé d’une cinquantaine de pas par une galerie étroite
et humide couverte de moisissures et de scories.
    — Maintenant nous sommes tranquilles,
dit-elle à voix haute, rompant le silence.
    L’écho fit résonner ses mots.
    Je découvris à la lumière des flammes les murs
de pierre nue qui formaient ces anciens tunnels. Sara me guida à travers ce qui
me sembla être un véritable labyrinthe. Inquiet, je ne cessais de penser que si
cette femme décidait de m’abandonner, je serais incapable de retrouver la
sortie.
    Sara connaissait le chemin par coeur et avançait
rapidement. De temps en temps, sans doute par prudence, elle ralentissait le
pas puis se penchait vers le sol avant de reprendre sa marche. Une longue
demi-heure s’écoula ainsi. Nous avancions le long de galeries secondaires qui
débouchaient sur des placettes. Plus nous approchions de la forteresse, plus
nous trouvions de traces révélant l’utilisation de ces souterrains par les
Templiers : une effigie mutilée de l’archange saint Michel abandonnée dans
un coin, un coffre ouvert et vide au milieu du chemin ; des niches
creusées dans les murs et gravées d’étranges dessins (signes solaires, aigles à
double tête). Nous tombions parfois aussi sur des amoncellements de roches
produits par d’anciens écroulements des voûtes. Sara me raconta que, des années
auparavant, quand elle avait visité en cachette ce dédale de galeries, les
coffres remplis d’or et de pierres précieuses étaient empilés contre les murs,
montant jusqu’au plafond. Elle avait vu des bijoux, des diadèmes,

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