Interdit
d’Ambre. Elle eut à peine le temps de se pré-
parer à la douleur qui allait venir en même temps que
le plaisir de son contact.
Mais elle n’aurait pu se préparer à ce qui se déversa en
elle lorsqu’il la toucha. Rage et désir, mépris et envie, retenue
et chagrin, un supplice qui ne connaissait pas de limites. Il
n’avait ni commencement, ni fin, ni endroit où se cacher.
Sa souffrance et la sienne conjointes.
Elle laissa échapper un cri de douleur entre ses dents
serrées.
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ELIZABETH LOWELL
— Ambre ? fit-il brutalement.
Elle ne répondit pas. Elle ne le pouvait pas. Tout ce
qu’elle pouvait faire, c’était demeurer debout, contre le tor-
rent conjoint de leurs émotions.
— Il serait plus doux pour elle que vous la fouettiez, dit
Cassandra amèrement. Mais vous n’avez aucune douceur
pour elle, n’est-ce pas ?
— De quoi parlez-vous, au nom de Dieu ? répliqua
Duncan. Je ne la serre pas assez pour lui faire du mal.
— Vous pourriez lui briser les os qu’elle n’aurait pas
plus mal.
— Expliquez-vous, femme !
— Que vous la touchiez légèrement ou durement, votre
contact lui est souffrance.
Duncan regarda Ambre, la voyant elle plutôt que sa
propre rage. Elle était très pâle. Elle avait les pupilles si dila-
tées qu’elles n’étaient plus que des anneaux d’or. Sa peau
était lustrée de perles de sueur. Sa force semblait la quitter
davantage à chacune de ses respirations saccadées.
Choqué, il la relâcha comme si elle était un tison
brûlant.
Elle tomba à genoux, serra ses bras contre son corps
froid et lutta pour maîtriser sa douleur. Cela lui était pos-
sible maintenant que Duncan ne la touchait plus.
Possible mais insoutenable.
— Je ne comprends pas, souffla Duncan, à la fois per-
plexe et furieux. Mon contact vous donnait du plaisir aupa-
ravant. Est-ce parce que mon esprit est désormais complet ?
Ambre secoua la tête.
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INTERDIT
— Alors que se passe-t-il, au nom de Dieu !
Pendant un instant, Ambre se démena pour parler. Puis,
elle secoua de nouveau la tête.
— Votre rage, dit simplement Cassandra.
Duncan se tourna vers elle. L’expression de ses yeux
aurait fait tressaillir un chevalier en armure, mais l’Érudite
ne bougea pas d’un pouce.
— Parlez, dit-il.
— C’est simple. Vous êtes rongé par la rage. Lorsque
vous touchez Ambre, elle ressent la haine que vous avez
pour elle aussi bien qu’elle ressentait autrefois votre plaisir.
La fouetter lui ferait moins mal.
Stupéfait, Duncan regarda ses propres mains comme si
elles appartenaient à un autre. Jamais il n’avait battu un
cheval, un enfant ou une femme. L’idée de lui causer tant de
souffrance par le simple fait de la toucher le rendait malade.
— Comment Erik a-t-il pu utiliser son don pour déceler
la vérité ? demanda-t-il à voix basse. C’est un monstre !
— Non, dit Ambre d’une voix rauque. La plupart des
gens ne me donnent que quelques secondes de douleur.
— Et Simon ? demanda-t-il. Vous vous êtes évanouie.
— Simon n’avait qu’une seule chose en tête lorsqu’il m’a
pris le poignet. La haine. C’est un homme d’une grande
passion. Cela m’a bouleversée.
— Et Erik ? demanda-t-il encore. Je doute que ses
passions soient timides.
— Non. Mais elles ne me blessent pas. Il a de la ten-
dresse pour moi, et c’est réciproque.
Duncan grimaça.
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ELIZABETH LOWELL
Le regard de Cassandra passa de Duncan à Ambre.
— Duncan est un homme d’une passion intense, dit-elle
doucement à Ambre. Pourquoi sa haine ne t’a-t-elle pas
submergée ?
— Parce qu’il ressent aussi d’autres choses pour moi.
Cela le déchire. Et cela me déchire, moi aussi.
Sur ces mots, elle se releva. Elle fit un pas en avant,
chancela et elle serait tombée si Duncan ne l’avait pas rat-
trapée avant de se rappeler que son contact ne lui apporte-
rait que douleur. Il la relâcha aussi vite qu’il l’avait touchée.
— Je ne voulais pas…
La voix de Duncan se brisa, et il fit un geste avec ses
mains, signe de sa confusion. Peu importait à quel point il
en voulait à la sorcière de l’avoir trahi. L’idée de lui causer
autant de souffrance en la touchant le dérangeait d’une
manière indicible.
— Ce n’est rien, dit Ambre à voix basse. Ce n’était pas
aussi douloureux que la première fois.
— Pourquoi ?
— La rage était toujours là, mais elle était dépassée par
votre
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