Indomptable
depuis le cou-
loir. Quelques chevaliers se sentent un peu lents, mais
aucun ne s’en plaint. Ils disent simplement que la bière était
plus forte que d’habitude.
Simon regarda Meg.
— S’ils avaient dû succomber, ce serait déjà arrivé à
présent, dit-elle sans détourner le regard de Dominic.
— Retourne à ton poste, dit Simon. Nous t’appellerons
si nous avons besoin d’autre chose.
L’écuyer hésita.
— Monsieur ?
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ELIZABETH LOWELL
— Dominic se sent mieux à chaque respiration, dit
Simon avec un semblant de sourire. Dis aux gens du châ-
teau que leur seigneur sera rétabli à l’aube.
Le soulagement de Jameson fut visible.
— Merci, monsieur.
L’écuyer tourna les talons pour s’en aller, puis se
retourna.
— J’allais presque oublier. Thomas le Puissant voudrait
savoir s’il devra baisser le pont-levis demain matin.
— Non, répondit catégoriquement Simon. Je veux que
personne n’entre ou ne sorte.
— Bien, monsieur !
Sous le regard lugubre de Simon, l’écuyer se retira à une
telle vitesse qu’il en oublia les manières. Quand Simon se
tourna vers le lit, il remarqua la peur inscrite sur le visage
pâle de Meg. Sa main reposait sur le cœur de Dominic, mais
c’était sa respiration qui l’effrayait.
— Ce n’est pas suffisant, murmura-t-elle. Il mourra
avant de se réveiller. Il faut que je prenne le risque.
— Quoi ? Vous ne semblez pas sensée.
Ignorant la question de Simon, Meg se remit sur ses
pieds. Alors qu’elle tendait le bras pour prendre la petite
bouteille bouchonnée, son pied cogna le bol qu’elle avait jeté
sous la frayeur. Elle ramassa le métal froid, le remplit à
moitié d’eau et vida la bouteille jusqu’à ce qu’il ne reste plus
rien du brillant liquide couleur ambre.
Lorsque Meg se tourna à nouveau vers le lit, Simon
s’écarta pour lui laisser plus de place. Son doigt glissa le
long de la bouche de Dominic qui s’ouvrit plus facilement
cette fois. Elle but le puissant médicament dans le bol, se
pencha vers lui et versa le précieux liquide sur sa langue.
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INDOMPTABLE
Après la première gorgée difficile, les choses s’accélé-
rèrent, car Dominic était moins sous l’emprise du poison
grâce à chaque battement de cœur qui envoyait le médica-
ment dans son corps. Lorsque Meg se pencha au-dessus de
lui pour la dernière gorgée, il but le médicament de ses
lèvres aussi naturellement qu’un bébé se nourrit au sein de
sa mère.
Même une fois le bol vide, Meg prit son temps avec les
dernières gouttes, car Dominic lui avait appris à apprécier
l’intimité et la chaleur de sa bouche.
Après la dernière pression furtive de sa langue sur la
sienne qui caressa Dominic et lui administra par la même
occasion la dernière goutte de médicament, Meg se redressa.
Lorsqu’elle se rendit compte que Simon la regardait avec un
mélange de compassion et de surprise, elle rougit. Sans
un mot, elle se dirigea vers la cruche d’eau, rinça le bol et,
ensuite, se rinça complètement la bouche.
Malgré la prudence de Meg, une quantité suffisante du
puissant médicament s’était répandue dans son corps, ce
qui fit en sorte qu’il lui était impossible de rester immobile.
Elle fit les cent pas dans la chambre. Ses pas étaient rapides
et firent chanter les grelots dorés. Comme ce ne fut pas suf-
fisant pour la détendre, elle attrapa la bouteille en pierre et
la roula entre ses paumes comme s’il s’agissait d’une pierre
de rivière froide et apaisante.
Simon regarda Meg, puis son frère, et Meg à nouveau.
— Que fait-on, maintenant ? demanda Simon.
— On attend.
— Jusque… ?
— Jusqu’à ce que l’un des deux médicaments remporte
la bataille, répondit simplement Meg.
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ELIZABETH LOWELL
Simon regarda la bouteille dans les mains de Meg. La
manière négligente avec laquelle elle la manipulait lui fit
comprendre qu’elle ne contenait plus rien de précieux. Il n’y
avait plus de médicament à donner.
— Quand le saurons-nous ?
— Je ne peux le dire, murmura Meg. Tout homme moins
fort serait déjà mort deux fois maintenant.
— Deux fois ?
— Oui, dit-elle sèchement. Une fois à cause du poison.
Une autre à cause du médicament pour le contrer. C’est un
stimulant assez puissant pour faire sauter un cochon au-
dessus du plus haut mur du château.
— Est-ce pour cette raison que vous faites les cent pas
comme un
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