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Iacobus

Iacobus

Titel: Iacobus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
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dis-je en
souriant. J’aurais bien volontiers accepté votre offre, mais je dois repartir.
Jonas est seul à l’auberge.
    — Et alors ? marmonna-t-elle en me
tirant par le pourpoint pour me mettre debout. Il ne mourra pas de peur parce
que vous n’apparaissez pas ! Si c’est un garçon raisonnable, et il semble
l’être, il viendra vous chercher ici.
    Je fus profondément reconnaissant à Sara de
prendre cette décision à ma place. Je me sentais terriblement épuisé, comme si
l’idée d’avoir terminé ma mission avait provoqué un relâchement soudain de tout
mon corps, comme si ce dernier réalisait enfin toute la fatigue accumulée
depuis tant et tant d’années... C’était une sensation absurde mais bien réelle
pourtant. Et je m’endormis sous les couvertures au parfum de lavande.
     
    Je quittai Sara et Paris à la fin du mois de
juin pour retourner tranquillement vers Avignon avec Jonas. Nos relations, si
tendues ces dernières semaines, avaient pris de nouveau un caractère agréable
et stimulant. Je le mis au défi de résoudre le premier l’énigme du quatrième
parchemin —  Sara nous l’avait remis
avec beaucoup de réticence ainsi qu’une copie de la lettre d’Evrard que je
comptais remettre au pape à Avignon. Chacun de notre côté, nous essayions de
déchiffrer le mystérieux message. J’avais une idée approximative sur la manière
de procéder, mais je voulais laisser à Jonas le temps d’apprendre l’hébreu
pendant le voyage. Son goût du défi était tel qu’il étudiait à une rapidité
vertigineuse dans le seul but de me battre. C’était un enfant très orgueilleux
et cela m’amusait. En fin de compte, me répétais-je sans cesse, il est bien mon
fils, mon unique descendant qui plus est, puisque mes voeux m’empêchent de
procréer.
    Après de nombreuses réflexions, j’étais parvenu
à la conclusion que je devais lui faire connaître au plus tôt la vérité sur ses
origines. Je devais le mettre au courant avant notre retour à Barcelone et le
laisser ensuite agir en conséquence. S’il voulait retourner au couvent, je ne
l’en empêcherais pas, naturellement. Dans le cas contraire, je comptais le
laisser chez mes parents à Taradell pour qu’ils l’éduquent dans la demeure de
notre famille comme un de Born. Je désirais être fier de mon fils un jour. Et
quant aux Mendoza... Mieux valait ne pas penser à eux.
    À Lyon, je décidai de changer de trajet pour
éviter Roquemaure et tous risques de croiser l’aubergiste François. Je passai
par Vienne, traversai le Dauphiné jusqu’en Provence, et entrai dans le Comtat
Venaissin puis Avignon par l’est. Un soir, alors que nous nous étions installés
pour la nuit, Jonas s’écria soudain :
    — J’ai trouvé ! J’ai trouvé !
    Distrait par la contemplation du ciel, un
magnifique coucher de soleil par Orion, je ne prêtai aucune attention à ce
qu’il venait de dire.
    — J’ai trouvé ! s’exclama-t-il indigné
par mon indifférence. J’ai déchiffré le message.
    Je commençai à sortir tranquillement de nos
sacoches du pain et du fromage pour le dîner.
    — Regardez ! reprit Jonas, tout
excité. L’auteur du message s’est contenté d’intervertir les lettres en
conservant les équivalences. Nous avons perdu beaucoup de temps à cause de la
prononciation. Mais si nous remplaçons la lecture hébraïque du message par son
équivalent latin, qu’est-ce que cela donne ?
    — Pi’he feér
bai-codi..., prononçai-je avec difficulté en lisant le parchemin.
    — Non, non, en latin !
    — On ne peut pas lire ça en latin,
protestai-je tout en avalant un morceau de pain trempé dans le vin.
    Jonas sourit d’un air satisfait, la poitrine
gonflée d’immodestie.
    — Non, bien sûr, quand on sait parler
hébreu comme vous. Votre savoir vous rend aveugle et sourd. Mais oubliez tout
ce que vous savez, mettez-vous au niveau d’un simple étudiant comme moi, et
vous comprendrez. Voyez, la première lettre est le « feh ».
    — Dont la prononciation correcte devant la
voyelle « quibbut », dis-je pour l’embêter, est, si je ne me trompe
pas, « pi » ou « pu ».
    — Je vous ai demandé d’oublier tout ce que
vous saviez ! On prononce peut-être « pi » ou « pu »
en hébreu mais en latin cela donne « fu ».
    — Comment cela ? demandai-je intrigué.
    — Vous me l’avez appris vous-même : la
lettre « feh » peut aussi se prononcer comme un

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