Jack Nicholson
sixties, tel un cyclone, avaient aspiré beaucoup de gens sur leur passage, mais Nicholson, qui savait mieux ce qu’il voulait que la plupart des gens, se protégeait de violents tourbillons. Tout comme il avait résisté à l’influence de Krishnamurti, il se tint à l’écart d’engagements artistiques, ou autres.
Si Easy Rider allait faire de lui un éternel emblème des sixties, par certains aspects, Nicholson était davantage une créature des années 1950. Et par d’autres aspects ataviques, on pouvait même dire qu’il était une créature des années 1940 et 1930.
Les époques dans lesquelles il vivait se reflétaient dans les diverses facettes de sa personnalité. Sa carrière était un pont entre des influences anciennes et modernes. Son style était un mélange de techniques. Les sixties furent une époque déterminante pour Nicholson, une époque formatrice, mais comme toujours l’acteur se révéla sélectif à l’égard de ce qu’il emprunta à la vie.
Certains de ses amis assistaient à des « happenings », des lectures de poésie ou des pièces de théâtre d’avant-garde qui étaient devenues à la mode. Jack encourageait les autres à se rendre à ces évènements révolutionnaires, mais pour ce qui était de lui-même, il se trouvait généralement qu’il avait quelque chose de plus important à faire.
Quelques uns quittèrent le show-business, partirent de Hollywood et se mirent à vivre en communauté à Topanga Canyon, ou, dans le cas de Robert Walker Jr, sur une île des Seychelles. Dean Stockwell, qui ne faisait jamais dans la demi-mesure, s’installa même pendant quelque temps à Haight-Ashbury. Nicholson voulait bien s’ouvrir et s’accorder, mais il avait beau être parfois découragé, il n’était pas question de décrocher.
Et surtout, Nicholson s’impliqua peu dans la politique des sixties. Si Hollywood joua certainement un rôle dans l’activisme des sixties, contribuant, via son argent et son talent, aux campagnes anti-guerre, antiracisme et pro-ouvriers, Nicholson réussit à se tenir à l’écart de tout engagement politique. Il défendit certaines des causes politiques de l’époque, en particulier l’écologie, et écrivit à l’occasion quelques petits billets. Mais Jack était très doué pour inventer des excuses qui lui permettaient de ne pas s’impliquer dans les groupuscules, les manifestations et les campagnes de protestation.
Monte Hellman se souvient avoir assisté à des rassemblements pour la paix et contre le nucléaire, mais ne pas avoir réussi à persuader Jack de l’accompagner. Lynn Bernay se rendait régulièrement à des manifestations anti-guerre du Viêt Nam ; elle ne parvint elle non plus jamais à convaincre Jack d’y participer. Et ils se disputaient souvent à ce sujet. Jack disait qu’il méprisait ses passions politiques : la politique était futile – il se considérait comme au-dessus de tout cela. Les disputes avec Bernay et Don Devlin, autre radical, avaient tendance à amuser Jack. L’humour était un masque efficace qui lui permettait de dissimuler son ambition individualiste.
Henry Jaglom contribua à organiser l’Entertainment Industry for Peace and Justice ( EPIJ ). Jane Fonda, Donald Sutherland et d’autres essayaient de forger une coalition d’activistes de gauche libérale du milieu du cinéma pour travailler sur des problèmes liés à la paix et à la liberté. Jaglom essaya lui aussi d’enrôler Nicholson, en vain.
« Je me souviens avoir essayé de convaincre Jack de s’impliquer, raconte Jaglom. Et il a dit, de façon perspicace, je peux dire, avec le temps, que rien de tout cela ne pouvait vraiment faire changer les choses. Jack a toujours maintenu une certaine distance philosophique vis-à-vis de tous les types d’activisme. Il était toujours du bon côté des choses, il était très affecté par les choses, mais je crois qu’il se disait qu’on ne pouvait pas vraiment les changer. Il avait des opinions sur tout, mais il n’était pas actif d’un point de vue politique. »
Pour Jack, les points clés des années 1960 étaient le sexe et la drogue, les deux concepts étant dans son esprit aussi intrinsèquement liés que le sport et les amis. Pendant les sixties, la politique était dans l’air que tout le monde respirait. Mais la drogue changea la vie de Nicholson, comme il l’a lui-même affirmé à plusieurs occasions. À l’instar de milliers d’autres, qui renoncèrent à
Weitere Kostenlose Bücher